CE DONT ON VA PARLER :
Le projet totalitaire du groupement sectaire cherche souvent à inculquer les dogmes du groupe aux enfances par la création d’écoles hors contrats ou d’écoles sauvages. La loi française a récemment évolué pour prendre en compte le risque de déscolarisation et d’école à la maison.
SOURCES :
Loi n° 2021-1109 du 24 août 2021 confortant le respect des principes de la République
Loi du 31 décembre 1959, dite loi Debré, le régime de l’enseignement privé sous contrat
L. 131-2 et suivants du code de l’éducation
SYNTHESE :
Le groupement à dérive sectaire est totalitaire et se propose une alternative à l’État. Elle est séparatiste par essence et souhaite imposer ses principes comme sociabilité complète. Dès lors, l’école est souvent vue comme néfaste car sort l’enfant du cadre de la vérité sectaire pour lui inculquer des principes généralement décriés et vus comme incompatibles avec le projet sectaire : les principes républicains.
L’école est au cœur de la création du citoyen en créant un socle culturel commun ; par définition, elle est libérale et porte atteinte au pouvoir des parents de façonner l’esprit de leur enfant selon leurs convictions religieuses. L’enfant est pris entre les deux et est souvent trop jeune pour pouvoir prendre une décision. Le droit vient résoudre cette question complexe et aujourd’hui centrale.
Il convient d’étudier la notion d’enseignement obligatoire et de son corolaire l’école en famille (I) avant de se pencher sur les écoles spécifiques qui sortent de l’enseignement commun (II).
I. Les obligations de scolarité : école ou maison
Luc Ferry a rendu en 1882 l’instruction obligatoire et non l’école. Sur la base de cette dichotomie a pu fleurir l’instruction en en famille (a) qui a fait l’objet d’une modification profonde avec la loi sur séparatisme du 21 août 2021 (b).
a. L’instruction à l’école comme socle
L’article L. 131-1 du code de l’éducation dispose ainsi : « L’instruction est obligatoire pour les enfants des deux sexes, français et étrangers, entre six ans et seize ans ».
Instruction, pas école. L’obligation porte donc sur le fait de soumettre l’enfant à un processus de formation. Il peut se faire à l’école ou à la maison, c’est l’instruction en famille.
Le principe reste donc l’éducation à l’école, mais celle-ci peut se heurter au droit au respect aux convictions religieuses et philosophiques des parents que l’école droit respecter. Ainsi, la Convention européenne des droits de l’homme a pu sur le fondement de l’article 2 du protocole 1 consacrer à un droit à l’instruction et le droit pour les parents au respect de leurs convictions religieuses (CEDH 7 déc. 1976, Kjeldsen, Busk Madsen et Pedersen c/ Danemark). Cela fait peser sur l’état l’obligation d’une diversité.
L’instruction en famille consiste à instruire son enfant à la maison. Elle n’est pas pour autant libre. Il convient que les parents de réaliser une instruction spécifique. La question de savoir si le droit pour un parent d’instruire était un droit fondamental a pu être posé à la Cour Européenne des droits de l’homme sur le fondement de l’article 8 sur le respect de la vie privée.
b. Instruction en famille : Le régime de l’autorisation préalable
La loi de 2022 sur le séparatisme a changé radicalement le régime de l’instruction en famille, notamment pour éviter la déscolarisation des jeunes filles, en la faisant reposer sur un régime de l’autorisation préalable. Antérieurement, il ne s’agissait que d’un régime de déclaration. Le ton est donc donné. L’autorisation ne peut être donné que dans un nombre limité de cas qui sont : l’état de santé de l’enfant ou son handicap, la pratique sportive ou artistique intensive, l’itinérance familiale ou une situation propre à l’enfant motivant le projet éducatif. La derrière possibilité rabat large et serait le gouffre d’entrée pour une pratique sectaire. L’autorisation est donnée par le directeur académique des services de l’éducation nationale. Il s’agit d’une autorisation administrative qui peut donc donner lieu en cas de contestation à des recours administratif et notamment des référés-libertés.
