PARIS, 20 sept 2011 (AFP) – .

Jeudi 22 et vendredi 23 , le tribunal correctionnel de Paris doit en effet juger d’un dossier pour lequel sont renvoyés deux membres de l’Opus Dei, ainsi que l’Association de culture universitaire et technique (ACUT). Ils comparaîtront pour “rétribution contraire à la dignité” et “travail dissimulé”.

A l’origine de la procédure: Catherine T., qui est entrée à l’Opus Dei en 1985. A 14 ans, son collège conseille à ses parents de la diriger vers un établissement de l’Aisne, l’Ecole technique privée d’hôtellerie Dosnon, qui dépend de l’ACUT.

C’est seulement en fin d’année, à l’occasion d’un film projeté sur le fondateur de l’Opus Dei, que les parents de Catherine découvrent que l’école “appartient à l’Oeuvre”.

L’Opus Dei dément un lien aussi fort avec l’Ecole Dosnon. Selon elle, il “se résume à la prise en charge de son aumônerie”.

“On m’a confiée à une +préceptrice+, qui était en fait une +directrice de conscience+”, raconte Catherine, “ils m’ont amenée à pratiquer”, “il y avait interdiction d’en parler aux parents”.

En 1987, on l’oblige, dit-elle à l’AFP, à contracter ses voeux : obéissance, pauvreté et chasteté. Elle devient alors “numéraire auxiliaire”, ce qui en langage opusien signifie qu’elle est “chargée des tâches domestiques”.

Durant 13 ans, la jeune femme accumule les contrats de travail au sein d’organismes ou d’associations qui, selon son avocat Me Rodolphe Bosselut, “dépendaient exclusivement de l’Opus Dei”.

“Stricto sensu, l’Opus Dei n’est pas dans le dossier, reconnaît le conseil, mais dire qu’il est déconnecté de l’Opus Dei, c’est être complètement schizophrène, car ce qui est en cause, c’est le statut de +numéraire auxiliaire+, qui est une spécificité de l’Oeuvre”.

Catherine dit avoir nettoyé, rangé et servi tous les jours de 7 heures à 21 heures, week-end compris, sans jamais prendre de vacances, ni être valablement payée.

En effet, on lui aurait versé un salaire, mais ses directeurs successifs lui auraient demandé de leur signer des chèques en blanc, qu’ils remplissaient ensuite, prétendument pour récupérer des frais d’hébergement ou de librairie.

Quoi qu’elle faisait, la jeune femme devait être accompagnée d’un membre de l’Oeuvre. Même chez le médecin. On la conduisait systématiquement dans les Yvelines, chez un praticien opusien, qui lui prescrivait neuroleptiques et tranquillisants.

En janvier 2001, ses parents la récupèrent dans un état de délabrement total: elle ne pèse plus que 39 kilos. Leur médecin de famille la met immédiatement en arrêt de travail: il lui faudra deux ans et demi pour se remettre sur pied.

Dans la plainte qu’il dépose fin 2001, son avocat dénonce “une manipulation mentale”, des “conditions de travail abrutissantes” et une “situation de dépendance économique”.

En 2005, la juge d’instruction soulève en outre un lièvre bien gênant. Au fil de l’enquête sont en effet apparues des opérations financières suggérant que l’Oeuvre pourrait chercher “à dissimuler l’origine des fonds qu’elle détient”. Mais le parquet a refusé que la juge étende ses investigations à d’éventuels faits de blanchiment.

Pour l’Opus Dei, “l’insistance de l’accusation à vouloir (la) présenter comme une institution fermée et secrète, voire sectaire, n’a pas de sens. Cela ne peut résister au +choc de la réalité+”, et à “l’expérience commune des milliers de personnes à travers le monde (…) épanouies et libres” au sein de l’Oeuvre.
Source : AFP Par Dorothée MOISAN