Selon le président de la Mission interministérielle de vigilance et de lutte contre les dérives sectaires (Miviludes), 50 000 à 60 000 jeunes sont exposés au risque de dérive sectaire, par le biais d’activités scolaires ou parascolaires. En décembre, une commission présidée par le député UMP Georges Fenech rendra ses conclusions. Selon l’ADFI Lyon, il existe dans la région une trentaine d’écoles dont le caractère sectaire est attesté par des témoignages.

Les sectes aiment les enfants sans doute trop. « Aujourd’hui le phénomène sectaire s’est beaucoup dilué et les enfants ne sont à l’abri sur aucun point du territoire », explique Jean-Michel Roulet président de la Mission interministérielle de vigilance et de lutte contre les dérives sectaires (Miviludes).
En effet, les grandes enseignes multinationales du sectarisme religieux ont toujours pignon sur rue, mais dans les campagnes des gourous amateurs, apprentis-sorciers font aussi florès. Ces épiceries du bricolage ésotérique cultivent leur emprise. Dans la région, elles sont dans des villages reculés de l’Ain ou de l’Ardèche, ou encore dans la banlieue lyonnaise. Le phénomène prend une telle ampleur qu’une commission d’enquête parlementaire « relative à l’influence des mouvements à caractère sectaire et aux conséquences de leurs pratiques sur la santé physique et mentale des mineurs » ait été mise en place le 29 juin dernier. Présidée par Georges Fenech, député UMP du Rhône, cette commission, qui a déjà commencé ses auditions, rendra son rapport en décembre. « 50 000 à 60 000 jeunes sont exposés au risque de dérive sectaire. Quelques milliers, difficiles à évaluer, par le biais d’activités scolaires ou parascolaires.

Vide juridique pour le télé-enseignement par internet
En cette période de rentrée, à l’heure où l’angoisse de l’échec scolaire est à son comble chez les parents, le chiffre peut faire réfléchir. « Dans une logique purement marketing les grandes organisations de type sectaire investissent dans des filiales de soutien aux devoirs. L’accompagnement scolaire dans les cités se fait aussi sur le lit d’un communautarisme exacerbé », témoigne Catherine Picard présidente de l’Union nationale des associations de défense des familles et de l’individu. Les enseignements sous contrat et hors contrat sont en principe contrôlés et doivent être conformes au programme établi par l’Éducation nationale pour « former l’esprit critique et faire des enfants de futurs citoyens ». « Mais il existe actuellement un vide juridique pour le télé-enseignement par internet, dont les bases arrières sont souvent situées ailleurs qu’en France.
C’est l’un des points que va creuser la commission parlementaire mise en place », explique le président de la Miviludes. Une grande partie de ces organismes scolaires ou parascolaires appartient à la mouvance évangéliste protestante. « Il en est même qui proposent des cours d’anglais gratuit. Certaines se placent sur le terrain de l’éveil musical et l’intégration dans des chorales », témoigne Catherine Picard présidente de l’Unadfi. L’Église de scientologie, qui compte quelque 2 000 adeptes en France n’a pas craint d’ouvrir en juillet dernier deux centres de soutien scolaire à Paris. La mairie a répliqué par une cellule de vigilance spécifique. « En France, comme en Belgique, il existe un unanimisme, face à la pensée totalisante sectaire » constate Jean-Michel Roulet.

Yves Picard
ypicard@leprogres.fr

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Une trentaine d’écoles dans la région
Selon l’ADFI Lyon, il existe dans la région une trentaine d’écoles dont le caractère sectaire est attesté par des témoignages. Quelques-unes auraient pignon sur rue, mais la plupart n’auraient pas d’adresse pour s’évanouir plus facilement dans la nature. Elles porteraient pour certaines des noms aussi fantaisistes que école de l’intuition, école de décodage biologique, école de l’éveil ou école de l’intuition du toucher de la lumière.
Certaines auraient été créées de toutes pièces par l’Église de scientologie, comme Juniors School situé à Lyon dans le 8e arrondissement.
Epinglée par le rapport de la Miviludes, cette école n’est plus sous contrat de l’Éducation nationale depuis qu’un contrôle exercé par l’Inspection académique a mis en lumière le fait, que la directrice ou certains professeurs ne possédaient pas les diplômes requis. Le rapport note aussi « que l’association qui gère l’école semblait être infiltrée au moins par un membre de l’Église de scientologie. »

Y.P.

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Les Frères de Plymouth épinglés par la Miviludes
L’Union des Frères de Plymouth est également dans le collimateur de la mission interministérielle.
Cette minorité protestante issue du rameau évangélique et du mouvement de l’Anglais John Nelson Darby (1800-1882) scolarise ses enfants dans des écoles hors contrat ou leur fait suivre des cours par correspondance ou par internet.
Les quelque 1 500 membres de Frères de Plymouth sont installés à Paris et dans le Sud-Est. Ils sont surtout présents sur le plateau de Chambon sur Lignon en Haute-Loire. Mais ce mouvement chrétien compte aussi une école à Rilleux-la-Pape, qui recèle dans ses cartons selon l’ADFI, des projets d’extension, notamment une halte-garderie.
Les Frères de Plymouth se défendent énergiquement d’être « un mouvement sectaire ».
Mais pour Jean-Michel Rollet, le président de la Miviludes, juridiquement et légalement il n’y a aucun doute, mais précise-t-il « être une secte n’est pas puni par la loi. »
« Il faut savoir que l’instruction est donnée par le conseil des anciens de ne pas voter. C’est pour nous un refus des institutions de la République. Les enfants ne peuvent pas fréquenter les écoles laïques. Ils ne mangent qu’entre eux.
La télévision est considérée comme « l’atelier de Satan ». C’est un véritable enfermement », constate aussi le président de la mission interministérielle.

Y.P.