WASHINGTON, 5 déc 2007 (AFP) – Le mormon Mitt Romney, menacé par le pasteur
baptiste Mike Huckabee dans la course à l’investiture républicaine pour la
présidentielle américaine, va tenter jeudi de dissiper les réticences que
suscite sa foi chez les évangéliques, pilier de son électorat potentiel.
M. Romney “comprend que la foi est une question importante pour de nombreux
Américains”, a expliqué dimanche son porte-parole Kevin Madden, et il entend
“faire connaître sa position sur la liberté religieuse, la grande tradition de
tolérance religieuse dans la formation de notre pays, et la façon dont sa foi
éclairerait sa façon de gouverner”.
La tâche s’annonce difficile: un récent sondage de l’institut de recherches
Pew révèle que quand il s’agit de religion, il n’y a pas de plus grand péché
pour les Américains que d’être athée (un handicap pour 61% des électeurs),
musulman (45%) ou mormon (25%).
Et l’appartenance de M. Romney à “L’Eglise de Jésus-Christ des saints des
derniers jours” pose particulièrement problème aux évangéliques républicains
blancs, un pilier de la base républicaine depuis 1980, qui à 36% se disent
réticents à voter pour un mormon.
La séance d’explications de M. Romney sur sa religion, prévue dans une
université texane, évoque immanquablement l’exercice auquel avait dû se livrer
John Kennedy en 1960 pour convaincre la majorité protestante du pays qu’elle
n’avait rien à craindre d’un catholique.
Mais comme le souligne Luis Lugo, directeur du Forum Pew sur la religion et
la vie publique, s’il veut convaincre les évangéliques son discours devra être à
l’opposé de celui qu’avait tenu Kennedy: “pour la plupart des conservateurs
pieux, la ligne Kennedy sur la séparation complète de sa religion et de son
action publique les hérisse”.
“Il faut qu’il dise: ‘je suis quelqu’un de religieux, de tout évidence nous
avons des différends religieux, mais sur les questions morales fondamentales, ma
religion me pousse dans le même sens que vous, les évangéliques, qu’il s’agisse
de l’avortement, du mariage des homosexuels, du rôle de la religion etc'”,
estime M. Lugo.
Pour Dennis Goldford, professeur de sciences politiques à l’Université Drake
(Iowa), M. Romney se voit contraint d’aborder la question de sa religion “parce
qu’il s’est lui même mis dans le pétrin”: largement distancé dans les sondages
au niveau national, il a tout misé sur des victoires dans les premiers Etats à
participer au processus des primaires, en investissant massivement, en temps et
en argent, dans l’Iowa et le New Hampshire.
Or l’Iowa (centre), premier Etat à se prononcer le 3 janvier, est un fief
des chrétiens évangéliques, précisément la frange de l’électorat républicain
probablement la plus difficile à séduire pour lui.
Des sondages publiés par un quotidien de l’Iowa entre mai et novembre
montrent qu’en six mois M. Romney, ex-gouverneur du Massachusetts, a perdu la
considérable avance dont il bénéficiait, n’étant plus crédité que de 24% des
intentions de vote (30% en mai), contre 29% à l’ex-gouverneur de l’Arkansas Mike
Huckabee (4% en mai).
En revanche, un nouveau sondage Washington Post/ABC publié mercredi montre
qu’il se démarque dans le New Hampshire (nord-est), où il recueillerait 37% des
votes républicains lors de la primaire prévue le 8 janvier.
Pour Costas Panagopoulos, de l’Université Fordham à New York, la religion
est cependant loin d’être le seul problème pour Mitt Romney, un ancien homme
d’affaires qui peine à concurrencer l’ex-maire de New York Rudolph Giuliani.
“Romney essaie de se raccrocher aux branches, mais les difficultés sont
telles que ce n’est pas un discours qui lui permettra de les surmonter”,
juge-t-il.
col-chr/cel/chv

AFP051353 DEC 07