Pierre Pallardy, qui fut un ostéopathe en vogue, affirmait qu’il avait «horreur de masser la poitrine des femmes et de leur toucher le sexe, mais il leur touchait le ventre, la poitrine et le pubis par professionnalisme». S’il dit vrai, son dévouement aura été mal compris par dix-huit de ses ex-patientes: cet homme de 72 ans, comparaît aux assises à compter de ce mardi. Il répond de viols ou d’agressions sexuelles et encourt vingt ans de réclusion. Défendu par un pénaliste de premier plan, Me Hervé Temime, il nie en bloc.

L’accusé se présente sur son site Internet en termes élogieux: né en 1941 à Moulins, dernier enfant d’une fratrie de dix, orphelin de mère dès sa naissance et de père à 12 ans, il est «ballotté de fermes en pensionnats» et rate son bac. Pierre Pallardy insiste sur son parcours singulier, comme si la variété des petits boulots qu’il a exercés lui conférait une irremplaçable connaissance de l’âme et du corps humains. Il dit, en effet, avoir été «commis vacher, serveur, chauffeur, débardeur aux halles, plagiste, maître nageur-sauveteur, professeur de ski nautique, photographe…»

Sous-lieutenant en Algérie, «décoré de la médaille de la Valeur militaire», il entreprend ensuite des études de kinésithérapeute «en soignant le Tout-Paris et des personnalités du monde entier». Bien entendu, ses livres, dont Le Droit au plaisir, Plus jamais mal au dos ou Et si ça venait du ventre?, sont des «best-sellers, traduits dans le monde entier».

La chute de l’Olympe du manipulateur de vertèbres commence en 2006: une patiente dénonce à la justice des agressions sexuelles dont elle se prétend victime. L’accusation dépeint un redoutable processus d’emprise, certaines jeunes femmes confrontées à la lubricité explicite de leur ostéopathe – qui facturait les séances entre 80 et 120 euros – revenant toutefois de leur plein gré dans son cabinet cossu de la rue Berlioz (Paris VIIIe). L’une d’elles s’interroge d’ailleurs sur sa propre attitude, qu’elle met au compte de sa «faiblesse psychologique». La liste des plaignantes s’allonge à mesure que les enquêteurs épluchent les agendas de M. Pallardy ; l’une se suicidera peu après avoir révélé les faits dont elle aurait été l’objet.

Mais la police identifie aussi des patientes satisfaites du thérapeute à l’encontre duquel elles ne formulent aucun grief, et des confrères élogieux à son endroit pour lui avoir confié des patients à eux et les avoir retrouvés en meilleure forme.

Pour autant, la situation de Pierre Pallardy, qui dirige avec son épouse un hôtel sur l’île de Ré, semble bien inconfortable alors que s’ouvre son procès. L’ordonnance de mise en accusation, bien que truffée de fautes de frappe et rédigée à la diable, accumule les doléances des parties civiles. Toutes se ressemblent peu ou prou, toutes semblent, avant de passer à la moulinette du contradictoire, crédibles.

Les experts psychiatres et psychologues décrivent un être d’intelligence moyenne, hypertrophié du moi et autoritaire. Ses proches, eux, évoquent un homme «chaleureux, généreux, sensible, disponible» mais – l’adjectif revient – «autoritaire». On le dit par ailleurs «paternaliste et passionné par son travail».

Il forme avec sa femme, Florence, épousée en 1968, un couple solide. Les Pallardy ont eu quatre enfants, avec lesquels l’ostéopathe, lui-même privé très jeune de ses parents, s’est comporté en «père attentionné». Mme Pallardy reste persuadée de l’innocence de son mari, car il est «profondément sain et intègre, aimant son métier par-dessus tout». À ses yeux, ses déboires relèvent de «la jalousie, de la vengeance et de l’affabulation» des plaignantes.

«Le petit Jésus est en vous pour tomber directement sur moi au téléphone», aurait un jour confié le praticien à une patiente, avant, selon elle, de la violer. Le verdict est attendu le 18 octobre.

source : LE FIGARO