CE DONT ON VA PARLER :

L’entrée d’un membre du couple dans une dérive sectaire est souvent à l’origine d’une rupture conjugale. Elle fragilise l’union, met en péril les enfants, et engendre de lourdes conséquences juridiques et psychologiques. Cette fiche aborde les premiers réflexes à avoir en cas de divorce avec un parent sous emprise (I), puis les enjeux liés à la garde et à l’autorité parentale en cas de dérive sectaire (II).

SOURCES :

– Code civil, art. 375
– Jurisprudence : Cass. civ., 1re, 25 juin 2014, n°13-14.779 (résidence de l’enfant et adhésion religieuse)
– Loi du 18 mars 2024 (protection de l’enfant en cas de violence conjugale ou inceste)

SYNTHESE :

La famille L’embrasure qui permet de percer au jour la dérive sectaire par la découverte d’un proche qui perd le sens commun, devient secret, s’inscrit dans une série de pratiques incompréhensibles, essaie de promouvoir ses croyances. La prise d’un membre d’un couple dans une dérive sectaire entraîne presque toujours le divorce : les croyances deviennent incompatibles avec le maintien du couple, le groupement tente d’écarter l’adepte de sa famille qui pourrait le détourner. C’est sans toute au travers du droit de la famille que la dérive sectaire apparait la première fois et prend sa force. Comment aborder un divorce en présence d’une dérive sectaire (I) et comment la dérive impacte le droit de garde (II).

I. DIVORCE : PREMIERS REFLEXES ET ELEMENTS A PRENDRE EN COMPTE

Le droit positif français ne considère généralement pas l’adhésion à un groupement sectaire comme une cause de divorce, il convient donc d’éviter de lancer une procédure de divorce pour faute, mais plutôt chercher à comprendre les dynamiques à l’œuvre, documenter les comportements inquiétants, et engager une procédure sur le fondement de l’altération du lien conjugal ou de la rupture du lien affectif.

a. Auditer les croyances et prendre acte de la rupture sans blesser

Une première recommandation est de faire un tour dans la bibliothèque du conjoint et de fouiller les placards (et les cachettes de type caves et grenier). On y découvre généralement toute une série de livres sur les nouvelles croyances et sur les différentes activités et stages suivis, notamment des flyers. Cette première approche est importante car elle permet d’avérer l’existence d’un péril sectaire et de comprendre la mouvance dans laquelle se situe la victime.

Une fois cette confirmation, il convient de comprendre comment se positionner. La question n’est pas évidente et peut être contre-intuitive. Les ruptures, surtout quand il y a des enfants est une source de stresse fondamental et la victime d’une dérive sectaire sera d’autant plus fragile et déstabilisé que les membres du groupement voudront instrumentaliser la procédure pour assoir le recrutement. Une fois la découverte du groupement, il faut construire un dossier documentaire pour comprendre le plus possible de quoi on parle.

b. Rien ne sert de remettre en cause la croyance pour éviter La tendance forte à la calomnie

Une des constantes qui ressort de la pratique du droit de la famille des dérives sectaires est la puissance de la calomnie. Il est une pratique courante pour un adepte pris dans une dérive de calomnier et d’obtenir des autres membres du groupement des attestations calomnieuses ou des certificats de psychologues ou de médecins sympathisants du groupement. Il faut bien comprendre que le groupement verra la procédure de divorce comme un élément clef pour maintenir l’adepte et récupérer des actifs. Une personne en cours de divorce est fragile, seule et déstabilisée. Elle est donc la victime idéale.

Il convient d’être prudent et de ne pas tenter de confisquer la procédure de divorce pour en faire un terrain de règlement de compte. Le risque d’une contrattaque calomnieuse est un grand classique entraînant une spirale conflictuelle qui fragilise davantage la situation familiale et rend plus difficile la protection de l’enfant.

II. LE DROIT DE GARDE : L’INTERET SUPERIEUR DE L’ENFANT

La question de la garde des enfants soulève alors une problématique délicate: comment concilier l’intérêt supérieur de l’enfant avec la situation d’un parent impliqué dans une dérive sectaire ?

a. La position de principe garde alternée

L’adhésion a une dérive sectaire n’est pas un critère qui peut venir affecter la détermination de la garde d’un enfant. Un juge procède selon ses critères classiques : le principe est la garde alternée sauf en cas de danger immédiat pour l’enfant. Le critère du danger est élevé : un juge a maintenu la garde d’un enfant chez une mère raélienne dont le compagnon prônait l’initiation sexuelle des mineure …. Le juge a juste ordonné que l’enfant ne soit pas mise en lien avec le groupement.

La tentation peut paraitre grande de faire de la dérive sectaire un cheval de bataille, mais cela est vain et risque surtout de pousse la victime vers une contrattaque qui aura pour base de la calomnie.

Il convient de donc de ne s’engager sur ce domaine qu’en cas de risque pour l’enfant avéré : risque médical, risque de violences sexuelles, risque de déscolarisation.

La question n’est pas la même en cas de changement de résidence du parent adepte à une certaine distance du domicile, ce qui rendra nécessaire une garde chez un seul des parents. Il convient alors d’agir le plutôt possible pour empêcher le déplacement de l’enfant et de bien maintenir sa scolarisation.

b. Est-ce dire qu’il faut abandonner les enfants ?

Dans la majorité des cas, la garde sera alternée. Cela ne veut pas dire que l’enfant va sombrer aussi dans la croyance. Le principe de la garde alternée est le partage de l’autorité parentale et des choix éducatifs et la présence équilibrer des parents. Il convient donc de voir cette garde alternée comme une chance pour assurer une autre vision à l’enfant. La prise de connaissance des croyances de l’autre parent et une approche différente permet à l’enfant de faire son choix. L’enfant est aussi digne de faire son choix et la présence d’un parent dans un groupe déviant d’entraine pas nécessairement son adhésion. La question est plus complexe en cas de décision de domicile parental chez un des parents : l’adeptes. Ce cas de figure se profile quand l’adhésion entraîne une relocalisation géographique.

Conclusion :

Le droit de la famille ne traite pas les croyances comme des fautes. Seule leur traduction concrète dans la vie de l’enfant est prise en compte. Il faut éviter les conflits idéologiques et privilégier une approche basée sur les faits. Le parent non- adepte doit documenter, rester calme et protéger, sans jamais chercher à discréditer frontalement l’autre. C’est par la constance, la présence et l’exemple qu’il préservera l’enfant.

Infos pratiques :

– L’adhésion à une secte n’est pas une cause de divorce pour faute. – Le juge privilégie la garde alternée sauf en cas de danger réel, démontré. – L’ordonnance de protection permet une réaction rapide en cas de violence psychologique.

– Le droit collaboratif ou la médiation permettent de limiter l’escalade judiciaire. – En cas de déscolarisation ou de relocalisation, agir rapidement auprès du JAF.