LOS ANGELES, 23 mai 2006 (AFP) – A peine le controversé "Da Vinci Code" vient-il de sortir qu’une autre polémique risque de se profiler à Hollywood avec l’utilisation par un grand studio du nombre "satanique" 666 pour promouvoir un film d’horreur.

"La malédiction" ("The Omen"), nouvelle version d’un long métrage de 1976, pourrait n’être qu’un des multiples films qui prennent régulièrement la tête du box-office nord-américain, en attirant un public jeune, masculin et avide de frissons.

Mais le studio 20th Century Fox a adopté une stratégie de publicité particulière en prévoyant, dès la mise en route du film, une sortie mondiale le mardi 6 juin 2006, une date qui se lit aussi 06/06/06, opportunément raccourcie en "666".

L’oeuvre devait initialement s’appeler "The Omen 666". "Nous ne voulions pas abuser du 666 en l’utilisant dans le titre, mais ce sera une grosse part de la promotion", a déclaré le directeur de la stratégie commerciale de Fox à l’international, Craig Dehmel, cité début mai par le quotidien Variety.

Or, dans la culture chrétienne, le nombre "666" est celui du diable. "Ici est la sagesse: que celui qui a de l’intelligence, compte le nombre de la bête; car c’est un nombre d’homme, et son nombre (est) six cent soixante-six", lit-on dans l’Apocalypse, chapitre 13, verset 18.

"La malédiction" raconte l’histoire d’un père qui se rend compte que son enfant adopté, Damien, est une réincarnation du diable comme le prouve une tache de naissance "666" sur son crâne, alors que la mort rôde autour de lui.

"Le sixième jour du sixième mois de la sixième année… son règne arrive. La malédiction est en marche, les signes ne trompent pas, l’Armageddon se prépare", affirme, un brin grandiloquent, le site internet du film, où les chiffres 6-6-6 sont séparés par des croix inversées, symbole de l’Antéchrist.

Commercialisation habile, ou provocation alors que de multiples groupes religieux viennent de se déchaîner contre les postulats "blasphématoires" du "Da Vinci Code"? "Normalement, (miser sur Satan) est le genre de chose à éviter à tout prix" lorsqu’il s’agit de vendre un produit, note Robert Thompson, professeur spécialiste des médias à l’université de Syracuse (New York, est).

Mais intégré à la culture populaire, le nombre a un peu perdu de son caractère maléfique: "le 666 est devenu presque une chose amusante, lorsque l’on parle par exemple d’un enfant particulièrement turbulent. On dit +je parie que celui-là a un 666 sur sa tête+", souligne l’universitaire.

Force du 666, sa simplicité, alors que l’Apocalypse est un texte difficile et touffu, rempli de symboles obscurs, explique aussi M. Thompson, en rappelant que le premier film "+La malédiction+ est l’un de ceux qui ont fait connaître le nombre au public".

"C’est parfaitement logique de le sortir ce jour-là. Je suis sûr que desgens vont penser qu’il s’agit d’une manoeuvre sataniste, mais il s’agit justed’un coup de marketing, et ça fonctionne", fait valoir M. Thompson.

Peut-être encore occupées à vilipender "Da Vinci Code", les organisations religieuses et les groupes de défense des valeurs familiales aux Etats-Unis n’ont pas encore réellement donné de la voix contre la campagne de "La malédiction", deux semaines avant sa sortie.

Toutefois, sollicité par l’AFP, Ted Baehr, président de Movieguide, une publication chrétienne conservatrice spécialisée dans le cinéma, indique qu’il n’a rien contre le film lui-même, mais que sa publicité n’est pas très heureuse.

"A chaque fois que l’on donne de l’importance au démoniaque et au satanique, on encourage les instincts les plus bas des gens. Ce n’est pas l’idée que je me fais d’une commercialisation productive", affirme-t-il.
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