Des mouvements pouvant compter plusieurs dizaines d’adeptes se sont développés en Bretagne,  profitant souvent du mal-être de personnes fragiles et les coupant de leurs proches.
Des mouvements pouvant compter plusieurs dizaines d’adeptes se sont développés en Bretagne,  profitant souvent du mal-être de personnes fragiles et les coupant de leurs proches. (Illustration Le Télégramme / François Destoc)

Alors que la mission interministérielle de vigilance et de lutte contre les dérives sectaires (Miviludes) va être rattachée au ministère de l’Intérieur en 2020, le phénomène des sectes touche aussi la Bretagne, comme l’indiquait en 1996 un rapport parlementaire. Récemment encore, des affaires sont remontées dans les médias locaux, preuve de la persistance d’un mouvement qui utilise aujourd’hui les réseaux sociaux.

En 1996, pour la première fois de son existence, l’Assemblée nationale avait organisé un débat sur les sectes autour du rapport d’une commission parlementaire présidée par le député (UDF) Alain Gest. Les discussions devaient aboutir sur le refus unanime des membres du palais Bourbon d’ajouter une loi antisectes à l’arsenal législatif. Pourtant, la représentation nationale avait ressenti le besoin de « prendre la mesure » du phénomène sectaire au lendemain de trois tragiques événements : la mort de 88 Davidsoniens à Waco, au Texas, en 1993 ; le suicide et l’assassinat de 53 membres de la secte du Temple solaire au Canada et en Suisse, en 1994 ; et l’attentat au gaz perpétré dans le métro de Tokyo (11 morts et 5 000 blessés) par la secte Aoum en 1995.

Les travaux de la commission Gest ont tout de même eu un mérite. Exception faite d’un premier rapport rédigé en 1983 par le député (PS) Alain Vivien à la demande du Premier ministre Pierre Mauroy, il n’y avait jamais eu d’état des lieux officiels sur le mouvement sectaire en France. Et, dès cette époque, force était de constater que plusieurs sectes existaient en Bretagne. Parmi les mouvements de moins de 50 adeptes, il y avait, entre autres, Athanor à Néant-sur-Yvel (56) ; le village du verseau à Kergrist-Moëlou (22) ; pour celles comptant de 50 à 500 adeptes, l’arche de Marie à Amanlis (35), l’association Nouvelle acropole France à Nantes et Rennes, le centre de vie chrétienne à Saint-Pol-de-Léon (29), l’ordre monastique à Avallon (22), l’ordre du Graal à Pleudaniel (22)…

Dolmen et menhir à cinq mètres sous terre !
Au total, la commission Gest recensait en Bretagne pas moins de 35 mouvements différents, plus ou moins actifs et prospères, établis autour de thématiques variées allant de l’écologie aux guérisseurs en passant par la transformation personnelle, la religion, l’occultisme… Une longue liste à laquelle s’ajoutaient les « antennes » locales de mouvements comptant des millions d’adeptes à l’échelle mondiale comme l’Association pour l’unification du Christ mondial (secte Moon), la Scientologie ou les Témoins de Jehovah.

Aujourd’hui, les mouvements sectaires continuent régulièrement à faire parler d’eux en Bretagne. À la fin des années 90, à Locoal-Mendon (56), un groupe baptisé « Garum » et constitué, autour d’un ancien médecin du Samu, avait brusquement fait parler de lui quand des policiers médusés avaient découvert, lors d’une perquisition, une pièce souterraine de plus de 300 m², creusée à plus de cinq mètres de profondeur sous une épaisse chape de béton, et dotée d’un dolmen et un menhir pour se préparer à une fin du monde prévue en 2006 !

Un combat encore plus âpre

Sans parler de secte au sens strict du terme, un groupe évangéliste d’origine nigériane, Christ Embassy, a aussi fait parler de lui à partir de 2008, à Rennes, ville où laquelle ses adeptes allaient au contact des habitants dans la rue, lors d’opérations baptisées « Rhapsodies des Réalités », pour vanter les miracles et guérisons obtenus au sein de leur église par imposition des mains.

Au-delà de cet aspect folklorique, plusieurs signalements de familles bretonnes d’adeptes de tel ou tel mouvement, ont provoqué l’ouverture d’enquêtes. Comme au début des années 2000 lorsque l’Association de défense des familles et de l’individu (ADFI) a épaulé des adeptes qui avaient fui une secte des Pyrénées-Atlantiques, Tabitha’s Pace. Reste que ce combat antisectaire est devenu plus difficile. Le 17 mai 2019, lors du congrès annuel à Paris de la fédération européenne des centres de recherche et d’information sur le sectarisme, de nombreux intervenants ont dénoncé les nouveaux dangers liés au développement des réseaux sociaux, certains groupes n’hésitant pas à se cacher derrière des groupes Facebook pour recruter de nouveaux adeptes de tout âge.

source :

© Le Télégramme https://www.letelegramme.fr/bretagne/derive-sectaire-la-bretagne-n-est-pas-epargnee-26-10-2019-12418996.php#jWPjSQZkgYGUAlIk.99

image: https://www.letelegramme.fr/images/2019/10/26/des-mouvements-pouvant-compter-plusieurs-dizaines-d-adeptes_4878702_540x288p.jpg?v=1