VANCOUVER (AP) — La Française Nathalie Gettliffe, qui a reconnu avoir enlevé ses enfants au Canada pour les ramener en France afin de les extraire d’une secte, va devoir rester six mois encore en prison: la jeune femme a écopé lundi d’une peine de 16 mois d’emprisonnement – moins les 10 mois de détention provisoire qu’elle a déjà purgés.

La juge Marvyn Koenigsberg, de la Cour suprême de Colombie-Britannique, lui a également imposé une période de trois ans de mise à l’épreuve.

L’accusation avait requis deux ans d’emprisonnement à son encontre.
La ressortissante française âgée de 35 ans avait été appréhendée en avril dernier alors qu’elle était revenue à Vancouver pour défendre sa thèse à l’Université de Colombie-Britannique. Depuis, elle est détenue pour l’enlèvement en 2001 de ses enfants, Maximilien, et Joséphine, qui avaient été confiés à la garde de leur père par un tribunal canadien.

Nathalie Gettliffe avait emmené les enfants avec elle en France, où ils ont vécu durant cinq ans. Maximilien et Joséphine ont été remis à leur père en juillet.

Au dernier jour de son procès à Vancouver, vendredi, Nathalie Gettliffe s’est déclaré désolée. "Je veux seulement m’excuser auprès des enfants et m’excuser auprès de (mon ancien conjoint) Scott", a-t-elle dit au tribunal. "J’assume l’entière responsabilité de mes gestes".

"Je veux quitter la prison le plus tôt possible pour entreprendre une meilleure relation avec mes enfants et leur père", a-t-elle ajouté après avoir reconnu le mois dernier sa culpabilité.
La juge Koenigsberg a à ce moment-là souligné que le plus grand tort que la jeune femme avait causé à ses enfants n’avait pas été de les emmener en France durant cinq ans, mais de leur faire détester leur père.

Appelé à faire une déclaration à titre de victime, l’ancien mari de Nathalie Gettliffe, Scott Grant, a de son côté expliqué au tribunal que les agissements et les mots de son ex-femme avaient empoisonné sa relation avec ses enfants.

Il a raconté que les deux enfants, avec qui il entretenait une relation chaleureuse avant l’enlèvement, étaient devenus complètement hostiles quand on les lui avait remis, lui demandant notamment pourquoi il avait envoyé leur mère en prison et pourquoi il avait été méchant avec elle.

Scott Grant est membre de l’Eglise internationale du Christ, considérée comme un mouvement sectaire en France, mais pas au Canada.

Lundi, il a estimé devant le tribunal qu’il s’agissait d’un triste jour pour sa famille. "Nathalie a besoin d’aide et sa famille a besoin d’aide", a-t-il estimé.

Maximilien et Joséphine seront autorisés à rendre visite à leur mère, qui a donné naissance à un autre enfant durant sa détention.

En France, le compagnon de Nathalie Gettliffe, Francis Gruzelle, a vivement condamné la sentence, s’en prenant aux autorités françaises et canadiennes, tout en déplorant la situation ainsi créée pour les quatre enfants de la Française. Il est le père de deux de ces enfants, dont le petit Martin, né en septembre alors que sa mère était incarcérée au Canada.

"La France a baissé son pantalon dans cette affaire. Si la France ne l’avait pas livrée (…) aux autorités canadiennes, elle ne serait pas en prison à l’heure qu’il est", a-t-il déclaré au micro de LCI.
"Six mois ça veut dire (…) qu’on martyrise quatre enfants, et pour les quatre enfants, le Père Noël canadien Harper est une ordure", a ajouté M. Gruzelle, faisant référence au Premier ministre canadien Stephen Harper.

De son côté, le député PS de l’Ardèche Pascal Terrasse a espéré lundi après l’annonce de la sentence, que les autorités canadiennes fassent un geste à l’occasion des fêtes de fin d’année et en a appelé à l’intervention de Jacques Chirac.

"Je trouve que la décision est très sévère", a-t-il dit à France Info. "Evidemment, il appartient aux autorités canadiennes judiciaires de défendre le droit canadien, mais dans le même temps, il y a une raison humanitaire supérieure dans ce contexte-là qui n’a pas été prise en compte".

"J’ai été lourdement peiné d’apprendre ça, mais j’ai envie de dire: ‘regardons avec espérance l’avenir’. On pourrait solliciter le président de la République française Jacques Chirac, qui lui-même pourrait solliciter son homologue canadien", a observé le député.

Et d’ajouter: "Je vais solliciter vraisemblablement l’ambassade du Canada" et "plaider l’idée selon laquelle elle pourrait bénéficier d’une forme d’extradition de manière à ce que, à l’occasion des fêtes de fin d’année (…), les autorités canadiennes, les autorités françaises trouvent la voie juste. On pourrait imaginer qu’elle puisse être incarcérée dans une prison de la région pour terminer les six mois qui lui restent à faire". AP