“Charlie Hebdo” n’a “pas arrêté de faire de l’humour sur les musulmans et j’ai dit que cet humour-là était un humour de lâche” : Tariq Ramadan au Qatar.

Habituellement, la presse suisse joue la modération lorsqu’il s’agit de parler de Tariq Ramadan, citoyen suisse, né le 26 août 1962 à Genève. Mais, cette fois, le quotidien genevois Le Temps n’y va pas par quatre chemins pour dénoncer le double langage de l’islamologue. Sous le titre “Tariq Ramadan accuse Charlie de lâcheté et de faire de l’argent sur l’islam”, le journal révèle que sur la RTS, la radiotélévision suisse de langue française, l’ancien instituteur à Genève n’a cessé de dénoncer l’hebdomadaire satirique : “Ils n’ont pas arrêté de faire de l’humour sur les musulmans et j’ai dit que cet humour-là était un humour de lâches”, a-t-il déclaré depuis le Qatar.

Michel Danthe, rédacteur en chef adjoint du Temps, ne s’est pas contenté de regarder la télévision suisse, il a également écouté l’émission américaine Democracy Now et Al Jazeera en anglais. Tariq Ramadan y déclare que Charlie Hebdo avait des problèmes d’argent. “Et ces controverses, ces controverses récurrentes, ils en faisaient de l’argent. […] Alors, ne venez pas me dire aujourd’hui qu’ils étaient courageux, ça, non. […] C’était avant tout une question d’argent. Ils étaient en faillite depuis deux ans. Et ce qu’ils tiraient de ces controverses visant l’islam d’aujourd’hui et les musulmans était une manière de faire de l’argent. Cela n’a rien à voir avec le courage. Cela a à voir avec faire de l’argent et viser les gens marginalisés de la société.”

“Instiller le doute”

Des propos que Tariq Ramadan se garde bien de tenir en France. Voir, par exemple, ses appels au calme énoncés sur Europe 1 à la suite de la dernière publication de l’hebdomadaire satirique : “Même si notre coeur est blessé, notre intelligence doit avoir la dignité de ne pas répondre et de regarder au-delà. Ça, c’est la réponse qu’il faut donner”, expliquait ainsi Ramadan.

À l’étranger, il ne se contente pas d’évoquer la lâcheté des dessinateurs de Charlie Hebdo, il laisse clairement entendre qu’il y aurait la main, derrière ces crimes, des services secrets français, américains ou israéliens ! Sur les antennes d’Al Jazeera, “il parle de services secrets. Il parle des tours de septembre 2001”, écrit Le Temps. “Que sous-entend-il donc ? Qu’il s’agirait d’un complot des services secrets ? Il instille le doute”, selon Le Temps. Qui ajoute : “Bien évidemment, il est suffisamment malin pour ne jamais dire clairement les choses. Mais il sous-entend clairement qu’il n’est pas possible que les frères Kouachi se soient montrés assez stupides pour oublier une carte d’identité derrière eux. Tariq Ramadan cherche surtout à instiller le doute, afin que ses adeptes, derrière lui, fassent fructifier la théorie du complot. Tout en pouvant prétendre, pour se protéger, qu’il n’a jamais dit exactement cela”, constate Michel Danthe.

“Il y a un doute”

En 2001, après les attentats aux États-Unis, Tariq Ramadan, lors d’une conférence à Vénissieux, en région lyonnaise, avait déjà tenu des propos ambigus. “La seule chose que je sais, c’est qu’il y a un doute. Et quand il y a un doute, il faut se méfier des réponses précipitées. Si c’est Ben Laden et ses partisans, il faut qu’il réponde de ses actes, mais nous ne sommes pas idiots au point de penser que d’autres n’aient pas pu tirer profit de ce qui s’est passé”, déclarait-il. Tariq Ramadan ajoutait qu’Ariel Sharon, alors chef de l’État israélien, allait tirer profit de cet attentat pour renforcer la répression dans les Territoires palestiniens (*).

Le frère de Tariq Ramadan, Hani, directeur du Centre islamique de Genève, a lui aussi tenu des propos assez douteux au lendemain de la fusillade criminelle dans les locaux de Charlie Hebdo, déclarant : “On a affaire à un attentat. Alors, avant de stigmatiser et de faire des amalgames, il faut qu’une enquête ait lieu. Les coupables ont déjà été désignés. Or, c’est à l’État, un “État de droit, de le faire.”

(*) Lionel Favrot, Tariq Ramadan dévoilé, Lyon Mag, septembre 2004, pp. 247 et 248.

source : lepointfr De NOTRE CORRESPONDANT À GENÈVE, IAN HAMEL