CE DONT ON VA PARLER :

Mon médecin traitant me propose une thérapie à base d’ayurvédique afin de soigner un trouble nerveux détecté dans l’étude de ma pupille. Est-ce normal ?

Un guérisseur m’a affirmé pouvoir soigner mon cancer à condition que j’arrête la chimiothérapie pour réorganiser mon alimentation que sur du cru. Est-ce une pratique illégale de la médecine ?

Un psycho-patricien quantique me dit pouvoir m’aider à me souvenir d’un trauma de mon enfance ?

SOURCES :

Arrêté du 6 janvier 1962 fixant liste des actes médicaux ne pouvant être pratiqués que par des médecins ou pouvant être pratiqués également par des auxiliaires médicaux ou par des directeurs de laboratoires d’analyses médicales non-médecins

Décret n° 2002-194 du 11 février 2002 relatif aux actes professionnels et à l’exercice de la profession d’infirmier.

Décret n° 2010-534 du 20 mai 2010 relatif à l’usage du titre de psychothérapeute Loi n° 2004-806 du 9 août 2004 relative à la politique de santé publique (1)
L 4161-1 et suivants du code de la santé publique.
R. 4127-39 du code de la santé publique

SYNTHESE : Naturopathe, iridologie, magnétiseur, guérisseur ayurvédique et autres professions du domaine de la santé pullulent autour de centres de bien-être physique et spirituel. Défenseur d’une approche holistique de la santé et du corps humain, ils proposent de soigner et même tout simplement de guérir tout type de maladie par des procédés qui n’ont jamais été validés par la science. Ces charlatanismes peuvent faire l’objet de sanction de manière différentiées s’il s’agit des actions d’un professionnel de la santé (I) ou non (II).

I. LA PRATIQUE DEVIANTE DE LA MEDECINE

Certains médecins sont sortis des carcans des pratiques admises de la médecine pour pratique des méthodes douces voire charlatanesque et peuvent conséquence se faire sanctionner par le conseil de l’ordre des médecins (a), il en va de même pour les médicaments (b).

a. L’absence de protection du titre de « docteur » et la notion de « Médecine »

Un docteur en histoire peut légalement se dire « docteur pratiquant la médecine tantrique quantique et vibratoire ». En effet, le titre de docteur n’est pas protégé et tout détenteur de doctorat peut faire état d’un tel titre même s’il n’a aucun lien avec la santé. Le terme de « médecine » n’est pas non plus limité. On peut donc légalement parler de «médecine douce», «médecine chinoise», «médecine anthroposophique ». Il convient donc d’être bien attentif à ce que les différents termes recouvrent dans la pratique et de l’inscription d’un praticien dans un ordre médical. Le considérable essor du marché de la santé pousse des entrepreneurs peuvent scrupuleux à créer leur propre procéder charlatanesques et à pouvoir les nommer sans difficultés « médecine ».

De manière générale, l’invention de nouvelle terminologie n’est pas interdite. Il donc possible de décliner de manière infinie des nouvelles thérapies qui peuvent même faire l’objet d’une protection sur la base du droit des marques. Seulement dans de rares cas de figure, une utilisation peut être interdite : par exemple le terme de «médicament» engendre une série d’interdiction. Toutefois la plasticité sémantique ouvre de nombreuses possibilités commerciales.

De manière générale les Pratiques de Soins Non Conventionnelles échappent pour le moment à un cadre réglementaire hormis la pratique illégale de la médecine et les règles du code de la consommation.

b. Les pratiques déviantes et les ordres professionnels

De nombreuses pratiques déviantes trouvent des praticiens dans les forces médicales. Les professionnels de santé sont rattachés à des ordres professionnels et doivent suivre une déontologie stricte. En cas de pratiques déviantes les ordres médicaux peuvent entamer des procédures disciplinaires. Or le code la santé publique interdit pour un médecin de faire des allégations de soins sans fondement et ainsi interdit aux médecins de proposer « à des malades des remèdes illusoires ou in- suffisamment éprouvés en les présentant comme salutaires ou sans danger ». Une telle pratique peut avoir pour conséquence une mesure disciplinaire contre le médecin et peut aussi tomber dans le cadre du délit de mise en danger volontaire.

La surveillance des praticiens de santés relève aussi du pouvoir des Agences Régionales de Santés (ARS). Ainsi, les directeurs des Agences Régionales de Santé ont un pouvoir de sanctions et notamment peuvent faire fermer des centres médicaux (Article L 4113-34 du code de la santé publique) en urgence pour une période de 5 mois.

Une autre problématique majeure est celle de l’entrisme qui définit la tendance des groupes à tendances sectaires à établir des relations privilégiées avec des hôpitaux ou des ordres professionnels afin de placer leurs thérapies ou leur concept thérapeutique. Il y a ainsi en France des DU de médecine anthroposophique dont le contenu repose uniquement sur les intuitions de Rudolph Steiner lors de ses voyages astraux. La pratique de l’entrisme, ou la volonté de placer, des adeptes dans des centres de décisions est un aspect important de l’action légitimatrice des mouvements sectaires pour imposer leurs théories ésotériques sous les guises de la science.

Face à cette marge de manœuvre, le droit pénal connait un certain nombre d’infraction en raison de pratique prescriptive en santé.

