Des acteurs sans-papiers

Dans son quatrième long-métrage, la réalisatrice libanaise Nadine Labaki nous entraîne dans l’errance des familles réfugiés. Entièrement porté par un casting de sans-papiers, le film mêle réalité et fiction. «Capharnaüm est une fiction dont tous les éléments sont des choses que j’ai vues et vécues au cours de mes recherches sur le terrain. Rien n’y est fantasmé ou imaginé, au contraire, tout ce qu’on y voit est le fruit de mes visites dans des quartiers défavorisés, des centres de détention et des prisons pour mineurs, où je me rendais seule, dissimulée sous ma casquette et mes lunettes», explique Nadine Labaki.

Un enfant qui n’a pas choisi de naître

Immigration et travail clandestins, racisme, violence et maltraitanceinfantiles, le film, fruit de trois ans d’enquête, aborde avec réalisme ces questions de société. Si les situations vécues par les personnages sont inspirées de leur propre vie, l’idée du procès intenté par Zain est, elle, bel et bien fictive. «La plainte en justice de Zain représente un geste symbolique au nom de tous les enfants qui, n’ayant pas choisi de naître, devraient pouvoir réclamer à leurs parents un minimum de droits, au moins celui de l’amour», justifie la réalisatrice.

Réunis au tribunal, tous les protagonistes jusqu’alors invisibles aux yeux de la société, deviennent de simples hommes et femmes. «L’idée de ce tribunal a été nécessaire pour donner une légitimité au plaidoyer de toute une communauté de gens. Cette audience permet à leur voix, opprimée et ignorée, de se faire enfin entendre», ajoute Nadine Labaki.