Rue Frontenac

Écrit par Fabrice de Pierrebourg

Lundi, 25 mai 2009

La Scientologie, qui se retrouve dans le box des accusés depuis ce matin à Paris pour «escroquerie en bande organisée», risque jusqu’à la dissolution dans ce pays où elle est déjà considérée comme une secte.

C’est un procès retentissant qui s’est ouvert ce lundi au Tribunal correctionnel de Paris. Six membres de la Scientologie, ainsi que l’Association spirituelle de l’Église de scientologie et sa librairie (SEL), y sont poursuivis pour «escroquerie en bande organisée» et, pour certains d’entre eux, aussi d’«exercice illégal de la pharmacie». Rien de moins.

S’ils sont déclarés coupables au terme de ce procès marathon qui va s’étaler sur plus de trois semaines, ils risquent jusqu’à dix ans de prison, des amendes pouvant atteindre le million d’euros et une interdiction des activités de l’organisation.

«Il y a un réflexe d’intolérance assez fort en France, déplore en entrevue à RueFrontenac.com Jean Larivière, porte-parole de la branche montréalaise. On nous traite de façon méchante et irrespectueuse.»

L’affaire réjouit au contraire les membres d’Anonymous. Cette «nébuleuse» apparue il y a moins de deux ans sur le web et rassemblant entre autres des hackers, livre une guerre sans merci à la Scientologie partout dans le monde et sur la toile.

Une fois par mois au moins, ils manifestent, avec un masque qui est devenu leur image de marque, devant les locaux montréalais de la Scientologie.

«Ce qui se passe à Paris est fantastique. C’est très rare que les appareils judiciaires osent s’attaquer à cette organisation», jubile Jean Grégoire, un anonymous montréalais.

Mais qu’est-ce que la Scientologie, cette création de l’auteur de science-fiction américain Ron Hubbard?

«Son but est d’aider l’homme dans sa quête de liberté spirituelle en lui donnant les moyens de se libérer des entraves qui font obstacle à cette quête», lit-on sur le site internet de l’«Église de Scientologie de Québec».

Mais si l’on en croit les enquêteurs et la justice française, c’étaient plutôt les adeptes qui devaient disposer de moyens financiers suffisants pour se «libérer de leurs entraves».

Des ex-membres ruinés

Toute cette affaire a débuté à la suite de plaintes déposées par plusieurs ex-adeptes de ce qui est considéré comme une secte dans ce pays. Au moins deux plaignants se seraient désistés depuis, probablement à la suite de pressions et d’arrangements d’ordre financier apprend-on dans un article publié dans le quotidien Libération.

Mais deux femmes ont décidé de poursuivre leur combat jusqu’au bout. La première aurait ainsi été pratiquement ruinée après avoir été sollicitée dans la rue en 1998 par un adepte afin de passer un test de personnalité.

En quelques semaines seulement, la victime qui se trouvait alors dans un état de fragilité psychologique, a ainsi dépensé 21000 euros en séminaires de Dianétique, livres, cours de «réparation de vie» et autres, vitamines sans oublier le fameux «électromètre» à presque 5000 euros.

Non seulement toutes ses économies y ont été englouties, mais un des accusés aurait aussi fortement incité cette pauvre femme de ménage d’hôtel à emprunter de l’argent.

Ce n’est pas la première fois que la Scientologie a des démêlés avec la justice en France, que ce soit pour escroquerie et même homicide involontaire après le suicide d’un jeune adepte à Lyon en 1988. La victime, Patrick Vic, qui faisait l’objet de pressions de la part de l’organisme afin qu’elle emprunte près de 4500 euros pour une «cure de purification» avait préféré se jeter du 12e étage devant les yeux horrifiés de sa femme.

{{Officielle au Canada}}

Un ancien responsable français de la Scientologie, qui s’est confié au Figaro, estime que l’organisme ne compterait pas plus de 60000 membres vraiment actifs dans le monde et non 12 millions d’adeptes.
En Allemagne, la Scientologie a été déclarée inconstitutionnelle en décembre 2007 et fait aussi l’objet d’une étroite surveillance de la part des services de renseignement intérieurs.

Mais au Canada, elle a pignon sur rue et a le statut de corporation religieuse au Québec depuis 1993.

«Ce qui est dommage, explique Jean Grégoire, du collectif Anonymous, c’est qu’au Québec la Scientologie fonctionne de la même façon qu’en France où elle est poursuivie pour escroquerie. Pendant ce temps-là, ici, on fait preuve de laxisme, on laisse faire. Or, leur seul but est de vous faire dépenser le plus de fric possible et de recruter des membres.»

L’anonymous prévient que l’organisation fonctionne aussi «derrière le paravent de plusieurs organisations comme Narconon».

«Ils ne savent rien de ce qui se passe chez nous, fulmine Jean Larivière. C’est de l’intolérance crasse.»

Des vedettes pour l’image

La Scientologie compte aussi dans ses rangs plusieurs vedettes qui se plaisent à revendiquer haut et fort leur adhésion aux thèses développées par l’écrivain de science-fiction Ron Hubbard. Les plus connus sont Tom Cruise et John Travolta. Au Québec, la chanteuse France d’Amour est la seule à avoir avoué son appartenance à la Scientologie. Une sortie du placard qui a dû combler de plaisir l’Église. «C’est sa décision», mentionne simplement Jean Larivière.

À lire aussi :

Sur RueFrontenac.com: «Ça n’empêchera pas la Scientologie de progresser au Québec»

Sur Nouvelobs.com: Une bande d’escrocs, les Scientologues ?

À consulter : le site de Anomymous Montréal

http://www.ruefrontenac.com/nouvelles-generales/55-enjeux/5825-scientologie?tmpl=component&print=1&page=