C’était il y a 50 ans et l’histoire fascine toujours autant. Dans la nuit du 8 au 9 août 1969, Sharon Tate et trois de ses amis sont assassinés dans la maison que l’actrice possède à Benedict Canyon avec son mari, le réalisateur Roman Polanski. Une cinquième victime est découverte, un ami venu voir le gardien de la villa. Ce dernier échappera au massacre. Il n’a rien entendu. Il écoutait de la musique. Roman Polanski n’est pas à la maison ce jour-là. Il est à Londres où il prépare son nouveau film. Ce massacre va secouer la population américaine. « Cela a déclenché un état de panique à Los Angeles, parce que tout le monde pensait qu’il y avait maintenant des tueurs en série en liberté qui allaient dans des maisons et massacraient des gens », se rappelle Linda Deutsch, ancienne correspondante de l’agence de presse AP. Sharon Tate est enceinte de 8 mois. Ce qui ne fera pas hésiter la tueuse, Susan Atkins, qui la poignarde de 16 coups de couteau. Elle écrit le mot Pigs (« cochons ») sur la porte d’entrée avec le sang de Sharon Tate. Un autre tueur, Tex Watson aurait déclaré à une victime : « Je suis le diable et je suis ici pour faire son travail ». Un assassinat aux relents sataniques.
Il faudra plusieurs mois aux enquêteurs pour retrouver le tueur, ou plutôt les tueurs. Ils sont quatre, trois femmes et un homme. Ce sont eux qui ont porté les coups aux victimes, mais c’est un homme qui a commandité les assassinats. Son nom : Charles Manson, il est le gourou d’une secte hippie baptisée « La Famille ». Les tueurs sont ses fidèles.
La face sombre de la culture hippie
Roman Polanski est réalisateur. Sharon Tate est actrice. Le couple se rencontre quelques années plus tôt sur le tournage du « Bal des Vampires ». En 1969, elle a 26 ans et dans quelques semaines, ils vont accueillir leur premier enfant. Un couple glamour qui attire l’attention d’Hollywood. Alors ce meurtre va évidemment susciter l’émoi aux Etats-Unis et dans le monde. « C’est un destin de star fauchée en pleine ascension. Elle est belle, elle est jeune, elle symbolise le nouvel Hollywood. Il y a aussi la gravité des faits, un assassinat sauvage dans sa maison, elle est enceinte de 8 mois. Tout ça participe du mythe », explique Hugues Dayez, spécialiste du cinéma de la RTBF.
Un gourou halluciné et toxicomane doté d’un effroyable pouvoir
Au-delà du couple, c’est aussi la psychologie des tueurs et la gravité des faits durant une période hippie qui interpellent. « Ça a rendu les hippies vraiment effrayants », se souvient Peggy Miles, 56 ans, née à Los Angeles. Charles Manson est apparu à son procès comme un gourou halluciné et toxicomane doté d’un effroyable pouvoir de persuasion. Il avait ordonné à ses adeptes de commettre des meurtres dans des quartiers chics peuplés par des Blancs, dans l’espoir de déclencher un conflit racial aux Etats-Unis. « Le même été, c’est Woodstock. L’assassinat de Sharon Tate, c’est en quelque sorte la face sombre de la culture hippie. Le meurtre de Sharon Tate, c’est la fin d’une époque. On voit que les excès de toutes sortes peuvent générer des violences et des personnes comme l’entourage de Charles Manson. C’est la fin d’une certaine insouciance », remarque Hugues Dayez qui ajoute que la presse people de l’époque a également joué un rôle dans l’histoire. « Une presse qui ose dire : « Elle l’a bien cherché. Si ça tombe, ils organisaient des partouses. Il y avait des drogues. » Ce qui est une tragédie, la mort de cette innocente jeune fille, devient quelque chose de crapuleux. Il faudra le procès, cinq ans plus tard, pour que les faits véritables soient mis sur la place publique », constate le journaliste.
Une histoire qui fascine encore
50 ans plus tard, l’histoire captive encore. Cette année, deux films ont comme trame de fond le meurtre de Sharon Tate. Le premier est un film d’horreur. The Haunting Of Sharon Tate est inspiré directement de la nuit du drame. Quentin Tarantino a également choisi d’aborder cet événement dans son nouveau film ‘Once Upon a Time… in Hollywood’. Un long-métrage qui ne fait pas l’unanimité. « À partir d’un fait réel, Quentin Tarantino délire de manière libre. Et la façon dont il délire manque de respect pour la dimension tragique. On comprend que ça suscite une polémique et que l’actuelle épouse de Roman Polanski, Emmanuelle Seigner, ne décolère pas. Il y a une sorte de légèreté de traiter un événement aussi terrible comme un épisode rock’n’roll de l’été 69 », analyse Hugues Dayez.
D’autres ont décidé de faire de cet événement, un vrai business. C’est le cas d’un de Scott Michaels, il est guide touristique à Los Angeles, spécialisé dans les morts célèbres à Hollywood. Avec son bus, il fait le tour des villas où ont habité des stars, aujourd’hui disparues. La maison de Sharon Tate et Roman Polanski a été détruite dans les années 90, mais le massacre qui s’y est déroulé reste l’une des attractions de son tour. « C’est vraiment sans précédent. Je n’ai jamais vu un tel intérêt », assure Scott Michaels à l’AFP. Un succès qui pousse le guide touristique à faire des heures supplémentaires en cette période « anniversaire ». « J’organise des visites supplémentaires, deux à trois en plus chaque semaine, c’est dingue », poursuit-il. Scott Michaels possède aussi un musée dédié à ces morts célèbres d’Hollywood. Sharon Tate y occupe une place importante. « C’est mon affaire favorite. Favorite, ça sonne horriblement, mais c’est bien le cas, je dois l’admettre », dit-il, relevant à quel point toute cette histoire regorge de « rock stars, de vedettes de cinéma, de glamour et de monstres », admet-il.
Charles Manson et ses fidèles ont tous été condamnés à la peine de mort, mais la Cour Suprême de Californie décide, en 1972, que la peine de mort est inconstitutionnelle. leur peine est commuée en prison à vie. Sur les trois assassins, deux sont encore vivants aujourd’hui. Leur gourou, Charles Manson, est décédé le 19 novembre 2017 à l’âge de 83 ans.
source :
RTBF
- Dath ( avec AFP)
le jeudi 08 août 2019