CE DONT ON VA PARLER :

L’objectif de cette fiche est de présenter les formes juridiques que peuvent prendre les atteintes sexuelles dans le cadre des dérives sectaires, en particulier lorsqu’elles s’inscrivent dans une situation de soumission psychologique. Il sera question des qualifications pénales possibles ainsi que des obstacles posés par la notion de consentement en contexte d’emprise mentale.

SOURCES :

– Code pénal : articles 222-22 (agression sexuelle), 222-23 (viol), 222-33 (harcèlement sexuel), 225-5 (proxénétisme), 621-1 (outrage sexiste). – Cour d’assises (affaire Gabriel Loison) : reconnaissance d’une contrainte morale fondée sur la sujétion psychologique, l’écart d’âge, et le rôle de parrain. – Jurisprudence récente : refus d’élargir la définition au mariage arrangé.

SYNTHESE :

Les infractions pénales visant les atteintes aux biens visent des dégradations de la propriété privée. Dans le cadre de dérives sectaires, on retrouve fréquemment des cas d’abus de confiance et d’escroquerie qui portent des sommes d’argents (I), ainsi que des infractions de vandalisme entre autres infractions visant des biens immobiliers (II).

I. LES VIOLENCES SEXUELLES

Prendre le contrôle sur la pratique sexuelle de ses adhérents est un des éléments caractéristiques des groupes sectaires, que cela soit en désignant des compagnons de vie ou en proposant des unions sacrées et sexuelles. Ces comportements peuvent donner lieu à des actes de harcèlement sexuel (a) mais aussi à des viols ou des attouchements (b).

a. Harcèlement sexuel

Le harcèlement sexuel peut être caractérisé lorsque des propos ou comportements à connotation sexuelle sont imposés de façon répétée. Dans le cadre sectaire, cela se manifeste souvent par des incitations persistantes à participer à des pratiques sexuelles présentées comme bénéfiques ou nécessaires, parfois accompagnées de pressions morales ou spirituelles. La jurisprudence a admis que même un acte unique, s’il est particulièrement grave, peut suffire à caractériser cette infraction.

b. Viol, attouchements

Le viol et l’agression sexuelle sont définis par les articles 222-22 et 222-23 du Code pénal. Dans le cadre des sectes, la difficulté est souvent de démontrer l’absence de consentement lorsque la relation sexuelle s’inscrit dans un rituel accepté par la victime. Or, l’emprise psychologique fausse ce consentement. Si la jurisprudence admet qu’une contrainte morale peut constituer un mode de commission, elle exige qu’elle soit sérieuse et irrésistible. Cela exclut pour l’instant de nombreuses situations d’emprise pourtant typiques des groupes sectaires.

II. LE PROXENETISME

Certains groupements sectaires proposent une vision du féminin sacrée qui tira sa force à l’instar de Cléopâtre de sa puissance de séduction, et qu’une femme vraiment libérée vend ses charmes pour assoir sa domination. On trouve différentes variantes de ce type de théorie qui justifie des réseaux de proxénétisme (a) et des infractions annexes (b).

a. Réseaux de proxénétisme

Certains groupements articulent un discours sur le « féminin sacré », selon lequel la véritable libération de la femme passerait par la vente de ses charmes, à l’image d’une figure comme Cléopâtre. La prostitution est ainsi présentée comme une voie d’émancipation et un moyen d’atteindre des niveaux supérieurs dans l’échelle initiatique. Elle permet également de financer des formations dont le coût augmente à chaque niveau. L’adepte est ainsi amené à pratiquer la prostitution pour continuer à évoluer spirituellement.

L’article 225-5 du Code pénal réprime l’organisation de l’activité de prostitution. Toutefois, dans ce contexte, la reconnaissance judiciaire reste difficile, notamment du fait de l’adhésion apparente de la victime, alors même qu’elle est sous emprise mentale.

b. Infractions annexes

Le contrôle des relations affectives peut aussi passer par des mariages arrangés imposés au sein du groupe. En droit français, il n’existe pas de délit spécifique de mariage arrangé ou forcé. La Cour de cassation a récemment exclu la possibilité de requalifier ces situations en traite des êtres humains. La question du consentement est donc centrale : en présence d’une emprise mentale, l’union peut apparaître consentie en apparence, mais se révéler viciée dans la réalité. La nullité du mariage peut être obtenue a posteriori sur le fondement du vice du consentement, entraînant l’annulation rétroactive des effets patrimoniaux du mariage. Toutefois, dans certains cas, il est conseillé de recourir à un divorce amiable pour éviter un contentieux trop lourd.

Conclusion

Les atteintes sexuelles en contexte sectaire illustrent la difficulté du droit à saisir des réalités psychologiques complexes. L’état d’emprise mentale, pourtant reconnu dans d’autres domaines comme cause de nullité d’actes juridiques, reste insuffisamment pris en compte en matière pénale. Les qualifications classiques de viol, agression ou harcèlement sexuel ne sont pas toujours applicables, malgré des pratiques manifestement coercitives. Une évolution de la jurisprudence, fondée sur la notion de contrainte morale et l’analyse des dynamiques d’emprise, semble indispensable.

Infos pratiques :

– L’article 222-33 permet de poursuivre un acte unique de harcèlement s’il est d’une particulière gravité.
– Le mariage sous emprise mentale peut être annulé pour vice du consentement.
– Le recours à la justice restaurative peut être envisagé pour accompagner la prise de conscience de la victime.