GRENOBLE, 25 oct 2006 (AFP) – Un expert spécialisé dans les sectes, le docteur Jean-Marie Abgral, a accusé mercredi le chef d’orchestre franco-suisse Michel Tabachnik, poursuivi après la mort en 1995 de 16 adeptes de l’Ordre dutemple solaire (OTS), d’être un des chefs de la secte.
Le chef d’orchestre faisait "partie des capes dorées", a affirmé M. Abgral devant la cour d’appel de Grenoble, au deuxième jour du procès de M. Tabachnik accusé d’avoir entraîné par ses écrits les membres de la secte dans une logique suicidaire mais relaxé faute de preuve en première instance.
"C’est le stade ultime dans la hiérarchie de l’OTS, dirigée par les +maîtres réincarnés+ Jo Di Mambro (chef reconnu de la secte NDLR) et Michel Tabachnik", a-t-il déclaré.
Le musicien a réfuté cette affirmation: "je n’ai jamais participé aux
cérémonies des capes dorées". M. Abgral a décrit le processus de main mise sur les adeptes de la secte par leurs chefs: "Dans l’organisation qui servira de berceau à l’OTS, la Golden Way, on habitue les adeptes à des rituels saugrenus, on leur fait voir des portes qui s’ouvrent toutes seules, des spectres qui apparaissent".
"Progressivement, ces idées poussent sur le côté le cohérent, certains abandonnent, ceux qui restent montent en grade, ils deviennent une élite d’initiés", a-t-il expliqué.
Selon l’expert, "les écrits de M. Tabachnik sont souvent incompréhensibles, c’est un méli mélo d’éléments sortant de la tradition chrétienne, de l’alchimie, de l’apocalypse (…) A la lettre, ça ne veut rien dire, mais il y a en filigrane le message suivant: notre passage sur terre est un avatar, il faut le sublimer pour accéder à une dimension spirituelle, divine, cosmique, mais pour
cela notre enveloppe physique doit être détruite".
"L’enseignement de Michel Tabachnik, ses textes (…) vont amener les adeptes à accepter la notion de transit vers Sirius, et le feu est l’élément transcendental pour accéder à Sirius", a-t-il dit.
Un médecin légiste a raconté l’horreur de la tuerie dans une forêt du Vercors en décembre 1995.
Les 14 premiers membres de la secte, drogués après avoir absorbé des médicaments, se retrouvent dans une petite clairière, "se disposent en cercle, les pieds à l’intérieur du cercle, la tête couverte d’un sac en plastique", a affirmé le docteur Eric Baccard.
Deux chefs de la secte, l’architecte André Friedli et le policier
Jean-Pierre Lardanchet, munis chacun d’un pistolet 22 long rifle, passent de l’un à l’autre et les tuent d’une balle dans la tête et le thorax, selon le Dr Baccard. "L’exécution des enfants a sans doute suscité un mouvement de révolte de la part des mères, ce qui explique que les tueurs leur ont porté des coups violents pour les assommer", a-t-il déclaré.
Les crânes de deux mères qui étaient accompagnées de leurs enfants, Marie-France Lardanchet (deux petits garçons) et Ute Verona (une petite fille), portent des traces de fractures.
Selon le médecin, les deux tueurs ont, aussitôt après, déposé du bois sur le corps des victimes, versé de l’essence et allumé. Ils se sont ensuite placés sur le brasier et se sont suicidés en se tirant une balle dans la tête.
Entre octobre 1994 et décembre 1995, des "tueries-suicides" de membres de l’OTS ont fait 68 morts en Suisse, en France et au Canada, dont le gourou de lasecte Jo Di Mambro.