La dernière édition de Time Magazine, dont la couverture est consacrée au moine bouddhiste Ashin Wirathu avec pour titre « le visage de la terreur bouddhiste » (« The Face of Buddhist Terror ») n’a pas été très appréciée par le vice ministre de l’Information et porte parole de la présidence, Ye Htut, qui l’a aussitôt interdite de diffusion.

Pour la plus grande partie du monde, le bouddhisme est synonyme de non-violence et de bonté, les concepts enseignés par Siddhartha Gautama, le Bouddha, il y a 2500 ans. Jusqu’à présent le bouddhisme a su largement se tenir à l’écart des prises de positions radicales et des violences qui secouent périodiquement les groupes extrémistes religieux chez les nationalistes hindous, musulmans islamistes, chrétiens fondamentalistes, ou juifs ultra-orthodoxes. Mais comme les adeptes des autres religions, les bouddhistes ne sont pas à l’abri de l’intolérance ou du chauvinisme sectaire comme en Birmanie.

Extrémisme politique en Birmanie et chronique mondaine en Thaïlande
Dernièrement, les propos radicaux du moine bouddhiste Ashin Wirathu, qui figure en couverture du dernier numéro de Time magazine, ont fait l’objet d’une attention accrue des médias, dans le contexte des récents affrontements religieux qui ont émaillé le pays. Faisant référence aux musulmans vivant dans le pays, le moine a récemment déclaré :

« On peut être emplis d’amour et de gentillesse mais on ne peut pas dormir à coté d’un chien enragé »

Le 26 juin 2013, le vice ministre de l’Information et porte parole de la présidence, Ye Htut, a annoncé l’interdiction de parution de Time Magazine sur les réseaux sociaux. Un communiqué de presse du bureau de la présidence a par la suite été relayé par la télévision publique.

La dernière édition de Time Magazine, dont la couverture est consacrée au moine bouddhiste Ashin Wirathu

Le message posté par Ye Htut sur Facebook indique notamment qu’il « est interdit de produire, vendre et/ou distribuer la version originale ou une photocopie de l’article intitulé ’Le visage de la terreur bouddhiste’ paru dans le numéro du 1er juillet de Time Magazine, afin d’éviter de nouveaux conflits raciaux et religieux ».

« La décision des autorités d’interdire la vente de Time Magazine sous toutes ses formes nous inquiète au plus haut point. Alors que la loi sur les médias est toujours en cours d’élaboration, elle traduit un état d’esprit contraire aux principes fondamentaux qui devraient gouverner les réformes du cadre légal de la presse » a déclaré Reporters sans frontières.

La rhétorique haineuse du « Ben Laden Birman »
Ce n’est pas sans raison que le moine bouddhiste Ashin Wirathu se fait appeler « le Ben Laden Birman ». Ses messages ont une particularité singulière : ils sont remplis de haine envers la communauté musulmane du pays majoritairement bouddhiste. « L’heure n’est pas au calme, » a-t-il déclaré lors de son dernier discours.

« Il est temps de se lever, de faire bouillir votre sang ». Le moine radical décrit les musulmans, qui représentent environ 5% des quelques 60 millions d’habitants de la Birmanie, comme une menace pour le pays et sa culture.

« Ils volent nos femmes pour les violer. Ils aimeraient occuper notre pays, mais je ne vais pas les laisser faire. Nous devons à tout prix protéger notre pays ».

Plutôt charismatique, il attire des centaines de fidèles lors de ses sermons. Depuis l’année dernière, des foules bouddhistes ont pris pour cible des membres de la minorité religieuse au nom de la rhétorique incendiaire de Wirathu et plusieurs autres moines n’hésitent pas à attiser les flammes de ce chauvinisme religieux. Les plus touchés par cette poussée de violence sont les Rohingyas, un groupe musulman dans l’extrême ouest de la Birmanie. Mais l’effusion de sang se propage jusqu’à la Birmanie centrale, où vit et prêche quotidiennement le « Ben Laden Birman ».

En Thaïlande, les marchands sont dans le temple
Environ 95% de la population thaïlandaise est constituée de bouddhistes pratiquants. La religion est omniprésente dans le pays et régie par tout un ensemble de règles et de rites. Le Bouddha n’a plus aucun désir, aucun besoin matériel. Il renonce à tout donc aux souffrances ainsi qu’aux mauvaises pensées. Tout le monde s’y retrouve et se recueille quotidiennement, à domicile ou à l’intérieur des multiples temples dont la Thaïlande regorge. Seulement voilà, tout ne va pas bien dans le meilleur des mondes. Et depuis quelques années, une polémique fait rage au cœur du pays : celle des moines bouddhistes corrompus.

Ils sont plusieurs à défrayer la chronique mondaine dans des circonstances parfois assez peu monastiques. Aperçus à bord de jet privés ou arborant des accessoires de luxe, certains moines ne se privent d’aucun plaisir, allant jusqu’à déshonorer la religion et l’image qu’ils portent. Entre le business, le sexe, l’alcool et l’argent, ils ont fait leurs choix. Devenus de véritables professionnels de l’arnaque, ils n’hésitent pas à se faire monnayer des services, remèdes ou autre porte-bonheur et contribuent, jour après jour, aux dérives de la religion.

La semaine dernière, trois moines ont été filmés à bord d’un jet privé, arborant lunettes de soleil et sacs de luxe, tandis qu’ils se faisaient raccompagner à leur monastère par un fidèle plutôt aisé. L’année dernière, ce sont de jeunes moines bouddhistes de Corée du Sud qui ont fait parler d’eux suite à la révélation de leurs pratiques illégales et contraires aux fondements même de la religion. Ils avaient été filmés en train de miser des milliers de dollars au poker, cigarettes en bouche, verres en main. L’incident avait provoqué la démission de six membres du comité de la plus grande obédience bouddhiste de Corée du Sud.

Ces attitudes peu monastiques font rage en Asie et ne sont malheureusement pas isolées. De plus en plus de moines adoptent des modes de vie peu appropriés quant à l’image qu’ils sont censés représenter. Tant et si bien qu’en Chine, des imposteurs se parent de leurs costumes afin de commettre des mauvaises actions. Leurs arnaques sont très courantes et la plupart vont même jusqu’à faire l’aumône. Selon les médias chinois, ces escrocs peuvent toucher jusqu’à 2500 euros par an ce qui représente plus du double du revenu moyen d’un ouvrier chinois.

source : Publié par : Virginie Sainsily 27 juin 2013 dans Bouddhisme

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