Le Vatican : Hervé Yannou
21 février 2005

L’aurait-on oublié, le diable existe. Devant le développement des sectes sataniques et l’essor de l’occultisme, l’université romaine Regina Apostolorum dirigée par la congrégation des légionnaires du Christ s’est mise en ordre de bataille. Un cours intitulé «Exorcisme et prières de libération» a été inauguré par cette université pontificale en fin de semaine dernière. Une «première mondiale», selon ses organisateurs. Il ne s’agit pas de ressortir des grimoires médiévaux, mais «d’analyser la question de la possession diabolique à la lumière de la diffusion du satanisme chez les jeunes». Ils sont une centaine de prêtres et de séminaristes à s’être acquittés des 180 euros nécessaires pour suivre les sept leçons conduites par des exorcistes, des théologiens, des journalistes, des psychiatres et des anthropologues.

 Nos sociétés sont «contradictoires», à la fois «rationalistes et appelées par les sirènes de l’irrationnel», explique le père Pedro Balajon. Pour ce professeur de théologie intervenant dans cette formation, les personnes convaincues d’être possédées par le diable sont de plus en plus nombreuses à demander l’aide de prêtres.

 Loin des images d’Epinal, un exorciste ne chasse pas Lucifer du corps d’un individu éructant par des incantations et des formules magiques. Un rite d’exorcisme est avant tout une prière. Mais, à la vérité, ceux qui sont sous l’emprise du démon ne sont pas légion. La difficulté pour un prêtre est de «discerner entre une vraie possession diabolique et des troubles psychiques, qui demandent à être soignés par d’autres voies», explique le père Balajon. Il y a un an, l’Eglise italienne a encouragé la collaboration entre exorcistes et psychiatres afin d’assurer le suivi médical et spirituel des cas de possessions démoniaques. Mais les formations en la matière manquent dans l’Eglise. Selon le père Gabriel Amorth, exorciste du diocèse de Rome, «l’Eglise est allée d’un excès à l’autre». Pour effacer les pages noires de l’Inquisition et de ses bûchés, elle a longtemps donné moins d’importance aux prêtres exorcistes. Chaque évêque diocésain devrait cependant en compter au moins un dans les rangs de son clergé.

 Aujourd’hui, la demande est pourtant grande devant le regain d’intérêt des jeunes pour les cultes et les mouvements sataniques, parfois proches de l’extrême droite. Il y a quelques mois, la marine de guerre britannique a ainsi autorisé l’un de ses matelots à pratiquer le culte satanique auquel il s’adonne. La France n’est pas épargnée par le phénomène. On y recense une cinquantaine de groupes, dont l’Ordre des neuf angles et son rituel de messe noire autour d’un exemplaire du livre d’Adolf Hitler, Mein Kampf. En Italie, le malaise est encore plus grand. Le sociologue Carlo Climati qualifie le phénomène de «satanisme bourgeois», car il pénètre les familles via Internet. En juin dernier, sept jeunes adeptes des bêtes de Satan ont été arrêtés près de Milan. Ils sont accusés de trois assassinats et d’avoir conduit deux personnes au suicide. Au cours de l’instruction, certains des prévenus auraient demandé le secours d’un exorciste.

 

Ils sont une centaine de prêtres et de séminaristes à s’être acquittés des 180 euros nécessaires pour suivre les sept leçons conduites par des exorcistes, des théologiens, des journalistes, des psychiatres et des anthropologues.