CE DONT ON VA PARLER :

Peut-on demander le retrait d’une vidéo dans laquelle j’apparais à visage découvert pour promouvoir un groupe sectaire ?
Que faire si une organisation conserve mes données personnelles alors que j’ai quitté le groupe depuis plusieurs années ?

SOURCES :

– Code civil, articles 7 à 16-14
– Code pénal, articles 226-1 à 226-7
– Règlement général sur la protection des données (RGPD) – CEDH, aff. Témoins de Jéhovah c. Finlande

SYNTHESE :

Quitter un groupement sectaire ne met pas toujours fin à l’exploitation subie. Même après le départ, l’image et les données personnelles des anciens membres peuvent être utilisées sans leur consentement, pour promouvoir le groupe ou maintenir un lien d’emprise indirecte. Ces atteintes prolongées à la vie privée constituent des violations graves de droits fondamentaux. Le droit français et européen offre cependant des outils concrets pour reprendre le contrôle de son image (I) et pour exiger la suppression de ses données personnelles conservées abusivement (II).

I. RECUPERER SON IMAGE

Faire témoigner l’adhérent des biens faits, voir dans le cas de vente pyramidale ou de folle thérapie, attester des biens faits, est une technique marketing classique. Celui qui sort du groupement voudra récupérer son image et interdire au groupe sectaire son exploitation. Quels sont les contours du droit à l’image (a) et comment la mettre en œuvre (b).

a. Les contours du droit à l’image et à l’histoire de vie

Si la demande de récupérer son image par une victime peut parait modeste par rapport à l’ampleur des abus, en réalité il n’en est rien. Il s’agit d’un moment essentiel dans la reconstruction psychologique de réclamer ce qui est à soi. Faire parler l’adepte est aussi un moyen de le déposséder de sa réalité propre. Il convient donc de prendre cette demande de manière sérieuse.

Le droit à l’image regroupe toutes les utilisations visuelles ou sonores de la personne permettant son identification. Il est une composante du droit au respect de la vie privée, protégée à la fois par le Code civil et le Code pénal. Son exploitation sans autorisation est sanctionnée, et la personne peut demander le retrait immédiat de son image de tout support de communication, y compris en ligne.

b. Sa mise en œuvre

En pratique, il convient de contacter directement le support de diffusion (site, réseau social, imprimeur, hébergeur) et d’exiger la suppression de l’image ou du témoignage utilisé sans consentement valable. Si le groupe refuse ou fait obstacle, une action judiciaire peut être engagée. Cette action peut être civile (pour atteinte à la vie privée) ou pénale (article 226-1 du Code pénal pour captation ou diffusion sans accord).

II. RECUPERER SES DONNEES PERSONNELLES

Parmi les éléments propres aux groupements sectaires est le contrôle social de ses membres. Un régime d’autorisation et de confession vient limiter les possibilités des membres et les inscrit dans une dépendance à l’organisation. Dans les groupes internationaux qui organisent des tests ou qui assurent une coordination mondiale, les fichiers comportant les informations personnelles des membres sont tenus. Il s’agit de données personnelles qu’il est possible de demander.

a. Le contexte de l’acquisition des données personnelles

L’emprise mentale passe par la collecte de données sensibles : croyances, pratiques, antécédents médicaux, familiaux… Ces données sont souvent utilisées à des fins de contrôle psychologique. Certains groupes tiennent des fichiers centralisés avec des informations exploitables par l’encadrement, parfois même à l’insu de l’adhérent. La CEDH a reconnu que même dans un cadre religieux, le traitement de données devait être encadré.

b. Les actions en cas de refus d’accès aux données personnelles

En application du RGPD, toute personne a un droit d’accès, de rectification, d’effacement et d’opposition. Il convient d’adresser une demande écrite au responsable de traitement du groupement. En cas de refus ou d’absence de réponse sous un mois, une réclamation peut être adressée à la CNIL (Commission nationale de l’informatique et des libertés), qui pourra sanctionner le groupe et ordonner la suppression des données. En parallèle, une action en justice est également possible pour obtenir la suppression ou l’indemnisation du préjudice subi.

Conclusion :

Reprendre le contrôle de son image et de ses données personnelles est une étape centrale de la reconstruction de la victime. Ces droits, protégés par la loi, sont opposables aux groupements, même lorsqu’ils revendiquent une couverture religieuse. Ils permettent de mettre un terme à une exposition non consentie et à un fichage abusif.

Infos pratiques :

– Site de la CNIL : https://www.cnil.fr
– Modèles de lettres pour exercer vos droits sur vos données : https://www.cnil.fr/fr/modeles/courriers
– En cas d’urgence ou d’atteinte grave à la vie privée, il est possible de saisir le juge en référé.