Quebec: Les enfants du primaire sauront bientôt que la croix, l’étoile de David et le croissant sont des symboles religieux. Comme la fleur de lotus, l’éléphant blanc, le collier de fleurs et le «sac contenant des objets reliés aux Esprits protecteurs». Le nouveau programme d’éthique et de culture religieuse, que La Presse a obtenu, présente pêle-mêle des éléments du bouddhisme, du christianisme, de l’hindouisme, de l’islam, du judaïsme, du sikhisme et de la spiritualité des peuples autochtones.
Même les célébrations des Témoins de Jéhovah sont mentionnées dans le programme, qui sera obligatoire à partir de 2008, sonnant la fin des cours de religion catholique, protestante ou de morale.
Les éléments des religions y sont enseignés par thèmes, par exemple les fêtes, les guides spirituels ou les pratiques alimentaires. Au secondaire, le sacré, les grandes questions existentielles et les nouveaux mouvements religieux sont abordés. La Bible côtoie la Torah, le Coran et la Triptaka. Noël est cité avec Hanukkah, la naissance de guru Nanak et… la fête des Mères.
Une consultation est actuellement menée par le Comité sur les affaires religieuses du ministère de l’Éducation, qui doit rendre son avis final sur ce programme au printemps. Si le volet consacré à l’éthique est généralement salué, celui portant sur la culture religieuse est critiqué.
«À première vue, il faut retravailler globalement la place faite au christianisme, a dit hier Louis Rousseau, professeur en sciences des religions à l’UQAM. Il me semble que la place qui est faite à la tradition chrétienne en général, compte tenu de son importance en pratique – 95% de la population au Québec est issue de cette tradition – n’est pas suffisante.»
Le christianisme y est traité «comme un élément parmi cinq ou six traditions», ce qui nécessite un «rééquilibrage», selon M. Rousseau. Il s’agit de permettre l’accès à notre culture tant aux jeunes d’origine chrétienne qu’aux autres, a-t-il souligné.
L’Association des parents catholiques a, quant à elle, dénoncé l’absence d’éléments tels que le rôle de Marie, la Trinité ou la présence divine dans l’eucharistie. «Les parents que nous avons consultés trouvent de façon unanime que l’aspect spirituel a été évacué du programme», a dit Jean Morse-Chevrier, présidente de l’Association. Elle réclame l’enseignement du catholicisme – et non du christianisme – chaque année dans un module distinct.
«Le ministre de l’Éducation n’a pas répondu aux orientations qu’il avait présentées en 2005», a déploré Mme Morse-Chevrier. À l’époque, Jean-Marc Fournier avait dit que le nouveau programme «reconnaîtrait l’apport très important du christianisme dans notre culture tout en incluant une perspective plus large en regard de la diversité culturelle».
Cours séparé réclamé
Le Mouvement laïque québécois réclame la création d’un cours d’éthique séparé de la culture religieuse. L’enseignement des religions devrait, par ailleurs, être réservé aux quatrième et cinquième secondaires, selon Henri Laberge, président du Mouvement. «Ce n’est pas une bonne idée de mettre l’accent sur les différences entre élèves alors qu’ils n’ont pas l’esprit critique.» Un élève musulman pourrait ainsi se faire dire qu’il doit prier cinq fois par jour ou penser selon les principes de sa religion, même si ses convictions sont autres.
Le programme est toujours en cours d’élaboration, souligne-t-on au ministère de l’Éducation. «Nous avons choisi, comme société, de déconfessionnaliser nos institutions scolaires, a rappelé Marie-Claude Lavigne, attachée de presse de M. Fournier. Nous avons également choisi le vivre ensemble et l’inclusion des autres. C’est pourquoi nous avons choisi d’offrir cette formation qui éclaire les jeunes sur les fondements de chacune des grandes religions présentes dans notre société québécoise.»
La Presse Quebec