Ils viennent des Etats-Unis, du Royaume-Uni, d’Espagne, de France, d’Inde, d’Indonésie… En fait, ils viennent du monde entier, car ils savent que tous les chemins mènent au califat. Comme les cartes géographiques ne dessinent pas encore les contours précis de l’Etat islamique, beaucoup prennent un aller simple pour Istanbul, où ils savent qu’ils seront pris en charge par l’internationale djihadiste. Dans ce dédale de frontières poreuses du Moyen-Orient, ces jeunes recrues ont rendez-vous avec leurs nouveaux maîtres, cachés quelque part entre l’Irak et la Syrie. Maniement des armes et lavage de cerveau les attendent. La fureur de la guerre ou l’odeur de la mort les guident. Parfois ce ne sont que des adolescent(e)s, mais ils rêvent déjà d’en découdre, mus par un romantisme morbide. Ils sont habités par la foi des rebelles et rêvent de passer des croisades numériques aux combats homériques. Il y a quarante ans, leurs aînés, en rupture avec la société, prenaient la route de Katmandou à la recherche de paradis artificiels. Eux sont en mission, tels des combattants fanatiques propulsés dans l’ère des réseaux sociaux et de la globalisation. Il y a quelque chose de répugnant à évoquer une prétendue “branchitude” du djihad, à savoir que sur Internet on vend des tee-shirts à la gloire de l’Etat islamique. “A force de manipuler un islam amorphe, celui-ci est devenu l’objet de toutes les surenchères”, met en garde l’intellectuel syrien Yassine Al-Haj Saleh*. Face à cette menace, de nombreux pays, à l’instar de la Grande-Bretagne, tentent d’empêcher le retour des djihadistes sur leur sol. La priorité serait d’éviter qu’ils aient envie de partir.

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COURRIER INTERNATIONAL | ERIC CHOL N° disponible du 2 au 10 septembre 2014
2 SEPTEMBRE 2014
ÉDITORIAL : Paradis artificiels