La scientologie règle ses comptes avec la psychiatrie, au coeur de Bruxelles, par le biais d’une “commission de citoyens”… qu’elle a créée.
Veut-elle recruter donateurs et sympathisants ?
Elle a en tout cas oublié de se présenter ouvertement…

Le titre de l’exposition qui occupe, depuis le 12 septembre, un espace central de la “Galerie Louise”, au coeur de Bruxelles, à 150 mètres du palais de justice, est beaucoup plus anodin que le contenu de ladite expo. En effet, quand l’affiche évoque les “abus” de la psychiatrie, c’est en réalité à une attaque en règle que la “Commission des citoyens pour les droits de l’homme” (CCDH) se livre dans ses 14 “tableaux” télévisés (et dans d’autres, en carton).

“Industry of Death”

Pour elle, et pour résumer, la psychiatrie est une “fraude”. Il faudrait admettre “l’horrible vérité” à son sujet, qu’elle n’existerait “que pour l’argent”, qu’elle tuerait davantage que les guerres, aux Etats-Unis par exemple avec 1,1 million de décès dans les hôpitaux psychiatriques – malgré un coût des soins de 69 milliards de dollars par an.

Cela va même jusqu’à mettre en scène le régime nazi pour critiquer la psychiatrie moderne, jusqu’à l’affirmation de liens prétendument coupables entre cette science en général et l’industrie pharmaceutique (“Industry of Death”), ou encore à la mise en cause virulente de médicaments (Serentil, Zyprexa, Ritalin, Xanax, etc.). Il est même question d’un “plan d’ensemble pour dominer la culture”, quand ce ne sont pas des “asiles d’aliénés” ayant pour rôle “d’assujettir le malade mental”.

Vraiment, on en passe et des meilleures, car il faut des dizaines de minutes pour recevoir tous les messages délivrés par la CCDH, avant d’en arriver au 14e écran de TV, qui présente cette “commission” et indique comment on peut agir (contre la psychiatrie s’entend). Ensuite, la sortie… où le visiteur peut encore répondre à un questionnaire apparemment anodin, mais où il est invité à livrer ses coordonnées, avec acceptation éventuelle qu’elles figurent dans le fichier de la CCDH. Mais où donc est le problème, hormis une opposition viscérale à la psychiatrie ?

Eh bien, comme c’est dit très brièvement dans le même dernier tableau 14, c’est que la CCDH a en réalité été créée par l'”Eglise” de scientologie, restant ensuite son satellite (elle avait d’ailleurs été perquisitionnée en même temps que la scientologie par le juge Van Espen, en 1999, en Belgique).

Or cette “Eglise” est tenue dans plusieurs pays pour une secte. Le Parlement belge l’avait évoquée comme telle, lors d’une commission parlementaire de 1997. Plus proche dans le temps : on avait appris voilà peu (LLB 4/9) que 14 personnes (morales et physiques) appartenant à la scientologie belge ou la constituant (y compris l’ASBL “Scientologie de Belgique”) étaient poursuivies pour plusieurs faits relevant du droit commun. Le parquet fédéral venait de tracer son réquisitoire en demandant que ces 14 inculpés (certes présumés innocents) soient jugés pour (en tout ou en partie) extorsion, escroquerie, exercice illégal de la médecine, entrave à la pratique de la médecine, non-assistance à personne en danger, infractions à la loi sur le commerce, infractions à la loi sur le respect de la vie privée, association de malfaiteurs et, enfin, organisation criminelle.

On est donc surpris qu’une exposition, haineuse à dire vrai et mise en place sinon par l'”Eglise”, du moins par une de ses émanations, trouve place à Bruxelles sans susciter de réactions. Après tout, les “psys” y sont insultés et la santé des gens, mise en danger. On peut en tout cas le craindre, puisqu’il y a appel au boycott d’une branche majeure de la médecine et que cet appel vise aussi des personnes fragilisées, plus concernées par la psychiatrie.

La Galerie pas avertie

Quant au visiteur “sensibilisé” par l’exposition, il fera bien de réfléchir avant d’aider la CCDH, comme cela lui est proposé, en devenant membre ou en ouvrant son portefeuille (“Vos contributions sont beaucoup appréciées”). Car il enrichirait la galaxie scientologue et s’avancerait dans un voyage aux rives masquées…

A propos de masque, nous avons demandé à l’organisatrice de l’événement, côté “Galerie Louise”, si elle avait été avertie de la mouvance réelle de son exposant. “Vraiment pas et j’en suis désolée”, nous a-t-elle répondu lundi avec sincérité, en précisant ne pas vouloir soutenir ce genre de choses.

a Libre Belgique – 18/09/2007
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Roland Planchar