L’affaire Baby Loup a connu un nouveau revirement juridique, mercredi 27 novembre. La cour d’appel de Paris a confirmé le licenciement, pour « faute grave », d’une salariée voilée de cette crèche privée située à Chanteloup-les-Vignes (Yvelines) alors que la Cour de cassation avait annulé le jugement en octobre.

Tout commence en 2008. Fatima Afif, salariée de la crèche, est licenciée en raison de son souhait de porter le voile sur son lieu de travail. Un refus justifié à l’époque par la directrice au nom de la « neutralité philosophique, politique et confessionnelle », inscrite au règlement intérieur de l’établissement. L’ex-employée décide de contester cette décision en justice. L’affaire devient alors emblématique du débat sur la laïcité en France.
Elle est d’abord déboutée par le conseil des prud’hommes de Mantes-la-Jolie en novembre 2010, puis par la cour d’appel de Versailles en octobre 2011. Mais, le 19 mars 2013, contre toute attente, la chambre sociale de la Cour de cassation lui donne finalement raison à l’issue d’un vif débat : elle annule la décision de l’entreprise, estimant que ce licenciement constitue « une discrimination en raison des convictions religieuses » de l’ex-salariée.

L’affaire n’en reste pourtant pas là. Car le 17 octobre, fait rare, le premier président de la cour d’appel de Paris décide de rendre « un arrêt de rébellion » contre l’arrêt de la Cour de cassation. Le code de l’organisation judiciaire permet en effet qu' »après cassation d’un arrêt en matière civile, le premier président, d’office ou à la demande des parties, renvoie l’affaire à l’audience solennelle si la nature ou la complexité de celle-ci le justifie ».

Sur l’arrêt de rébellion, lire : Crèche Baby Loup : la bataille judiciaire sur le voile continue

NOUVEAU RECOURS PROBABLE EN CASSATION

Lors de la nouvelle audience en appel, le procureur général de la cour avait argué que si « la liberté religieuse est un principe fondamental », « les missions d’éveil et du développement de l’enfant (…) sont de nature à justifier des restrictions ».L’atteinte à cette liberté, matérialisée par le règlement intérieur de la crèche, était, selon lui, contrebalancée par « un impératif d’intérêt général » et dès lors, cette atteinte était « proportionnée ». Il avait donc préconisé la confirmation du licenciement, demandant à la cour de « résister » à la Cour de cassation.

Avant même la nouvelle décision de mardi, l’avocat de la salariée avait annoncé qu’elle « ne renoncerait pas », expliquant que sa cliente formerait « probablement » un nouveau pourvoi, qui serait cette fois examiné par la Cour de cassation en formation plénière. « J’irai jusqu’à la Cour européenne [des droits de l’homme] s’il le faut », a déclaré Fatima Afif au Nouvel Observateur, affirmant n’être « le porte-étendard d’aucune cause, [et] demande[r] seulement la justice ».

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La CEDH saisie sur le voile intégral

La Cour européenne des droits de l’homme (CEDH), examine, mercredi, la requête d’une femme portant le niqab, qui conteste l’interdiction française stipulant que « nul ne peut, dans l’espace public, porter une tenue destinée à dissimuler son visage ». La loi, votée fin 2010, prévoit pour les contrevenants une amende maximale de 150 euros et/ou un stage de citoyenneté. La jeune femme considère que ce texte viole ses droits fondamentaux. Sa requête a été déposée à la Cour européenne le jour même de l’entrée en vigueur du texte, le 11 avril 2011.

Dans une lettre adressée à la CEDH, un collectif d’associations laïques et féministes l’a exhortée à maintenir l’interdiction, estimant qu’il s’agit d’une question de dignité humaine et que le port du voile dans l’espace public est « totalement incompatible avec la notion même d’égalité ».

SOURCE / Le Monde.fr avec AFP | 27.11.2013 à 08h41 • Mis à jour le 27.11.2013 à 10h22

http://www.lemonde.fr/europe/article/2013/11/27/decision-attendue-dans-l-affaire-de-la-creche-baby-loup_3520827_3214.html