Miviludes

Les missions d’information et de documentation sur les dérives sectaires assurées par les services de l’État doivent se poursuivre avec objectivité et neutralité, dans le respect de la liberté de conscience

Publié en ligne le 15 octobre 2019 –

Communiqué de presse, 15 octobre 2019


Le gouvernement vient d’annoncer qu’au 1er janvier 2020 la Mission interministérielle de vigilance et de lutte contre les dérives sectaires (Miviludes) allait quitter la tutelle du Premier ministre pour être rattachée au ministère de l’Intérieur, déjà chargé de la police des Cultes et de la mise en œuvre de la loi du 9 décembre 1905 (dite Loi de séparation des églises et de l’État). Ses activités seraient fusionnées avec celles du Comité interministériel de prévention de la délinquance et de la radicalisation.

La Miviludes a été instituée auprès du Premier ministre en 2002 avec pour mission d’« observer et analyser le phénomène sectaire, coordonner l’action préventive et répressive des pouvoirs publics à l’encontre des dérives sectaires et informer le public sur les risques et les dangers auxquels il est exposé » [1]. La réorganisation en cours suscite des interrogations quant à un éventuel abandon de ces missions.

L’Afis, en défendant le rôle et la place de la science dans le fonctionnement de notre société et dans la prise de décisions publiques, est fréquemment amenée à étudier et dénoncer les pseudo-sciences et les pseudo-médecines qui, parfois, se prolongent par des dérives de type sectaire. Ces dérives peuvent aller jusqu’à mettre gravement en danger la santé mentale ou physique de certains de nos concitoyens. Parmi de nombreux exemples, on peut rappeler les dégâts récemment observés dans notre pays suite à certaines campagnes de dénonciation de la vaccination ou des médicaments « chimiques » et de promotion de pratiques soignantes « alternatives » dangereuses et sans fondement scientifique ou médical.

Ces dérives sont le fait de groupes ou de personnes qui utilisent des références idéologiques, religieuses ou philosophiques, voire politiques. Elles cherchent à légitimer leurs actions par un discours d’apparence scientifique mais qui, en réalité, se révèle pseudo-scientifique, quand ce n’est pas franchement ésotérique.

L’Afis considère comme utile la mise à disposition de tous les citoyens et de tous les services de l’État d’une information et d’une documentation précises sur la réalité de ces agissements. Ainsi, la Miviludes a-t-elle régulièrement édité des « rapports au Premier ministre » qui faisaient état des saisines dont elle a été l’objet et qui produisaient des analyses détaillées de certaines dérives. Citons par exemple « Les dérives psychothérapeutiques : le cas des faux souvenirs induits » (rapport 2007), « La résurgence de discours apocalyptiques à l’approche de 2012 : du mythe de la fin du monde à la réalité d’un risque accru de dérives sectaires » (rapport 2010), « Le risque sectaire sur Internet » (rapport 2013-2014) ou encore « La résistance aux vaccinations : d’un défi de santé publique à un enjeu de société » (rapport 2015).

Cette information est indispensable afin de permettre à l’État d’exercer ses pouvoirs de police et de justice pour prévenir ou sanctionner les atteintes constatées.

À l’origine de la Miviludes, il y avait eu la création, en 1988, de la MILS (Mission interministérielle de lutte contre les sectes). Cette décision créait de toutes pièces un « objet juridique non identifié », les « sectes », et instituait une « mission de lutte » qui, faute de définition juridique, pouvait constituer une menace pour la liberté de croyance et de conscience. En 2002, la mission de « lutte contre les sectes » est devenue mission de « vigilance et de lutte contre les dérives sectaires ». Et la Miviludes a clarifié ce qui caractérisait une dérive sectaire 1 en se refusant « à définir les notions de secte et de religion, afin de ne pas heurter les libertés de conscience, d’opinion ou de religion garanties par les textes fondamentaux de notre République » [1].

L’Afis réaffirme que les missions d’information et de documentation sur les dérives sectaires doivent se poursuivre au sein de services compétents de l’État. Elles doivent pouvoir s’appuyer sur toutes les expertises nécessaires afin que le travail soit mené avec objectivité, neutralité et dans le respect de la liberté de conscience.

1 | Site de la Miviludes->https://www.derives-sectes.gouv.fr

1 « Il s’agit d’un dévoiement de la liberté de pensée, d’opinion ou de religion qui porte atteinte à l’ordre public, aux lois ou aux règlements, aux droits fondamentaux, à la sécurité ou à l’intégrité des personnes. Elle se caractérise par la mise en œuvre, par un groupe organisé ou par un individu isolé, quelle que soit sa nature ou son activité, de pressions ou de techniques ayant pour but de créer, de maintenir ou d’exploiter chez une personne un état de sujétion psychologique ou physique, la privant d’une partie de son libre arbitre, avec des conséquences dommageables pour cette personne, son entourage ou pour la société. » (Site de la Miviludes).