Juliano Verbard, gourou de la secte Coeur Douloureux et Immaculé de Marie, s’est évadé de la prison de Domenjod à bord d’un hélicoptère le 27 avril 2009. Une évasion spectaculaire orchestrée par les disciples de Petit Lys d’Amour qui n’ont pas hésité à prendre en otage le pilote remplaçant de Mafate Hélicoptères. Le 21 mai prochain, cette évasion inédite à la Réunion sera jugée par la cour d’assises (cf linfo.re : L’évasion de Juliano Verbard jugée le 21 mai ).

Plus de trois ans après cette terrible journée, ce pilote Yann Morvan a accepté de se confier en exclusivité à Antenne Réunion. Une expérience plus que traumatisante que ce pilote raconte en détails. “Ils nous ont montré une bouteille d’eau classique et nous l’ont fait sentir,c’était de l’essence, ils nous l’ont versé sur le corps en nous disant, ils ont allumé un briquet en disant qu’ils étaient prêts à mourir si on exécutait pas leurs ordres”, raconte Yann Morvan.

Le 27 avril, Yann Morvan décolle à bord de l’alouette 3 avec trois passagers à bord, pensant qu’il ne s’agit que d’un simple vol touristique. “On s’approche du Colorado, je leur annonce que Saint-Denis c’est ici, qu’est-ce qu’on fait et ils m’ont répondu tu fonces sur Saint-Denis”, se souvient le pilote avec émotion. A ce moment précis, la simple balade de routine se transforme en cauchemar. Ne connaissant ni l’identité, ni l’objectif de ses passagers menaçants, le pilote croit alors à un attentat suicide qui viserait un bâtiment public du chef-lieu.

Ne sachant rien de leurs intentions, Yann Morvan prend alors une décision radicale : se sacrifier pour épargner les vies de dizaines d’innocents. “Je décide de me crasher, de me jeter sur les lignes à haute tension qui passent au dessus de la rivière Colorado. Dix secondes avant l’impact, ils m’annoncent qu’ils veulent aller à la prison de Sainte-Marie pour libérer quelqu’un”.

In Extremis, l’appareil prend alors la direction de Domenjod. Une descente très délicate à manoeuvrer dans la cour étroite de l’établissement pénitentiaire. “J’entendais les bouts de Pal siffler dans les enceintes de la cour”, se rappelle Yann. Ensuite, les choses s’enchaînent très rapidement. Une corde est jetée dans la cour, une première personne monte, une seconde. “Je ne savais pas qui montait, j’étais concentré sur le pilotage. Je me souviens qu’une troisième personne monte et que cela ne se passe pas bien, le marche-pied a cédé sous son poids, il s’est accroché à la porte, il s’est retrouvé pendu dans le vide, on l’a rattrapé au dernier moment”.

A ce moment-là, Yann Morvan ignore qu’il a participé sous peine de mort à l’évasion de Juliano Verbard, le gourou de la secte Coeur Douloureux et Immaculé de Marie. “Je n’ai compris qu’ensuite, dans les locaux de la police, que c’était Juliano Verbard qui avait été extrait de la prison”. Ils sont alors 8 dans l’hélicoptère. Le pilote sent la satisfaction ressentie par le gourou et ses disciples. Mais c’est l’angoisse qui domine pour le pilote. “A ce moment là je suis sur qu’ils vont nous faire disparaître en brûlant l’aéronef et nous avec”, raconte ému Yann.

Convaincu qu’il va mourir, Yann tente alors le tout pour le tout pour sauver sa peau et celle de son jeune mécanicien ligoté à l’avant. “J’ai décidé de simuler un crash et de faire ce qu’on appelle une auto rotation en coupant les turbines de l’hélicoptère et on laisse l’hélico posé sans moteur “. La ruse de Yann fonctionne et les preneurs d’otage s’enfuient à toute vitesse, laissant même dans l’appareil un sac qui a aidé à leur identification.

Malgré un suivi psychologique, le pilote garde un profond traumatisme de cette prise d’otage. La voix étranglée par l’émotion, le pilote ne peut s’empêcher de penser aux “conséquences qu’auraient pu avoir son projet au Colorado”. “Les conséquences de se jeter dans cette ligne, de me tuer, de tuer mon collègue, la détresse de nos familles, donc c’est cette décision délicate que j’ai du prendre, et qui a été une erreur et je vis avec ça depuis quelques années maintenant et ça ne s’effacera jamais de toute manière…”

Hanté par la culpabilité, ce père de famille vit désormais aux Antilles où il tente de se reconstruire.

source :Linfo.re

jeudi 10 mai 2012

http://www.linfo.re/-Faits-Divers-/Evasion-de-Verbard-les-confidences-du-pilote