Tous ont décidé d’aller combattre en Syrie aux côtés des groupes islamistes les plus radicaux liés à Al-Qaeda. David Thomson, reporter à RFI, a longuement interviewé une vingtaine de ces jihadistes français. Leurs témoignages précis permettent d’appréhender un phénomène qui préoccupe, par son ampleur et sa soudaineté, les services de renseignement français.

En moins de deux ans, la Syrie s’est imposée comme la principale «terre de jihad» mondiale, loin devant le Mali, l’Afghanistan et le Pakistan ou, même, la Bosnie et la Tchétchénie des années 90 et 2000. Les apprentis combattants s’y ruent sans préparation, sans avoir jamais manié une arme, persuadés de rejoindre la «terre bénie» et de participer à l’instauration d’un califat qui irait jusqu’à Jérusalem. Ils n’ont, pour la plupart, que très peu fréquenté les mosquées françaises. Clémence, issue d’une famille catholique, s’est convertie seule à 17 ans, après avoir tapé «Allah» sur Google. Brouillée avec ses frères et sœurs, elle s’est mariée religieusement avec un salafiste rencontré sur Internet. Elle bascule peu après dans le jihad, convaincue par la propagande diffusée sur des forums. Cette omniprésence d’Internet, de Facebook et YouTube, se prolonge en Syrie. C’est le «LOL jihad», celui où l’on se photographie avec sa kalachnikov dans un bourg du Nord syrien et où l’on diffuse des films d’exécutions de soldats du régime de Bachar al-Assad tournés avec un smartphone.

Abu Na’ïm, un ex-dealer de banlieue de 23 ans, a pris peur quand il a compris qu’il servirait de «chair à canon». Il s’est réfugié loin des lignes de front, au sein des patrouilles du groupe le plus radical, l’EIIL (l’Etat islamique d’Irak et du Levant), qui tente de faire appliquer les principes de sa charia à la population syrienne. Sans apparemment se rendre compte qu’il fait le jeu de Bachar al-Assad qui assimile depuis le début du soulèvement les opposants à des «terroristes». Ce qualificatif, Abu Na’ïm va jusqu’à le revendiquer après un an passé en Syrie. Il cite Mohammed Merah en exemple et dit vouloir désormais frapper en France.

source : par Luc MATHIEU
LIBERATION.fr