Un pouvoir de contrôle est donné au maire afin de vérifier que les explications données pour justifier l’éducation en famille sont bien réelles et sont bien toujours existantes. L’autorisation ne vaut qu’un an et doit être renouvelée à chaque rentrée scolaire.
Le régime est donc relativement restrictif avec une volonté de réduire ces possibilités. En effet, la logique est que l’éducation à l’école permet en outre de la transmission des informations nécessaires l’éducation du citoyen de demain en inculquant le vivre ensemble dans une société diverse et socialisée.
Le choix n’est binaire qu’en apparence. Derrière l’école se cache une grande diversité de programmes pédagogiques et de possibles déviances.
II. Le choix de l’établissement scolaire
Certains groupes ésotériques on peut développer leurs propres établissements scolaires afin de permettre la diffusion de leurs croyances. Quel cadre pour ces écoles privées (a) et quid des écoles totalement indépendantes (b).
a. Les obligations pour être une école
En dehors de l’école publique, il y a les écoles sous contrats et les écoles hors contrats. Être sous contrat signifie avoir passé avec l’État un contrat dans le cadre duquel, l’école prend des engagements et notamment pédagogiques. Elles peuvent bénéficier d’un soutien financier de l’État. A contrario, les écoles hors contrats sont totalement libres et non financées par l’État. Cela ne veut pas dire qu’elles sont hors cadre, elles doivent se soumettre au code de l’éducation et avoir un programme pédagogique cohérent avec les obligations générales de contenus, mais autrement, elles peuvent développer une liberté d’organisation.
Il ne s’agit pas d’un phénomène isolé d’après certain décompte cela représenterait près de 4% de la population devant aller à l’école. Un grand nombre d’établissements ne portent que sur la maternelle. Les contraintes en termes de programme scolaire étant plus léger sur ces classes d’âge. Évidemment, de nombreuses écoles libres ont pour vocation de développer des pédagogies alternatives comme les écoles Montessori et ne relèvent pas d’un programme sectaire.
Il est possible de constituer sa propre école hors contrat. Il convient néanmoins de monter un projet assez lourd en termes administratifs pour prouver que le projet respect les impératifs du code de l’éducation et que le directeur de l’école est bien qualifié. Toutefois, il y a une grande marge de manœuvre pour constituer son école.
b. Qui décide : l’exercice de l’autorité parentale
Qui décide en définitive. Le choix de l’éducation et celui de la religion des enfants relèvent de l’autorité parentale. Il ne s’agit pas d’un choix usuel et suppose donc l’accord de l’autre parent. Il n’est donc pas possible à un parent de forcer une religion sur l’enfant en dépit de la protestation de l’autre ou d’obliger une inscription dans un établissement privé religieux. En cas de conflit, le juge peut être appelé pour trancher la question entre les deux parents.
Conclusion :
La diversité des programmes pédagogiques est excellente. Elle favorise le pluralisme de nos sociétés et relèvent même de l’exercice des droits de l’homme que de pouvoir jouir d’un pluralisme éducatif. Toutefois, car l’école est le lieu de construction des croyances les plus intimes, elle peut être un lieu où se construisent des dérives sectaires. Ces dérives viennent d’abord du contenu de l’enseignement qui quitte un terreau commun scientifique et méthodologique pour construire une vérité ésotérique.
Infos pratiques :
La liberté de manifester sa religion ou ses convictions ne peut faire l’objet d’autres restrictions que celles qui, prévues par la loi, constituent des mesures nécessaires, dans une société démocratique, à la sécurité publique, à la protection de l’ordre, de la santé ou de la morale publiques, ou à la protection des droits et libertés d’autrui.
CEDH, Cour (Cinquième Section), KONRAD c. ALLEMAGNE, 11 septembre 2006, 35504/03 :
La Cour estime que si ingérence il y a eu dans les droits des requérants tels que garantis par l’une ou l’autre de ces dispositions, elle est justifiée pour les raisons susmentionnées au regard de l’article 8 § 2 et de l’article 9 § 2 respectivement, puisqu’elle est prévue par la loi et nécessaire, dans une société démocratique, à la sauvegarde de l’intérêt public à l’éducation des enfants.