Critères de détection et principes de prudence

Ils ne peuvent être réduits à un dénominateur commun. Ils sont différents dans leur genèse, leur organisation, le nombre de leurs adeptes, les aspirations auxquelles ils répondent, la variété des méthodes utilisées.
Ils sont évolutifs, soit dans le sens de la radicalisation, soit, plus rarement, dans le sens de la normalisation. Une enquête est nécessaire pour distinguer le degré de dangerosité de ces mouvements. La plus extrême prudence s’impose dans la désignation d’un mouvement inquiétant ou dangereux. Il ne peut être reconnu comme tel qu’au terme d’un examen loyal de sa doctrine, de ses pratiques, de ses méthodes et d’une enquête recoupant des témoignages probants.

Tout groupe sectaire comporte, dans un premier temps, des aspects temporairement positifs pour les adeptes. Les méconnaître serait renoncer à comprendre l’attrait qu’il exerce.

L’allégeance des adeptes, avant de devenir inconditionnelle, traverse une phase d’adhésion réversible, où l’adepte n’est que consommateur de prestations.

La discrimination la plus difficile se situe entre les groupes d’embrigadement et
certains groupes à vocation thérapeutique ou de formation personnelle présentant des bizarreries apparentes qui peuvent, au premier abord, donner le change.

Sans tomber dans le laxisme, il faut savoir que les attaques trop vives risquent de renforcer la marginalisation des mouvements sectaires et leur repli en citadelle assiégée.

Au-delà des hommes impliqués et des organisations aliénantes, ce sont les
mécanismes pervers qu’ils génèrent qui sont nos vraies cibles.

Un faisceau d’indices permet de qualifier un groupe sectaire :
• le contenu désocialisant de la littérature diffusée,
• l’absence de transparence dans les finances et la gestion,
• les antécédents et les ressources inexpliquées des dirigeants,
• les masques de la respectabilité,
• le type d’éducation proposé,
• les promesses mirifiques,
• la volonté totalitaire de gérer tous les aspects de la vie de l’adepte,
• les ruptures familiale et sociale,
• l’obéissance totale exigée.

DANGERS de MANIPULATION si :

• Promesses mirifiques
• Ruptures familiale et sociale exigées
• Manque de clarté sur les antécédents du « leader »
• Absence de transparence des finances

Anne FOURNIER, historienne, et Michel MONROY, médecin psychiatre, ont défini dans leur livre « La dérive sectaire » Paris, PUF, 1999 :
Les caractéristiques qui peuvent permettre d’établir un diagnostic de dérive
sectaire :

• le groupe développe une idéologie alternative radicale, exclusive et intolérante,
• sa structure est autoritaire et autocratique, sous la forme d’un gourou vivant ou d’une organisation héritière du message,
• il revendique une référence exclusive à sa propre interprétation du monde, qu’elle s’applique aux croyances, aux données scientifiques, à l’éthique, aux
comportements quotidiens, aux rapports interpersonnels, aux moyens de faire triompher la cause du groupe,
• Il préconise des ruptures de tous ordres : références antérieures, orientations personnelles, relations, convictions, libre critique, choix affectifs, les relations au monde extérieur devenant marquées par le rejet, la suspicion, voire la diabolisation,
• il met en oeuvre une transformation des personnes selon un type de modelage standardisant, excluant l’autonomie,
• il récupère à son profit les forces vives, l’initiative, la créativité, l’énergie des
adeptes, réalisant ainsi une instrumentalisation des individus au seul service du groupe et de ses chefs,
• il multiplie promesses et assurances de tout genre : développement personnel, salut élitiste, toute puissance sur soi-même, santé, pouvoir collectif, promotion interne. Dans le même temps, il masque les coûts réels, les contraintes, les risques, l’emprise progressive, les transformations dans le sens de la dépendance,
• il exploite les inquiétudes et les peurs, développe la culpabilité, la crainte du rejet, la hantise de la déloyauté, la surveillance réciproque,
• il rend problématique à divers égards la perspective de quitter le groupe, devenu une prothèse relationnelle entourée d’alternatives menaçantes ou vides,
• il comporte des dangers variables selon les groupes, pour le libre arbitre, l’autonomie, la santé, l’éducation, et dans certains cas, pour les libertés démocratiques ou la sauvegarde personnelle.

Le rapport parlementaire GEST / GUYARD de 1996 a identifié dix dangers pour l’individu et la collectivité, permettant de reconnaître une secte :

– Dangers pour l’individu

• Déstabilisation mentale
• Exigences financières exorbitantes
• Rupture de l’adepte avec l’environnement d’origine
• Atteinte à l’intégrité physique des adeptes
• Embrigadement des enfants

Analyser et comprendre l’emprise mentale

– Dangers pour la collectivité

• Discours clairement antisocial
• Troubles à l’ordre public
• Importance des démêlés judiciaires
• Détournement des circuits économiques
• Infiltrations ou tentatives d’infiltrations
Il convient cependant, de distinguer les notions d’indices, qui sont de nature à mettre en garde, mais ne sont pas spécifiques aux groupes sectaires, et les critères qui eux caractérisent ces groupes.

– Les indices :

• Le caractère exorbitant des exigences financières.
• Les troubles à l’ordre public.
• L’importance des démêlés judiciaires.
• L’éventuel détournement des circuits économiques traditionnels.
• Les tentatives d’infiltration des pouvoirs publics.
• Le discours clairement antisocial.
– Les critères spécifiques :
• La déstabilisation mentale.
• La rupture induite avec l’environnement d’origine.
• Les atteintes à l’intégrité physique.
• L’embrigadement des enfants.