Selon le secrétariat général du Comité interministériel de prévention de la délinquance, la plateforme de signalement ouverte aux familles de potentiels candidats au jihad a reçu « des centaines d’appels » depuis avril et a permis de détecter 625 cas avérés.
Elle avait 14 ans, aimait la musique classique et s’est « radicalisée » sans rien laisser paraître. Sa famille a appelé la plateforme de signalement de potentiels candidats au jihad, qui a déjà détecté 625 cas avérés en six mois.
« Notre bilan? Positif, mais perfectible: nous avons créé de toutes pièces un dispositif qui n’existait pas dans l’arsenal de la lutte antiterroriste, la prévention. » Sans jubiler – « nous tâtonnons », dit-il souvent -, Pierre N’Gahane, préfet de 51 ans, ne dissimule pas non plus sa satisfaction.
Le SG-CIPD à la manoeuvre – En moins d’une semaine fin avril, se souvient-il, il a fallu monter une plateforme de signalement sur internet et un numéro vert (08.00.00.56.96) à destination de familles ou de proches constatant que leurs enfants sont « en rupture » et peuvent à tout moment partir combattre en Syrie ou en Irak auprès de groupes jihadistes.
Une commande du ministre de l’Intérieur, qui venait d’annoncer son plan de lutte contre les filières jihadistes traduit depuis par une loi adoptée définitivement le 4 novembre par le Parlement.
Bernard Cazeneuve était inquiet du nombre grandissant de mineurs parmi le millier de Français impliqués dans le jihad en Syrie. Il a demandé au préfet N’Gahane, qui dirige le Comité interministériel de prévention de la délinquance (CIPD), de bâtir une structure pour « comprendre, détecter et apporter une réponse publique » au phénomène.
A la fin octobre 2014, sur « des centaines d’appels », 625 signalements « pertinents et avérés » ont été traités. Quelque 55% des personnes concernées ne sont pas « de culture arabo-musulmane », un quart sont des mineurs, 44% des filles. Cent personnes étaient déjà parties lors du signalement.
Détection passive – « Ils se sont convertis dans la radicalité, pas dans l’islam », nuance-t-on au CIPD, où l’on se dit « surpris » par le profil des intéressés, citant le cas d’un « fils de militaire de haut rang ».
Au comité interministériel, on explique aussi que la « dimension préventive n’existait pas en France » contrairement à d’autres voisins d’Europe comme le Danemark. « Nous sommes dans la détection passive », précise aujourd’hui Pierre N’Gahane, « faire en sorte que les gens viennent à nous ».
Pour cela, un psychologue et six réservistes (retraités) de la police, spécialistes de l’antiterrorisme, se relaient au numéro vert. Ils trient, sur une échelle de quatre, les cas avec des indicateurs précis: un tel ne mange plus (cas 2), est en détresse amoureuse (cas 1). Ou en rupture familiale (cas 4) « et il faut agir vite », dit-on au CIPD, « c’est là où nous avons le plus de mal ».
Dérives sectaires – « Les entretiens durent une heure, les gens qui nous appellent tombent du placard », soutient-on de même source. Les candidats au jihad, « si on leur racontait l’histoire du sunnisme, ils ne comprendraient rien. C’est un peu comme une secte, il sont manipulés et les jeux vidéo genre ‘call of duty’ entrent pour une part dans leur basculement ».
Pour les cas non transmis aux services spécialisés, il existe des « cellules de suivi » à l’échelon départemental « pour les sortir de la radicalité » et les « raccompagner socialement ». Vingt-sept préfectures ont ainsi une « structure active » comprenant préfet, procureur, éducateurs, psychologues voire responsables de lieux de culte.
Formation – Parallèlement, des modules de formation sont organisés pour les personnels concernés: 450 jusqu’à présent qui ont été sensibilisés aux filières jihadistes, au cadre juridique ou aux dérives sectaires.
« Nous sommes sur un principe de volontariat, beaucoup sont victimes », dit encore Pierre N’Gahane. « Nous avons des exemples de réussite », ajoute-t-il évoquant une trentaine de cas où « on les amène à se reconstruire ».
Maintenant, « il faut affiner le dispositif et le cadrer scientifiquement », résume le préfet N’Gahane pour qui les candidats jihadistes « n’ont rien à voir avec ceux qui partaient pour l’Afghanistan ».
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source : Publié le 05/11/2014 • Par avec l’AFP • dans : Actu prévention sécurité
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