Le tribunal de Bordeaux doit décider s’il accorde à une jeune femme des dommages et intérêts en réparation de viols que lui aurait fait subir son père dans l’enfance, ou s’il s’agit de « faux souvenir induits » comme l’a soutenu mercredi la défense.

Le tribunal civil, saisi par la plaignante pour préjudice car les délais de prescription étaient incompatibles avec une action au pénal, se prononcera le 12 juin.

S. aujourd’hui âgée de 38 ans, se plaint d’avoir été violée par son père de 10 à 13 ans.

Les experts qui l’avaient examinée dans le cadre de sa plainte déposée en 2007 ne l’ont pas jugée affabulatrice, et n’ont décelé chez elle aucun trouble psycho-pathologique, a relevé mercredi son avocate Me Patricia Gravellier.

Me Daniel Picotin, qui représente le père, n’a pas mis en doute la sincérité de S. Mais pour lui, elle est victime de « faux souvenirs induits » (FSI), que lui aurait mis en tête une thérapeute bordelaise aujourd’hui en retraite, qui, pour se conformer au décret de 2010 sur ces métiers, se présentait ces dernières années comme « coach en développement personnel ».

Me Picotin, spécialiste national des affaires de manipulation mentale — il représente une partie des victimes dans l’affaire des reclus de Monflanquin — , a observé que « cela fait dix ans qu’on a vu arriver en France ce raz-de-marée terrible des faux souvenirs induits, après les Etats-Unis où ils ont causé un massacre judiciaire ».

Il a dénoncé « les thérapeutes de pacotille, les escrocs qui se permettent de recevoir des personnes en mal-être et de manipuler leur mémoire ». Il a produit aussi les cartes d’anniversaire affectueuses écrites par la fille au père, et des photos du mariage de la jeune femme où elle semble très proche de lui.

Une expertise réalisée pour la défense par un expert judiciaire, la psychologue Isabelle Laurent-Labadie, met en doute une telle amnésie prolongée de S. si elle a été violée aux âges qu’elle avance, et s’étonne dans ce cas du maintien de rapports proches avec son père.

« Il ne faut pas voir dans tous les dossiers des manipulations mentales et des FSI » a remarqué Me Gravellier, arguant que le mari et un frère de S. ont témoigné qu’elle leur avait parlé de tels viols plusieurs années avant de consulter sa « coach ». Des témoignages dont la solidité a été mise en doute par la défense.

source : Le 11 avril à 11h47 par charentelibre.fr