Une longue minute de silence, emplie d’émotion, suit l’annonce. Face aux journalistes, les responsables de l’Arche sont encore bouleversés par ce qu’ils viennent de livrer, au terme de huit mois d’enquête. « Le cœur brisé », Pierre Jacquand, responsable de l’Arche en France, dont il est membre depuis 22 ans, se dit encore partagé entre la « sidération » face à « l’écart vertigineux entre l’homme qu’on connaissait et tout ce qu’on découvre de son existence », une forme de résistance intérieure – « Non, pas lui » -, et « la tristesse d’avoir été trahi ». « Jean Vanier était mon ami, il m’a fait beaucoup de bien comme à des milliers de personnes, je lui dois beaucoup. Il a préféré nous mentir plutôt qu’être infidèle à ce qu’il croyait, aux théories du père Thomas Philippe auxquelles il a adhéré et qu’il a lui-même mises en pratique. »

« Non, pas lui. » Jean Vanier, le fondateur de l’Arche (1928-2019). Cet homme humble qui, de son mètre quatre-vingt-dix, se penchait avec tendresse sur les plus petits, prêchant depuis un demi-siècle l’Évangile de la fragilité et sachant toucher le cœur des croyants d’autres religions comme des incroyants. Et pourtant, il a fallu se rendre à l’évidence. Les conclusions de l’enquête lancée en juin 2019 « sont éprouvantes et vont heurter beaucoup d’entre nous », préviennent les responsables de la Fédération Stephan Posner et Stacy Cates-Carney, dans une lettre publiée ce samedi 22 février sur le site de l’Arche, en présentation du rapport d’enquête.

« Emprise psychologique et spirituelle »

Non seulement il était informé dès les années 1950 – contrairement à ce qu’il a affirmé jusqu’à sa mort – des motifs pour lesquels son père spirituel, le père Thomas Philippe (1905-1993) avait été condamné par l’Église en 1956, mais Jean Vanier aurait partagé, dès les années 1950, « certaines des pratiques sexuelles dont le père Philippe était l’initiateur ». Ce fut d’abord avec « des femmes qui se décrivent comme consentantes », qui participèrent à des titres divers aux débuts de l’Arche.

source : la Croix

  • Céline Hoyeau,