Je vous avais parlé, à l’automne 2009, du courrier de Paul Haggis, le réalisateur oscarisé de Collision (et, plus récemment des Trois Derniers Jours), adressé à l’Eglise de scientologie, dont il avait été membre, pour signifier son rejet de l’institution. Courrier rendu public, et donnant du grain à moudre à ceux qui pourchassent ce culte florissant à Hollywood (je ne sais même pas si, légalement, j’ai le droit de l’appeler secte, sans que des nervis me tombent dessus). Haggis reprochait à l’époque aux instance scientologues d’avoir pris position contre le mariage homosexuel (deux de ses filles, pourtant rigoureusement élevées selon les lois scientologues, sont homosexuelles), et il reprochait aussi à l’un de ses dirigeants d’avoir nié publiquement le principe de « déconnection » (se détourner de ceux qui ont rejeté la foi) pourtant prôné par la Scientologie… Un an et quelque après, le New Yorker fait de Haggis le fil rouge d’une longue enquête (100 feuillets et des poussières), apparemment très complète, sur les pratiques scientologues. http://www.newyorker.com/reporting/2011/02/14/110214fa_fact_wright?currentPage=all

Celles-ci n’ont pas grand-chose à faire sur un blog cinéphile, sauf que le grand témoin du papier est cinéaste, et que quelques anecdotes « scientolog-hollywoodiennes » valent le détour.

Le récit, par exemple, par Josh Brolin, d’un dîner avec John Travolta et Marlon Brando. Brando arrive en retard, il a une blessure à la jambe, qu’il s’est faite en portant secours à un motard sur la route. Travolta propose son aide, précisant avoir atteint un nouveau stade de connaissance scientologue. Il touche la jambe de Brando, qui ferme les yeux. « J’ai été témoin du processus, raconte Brolin, c’était très physique. Je me disais que c’était super bizarre. Et puis, au bout de dix minutes, Brando a rouvert les yeux en disant : “Ça m’a vraiment aidé, je me sens différent”… » Travolta, contacté par le journaliste du New Yorker, a nié l’incident par la voix de son avocat.

La bio de Haggis, ex-mini-bad boy reconverti en scénariste à succès (un peu grâce à la franc-maçonnerie scientologue), est assez vertigineuse : 34 ans de Scientologie, plus de 400 000 $ de dons divers, règlements de leçons, etc., pour tenter d’ordonner une vie en désordre. Ses rapports compliqués avec sa fille aînée, par exemple (que la Scientologie n’a pas améliorés), il les a mis dans le scénario de Million Dollar Baby – où Eastwood trouve en Hilary Swank une « fille de substitution ». Quand il rend public son départ de l’Eglise, c’est une flopée d’amis scientologues qui l’attend devant sa maison, parmi lesquels l’actrice Ann Archer (Liaison fatale), ou le compositeur Mark Isham (Les Noces rebelles). La scène rappelle juste L’Invasion des profanateurs de sépulture, quand les voisins, transformés, traquent celui qui a su encore garder son libre-arbitre. Glaçant !

Cinécure
Le blog d’Aurélien Ferenczi

http://www.telerama.fr/cinema/en-compagnie-de-paul-haggis-ex-scientologue,65392.php