GRENOBLE, 27 oct 2006 (AFP) – Le cinéaste Yves Boisset a affirmé vendredi devant la cour d’appel de Grenoble que les enquêteurs travaillant sur l’Ordre du temple solaire (OTS) et la "tuerie-suicide" en 1995 de 16 adeptes de cette secte dans une forêt du Vercors avaient négligé le côté "politico-mafieux" de l’affaire.

"La police a négligé les relations de Jo Di Mambro, le chef de la secte, avec le personnel politique du département du Var et ses relations avec Jean-Louis Fargette (ancien parrain de Toulon tué en Italie en 1993) qui avait acheté avec Di Mambro un terrain militaire", a déclaré M. Boisset lors du procès
du chef d’orchestre franco-suisse Michel Tabachnik.

Auteur d’un film intitulé "les mystères sanglants de l’OTS" et diffusé sur France 2, il a ajouté que "l’ombre de Charles Pasqua traînait sur cette affaire" et que l’ancien ministre de l’Intérieur avait refusé toute interview, sans donner d’autres précisions.

M. Boisset, témoin cité par les parties civiles, a évoqué aussi des trafics d’armes entre le Canada et l’Angola. Mais lorsqu’on lui demande si Michel Tabachnik, qui est le seul prévenu dans le procès, a été mêlé à ces trafics, il répond non.

"Tout au long de mes six mois d’enquête, j’ai vu souvent apparaître le nom de Michel Tabachnik, mais jamais dans les affaires mafieuses du Var ou du Canada", a-t-il déclaré.

Michel Tabachnik, accusé d’avoir entraîné par ses écrits les membres de la secte dans une logique suicidaire, et relaxé, faute de preuve, en première instance, esquisse alors un large sourire.
Plus tôt, un ancien membre de l’OTS, Claude le Doth, enseignant de 45 ans, avait affirmé que les membres de la secte "s’interrogaient sur la position de Tabachnik dans la hiérarchie de l’OTS, car il donnait l’impression d’être important".

Mais, selon lui, le chef d’orchestre n’est pas responsable du drame du Vercors car les gens "étaient fanatisés et regrettaient de ne pas être morts en Suisse l’année précédente". "Il a une responsabilité morale dans la crédulité des adeptes, mais pas dans les suicides", a-t-il dit.

Le procès de M. Tabachnik, qui s’est ouvert mardi, se poursuivra lundi avec de nouveaux témoignages et surtout les plaidoiries des parties civiles. La journée de mardi sera consacrée au réquisitoire et à la défense, l’arrêt devant être mis en délibéré.

Les quatre jours de débats n’ont pas permis d’avoir des éléments nouveaux sur le rôle exact du chef d’orchestre dans l’organigramme de l’OTS. Tous les témoins, experts, anciens adeptes et policiers, se sont accordés pour dire que les textes écrits par M. Tabachnik étaient incompréhensibles, ce qui compliquera la tâche de l’accusation.

Entre octobre 1994 et décembre 1995, des "tueries-suicides" de membres de l’OTS ont fait au total 68 morts en Suisse, en France et au Canada.
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