II. LA PRATIQUE ILLEGALE ET L’USURPATION DE TITRE

Malgré une certaine libéralité, le code pénal et le code de la santé publique réprime plusieurs pratiques illégales : celles de la médecine mais aussi de la pharmacie. Par ailleurs, elle protège des titres. Il fait Deux notions sont à distinguer : l’usurpation de titres (a) et la pratique médicale (b).

a. L’usurpation de titre

L’usurpation de titre doit être nettement distingué de la pratique illicite. Seulement le titre est protégé, c’est-à-dire de pouvoir se dire «psychothérapeute», « pharmacien », « médecin ». Il est donc possible de faire montre de dérivé : « psychopraticien », « herboriste ». Le terme protégé ne renvoie pas nécessairement à une pratique définie et protégée avec le titre. Il s’agit seulement d’offrir au consommateur un moyen de s’assurer de la réalité d’un praticien.

Toutefois cette protection est relativement faible, notamment quand on prend la pratique de la psychothérapie, la multiplication des titres non réglementés et l’absence de moyen de vérification publique de l’inscription d’un thérapeute au registre des psychothérapeutes entraine une vraie limitation à la protection du titre.

La loi dite Accoyer de 2004 a protégé le titre de psychothérapeute en créant un registre des psychothérapeutes tenu par les ARS et notamment fixant les conditions d’exercice du titre qui fixent des exigences d’étude et de stages professionnels.

b. L’acte médical par un non-praticien

Si le charlatanisme est prévu explicitement pour le médecin, il n’existe pas d’incrimination autonome de charlatanisme en droit pénal français. Toutefois, il est possible d’agir pour pratique illégale de la médecine.
La pratique médicale de la médecine est définie par le code de la sante publique (L 4161-1) comme commise par « toute personne qui prend part habituellement ou par direction suivie, même en présence d’un médecin, à l’établissement d’un diagnostic ou au traitement de maladies, congénitales ou acquises, réelles ou supposées, par actes personnels, consultations verbales ou écrites ou par tous autres procédés quels qu’ils soient, ou pratique l’un des actes professionnels prévus dans une nomenclature fixée par arrêté du ministre chargé de la santé pris après avis de l’Académie nationale de médecine, sans être titulaire d’un diplôme, certificat ou autre titre mentionné ».

L’exercice illégale suppose donc une répétition et la réalisation d’un diagnostic. Elle peut résulter aussi de la pratique d’acte réservé aux médecins par l’arrêté 1962 qui fixe la liste des actes médicaux qui sont de la seule compétence de médecin. Certaine pratique ont fait l’objet d’une interdiction aux titres de la pratique illégale de la médecine comme notamment l’acupuncture (Cour de Cassation Chambre Criminelle — 28 juin 2016 – pourvoi n°15-83587) en raison de la pose d’un diagnostic et de son caractère invasif. Il y a donc tout une série de pratiques peuvent entrer dans le champ de la pratique illégale de la médecine. La naturopathie, qui fait parler d’elle en raison de la présence de nombreux praticiens inscrits sur Doctolib qui préconisaient à la suite d’Irène Grosjean de pratiquer des attouchements sexuels chez des enfants pour les soigner de leurs rhumes peuvent tomber sous le coup d’une telle interdiction. Par ailleurs la pratique illégale de la profession de chirurgien-dentiste (L 4161-2 CSP) de sage-femme (article L 4161-3 du CSP).

Une seconde pratique illégale est celle de la profession de de pharmacien (4223-1) ou de préparateur en pharmacie (4243-1 du CSP). Pour comprendre ce que recouvre cette interdiction il faut se poser la question de la consistance du monopole de pharmacien L 4211-1 du CSP qui réserve aux seuls pharmaciens la vente de médicament définit à L 5111-1 du CSP et la directive 2011/83 du 6 novembre 2022. L’ordre de pharmacien disposent de pouvoir d’enquête notamment par les pharmaciens inspecteurs qui peuvent réaliser des enquêtes et visiter des locaux à usage professionnel. Il convient de voir que la notion de médicament est large car elle recouvre « toute substance ou composition présentée comme possédant des propriété curatives ou préventives à l’égard des maladies humaine ou animales ». Les produits de diététiques peuvent aussi être des médicaments si des éléments chimiques sont ajoutés confèrent au produit des propriétés diététiques ».

Conclusion :

La réglementation des actes de soin non conventionné, autres termes pour les différentes pratiques paramédicales est un chantier en cours d’élaboration face au constant criant de dispositifs juridiques insuffisants. Il s’agit d’un des axes de travail qui est ressorti des travaux des assises des dérives sectaires tenues à Paris le 9 et 10 mars 2023 sous la direction de la Secrétaire d’État à la citoyenneté.

Infos pratiques :

Un point de vigilance dans le domaine de la dérive sectaire est la question des faux souvenirs induits. La pratique de la psychothérapie sauvage est souvent basée sur la théorie dite des « blessures » qui peut entraîner la création de faux souvenirs dits induits, car résultant de toute pièce de la pratique thérapeutique. Les théories des blessures présupposent qu’une personne doit normalement aller bien (la nature est bonne et l’homme participant de la nature doit aller bien) ; en cas de souffrance, elle ne peut trouver sa cause que dans l’actions néfastes d’un tiers dans l’enfance. Si on a pu trouver cette théorie du trauma infantile dans la psychanalyse, Freud lui- même l’a abandonnée et elle ne se retrouve pas dans la théorie psychologique clinique. La recherche scientifique montre qu’un pseudo-thérapeute, qui par des outils de thérapie mal-maîtrisés, peut amener une personne, et même sans le vouloir, à l’amener à croire se souvenir d’un abus qui n’est en réalité qu’une illusion de l’esprit. La pratique judiciaire montre que de nombreux cas de plaintes pénales pour incestes ont en réalité été provoquées par ce type de faux souvenirs induits.

En présence de faux souvenirs induits, il convient de vérifier la qualité du psychothérapeute et obtenir des précisions sur les méthodes utilisées. Un expert formé peut réussir à les détecter car ils présentent des caractéristiques particulières.