Parlez-en en bien, parlez-en en mal, mais parlez-en. Reprenant l’adage, les Témoins de Jéhovah disent profiter de l’attention suscitée par leurs positions controversées.

« Ça suscite des questions chez bien des gens », assure un porte-parole du mouvement religieux, Léonce Crépeault. « Une façon pour nous de rejoindre les gens est de les visiter dans leurs foyers. Ils ont lu ou entendu des choses et ils posent des questions. Ça nous donne donc l’occasion d’ouvrir la Bible. »

Les Témoins de Jéhovah ont donc accueilli avec le sourire la poignée de manifestants venus frapper hier matin à la porte de leur congrès annuel au Colisée. Armés de brochures et de vidéos explicatifs, les organisateurs attendaient de pied ferme les médias attirés par la controverse entourant les transfusions sanguines. En mai, la Cour supérieure du Québec a autorisé le CHUQ à transfuser deux prématurés malgré le refus des parents adeptes du mouvement.

Des porte-parole ont multiplié les entrevues afin d’expliquer la rigidité du mouvement dans ses positions. « On voit l’Église anglicane qui se divise sur le mariage homosexuel. Mais un Témoin de Jéhovah de 10 ans sait ce que la Bible dit concernant l’homosexualité », indique M. Crépeault. Le mouvement religieux exclut en effet de ses rangs les gais. À moins que ceux-ci acceptent de « changer ».

« On n’admettrait pas au baptême un homosexuel. Avant de se qualifier, une personne doit rencontrer les critères de la Bible, comme ne pas commettre l’adultère ou être ivrogne. On s’assure ainsi de la qualité de nos membres », poursuit le porte-parole.

Pancartes en main, la dizaine d’anciens adeptes venus manifester hier a surtout voulu dénoncer la position du mouvement sur la question du sang. L’instigateur de la manifestation, Jonathan Lavoie, a lui-même perdu en décembre dernier son frère pratiquant qui refusait toute transfusion.

Rigidité du mouvement

Exclus pour la plupart de leur famille à la suite de leur départ des Témoins de Jéhovah, ces manifestants ont invité les participants au congrès à s’interroger sur la rigidité de leur mouvement.

« Je veux les aider à sortir de cette secte qui bafoue leurs droits, entre autres de recevoir des transfusions sanguines quand c’est nécessaire », indique Jean-Philippe Cossette, un ancien adepte. « En faisant des pancartes, on essaie de réveiller certaines personnes », ironise-t-il, en référence au magazine Réveillez-vous que distribuent les Témoins.

Baptisé en 1993, cet infirmier s’est retiré du mouvement six ans plus
tard afin de recouvrer sa liberté de pensée, dit-il. « Les Témoins de Jéhovah n’ont pas le droit de penser, de croire et d’exprimer ce qu’ils veulent, sinon ils peuvent être exclus, c’est-à-dire excommuniés », déplore M. Cossette.

Léonce Crépeault explique plutôt l’absence de dissidence au sein du mouvement religieux par la perfection de la Bible, seule source d’information crédible à ses yeux. « Chez les Témoins de Jéhovah, il n’y a pas de dissidence parce qu’on s’en tient à la Bible. On ne peut pas la changer, elle est parfaite. »
Pierre-André Normandin

Québec