Le 23 juillet 2010, le corps calciné de Concepcion Gomez, 63 ans, est retrouvé dans le domaine du château d’Oublaise, à Luçay-le-Mâle (Indre), à proximité d’un lieu de prière. C’est ce drame qui a mené Olivier, mercredi, devant le tribunal de grande instance de Châteauroux. Ce Tourangeau de 38 ans a comparu pour « non-assistance à personne en danger » et « provocation au suicide suivi d’effet ». « Je n’ai pas l’impression de l’avoir poussé au suicide », a-t-il clamé à la barre.

Et pourtant : deux mois avant l’immolation par le feu de Concepcion, lui et la victime, membres de l’Association internationale pour la conscience de Krishna, ont une conversation. La sexagénaire souffre de la maladie de Parkinson et envisage de mettre fin à ses jours. « Je lui ai dit les conséquences d’une pendaison ou d’une défenestration sur l’âme, raconte Olivier. C’est le pire. »« Pourquoi ne pas avoir tenté de la dissuader ? », demande le tribunal. « J’ai senti qu’elle était décidée et, en même temps, j’avais l’impression d’une forme de chantage. »

Dans l’enceinte du château d’Oublaise, qui accueille une centaine de dévots de Krishna, Olivier soumet alors une méthode à Concepcion qui, pour lui, ne s’apparente pas à « un suicide » : « Rentrer dans un feu permet de libérer son âme, notamment pour les femmes veuves. » Silence. « Je ne pensais pas qu’elle le ferait, je voulais la faire réagir », dira Olivier aux enquêteurs avant de répéter, à la barre : « Pour moi, il était impossible qu’elle fasse un geste pareil. »

Des conseils pratiques

Selon les enquêteurs, Olivier va néanmoins donner à son amie « des conseils pratiques pour la constitution d’un bûcher ». « Utiliser des bûches de bois de plus de 30 kg et du beurre clarifié (NDLR : très inflammable, il est utilisé lors de certains rituels hindous.) », détaille le président du tribunal, Rémi Figerou. Le procureur de la République, Karim Mohamed, requiert contre le prévenu sept mois de prison avec sursis. « Il lui a donné les moyens de se tuer », tonne-t-il. Ce qu’elle a fait « est quelque chose d’horrible », finira par convenir le prévenu. Olivier a été condamné à douze mois de prison avec sursis et 250 € d’amende.

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Repères

>> 1995. Le rapport parlementaire de la commission d’enquête sur les sectes du 22 décembre 1995 cite l’Association internationale pour la conscience de Krishna (AICK) en l’associant à la « seconde vague » des sectes déferlant « à la fin des années 1960, […] en provenance des États-Unis ». Il rappelle sa condamnation pour « fraude fiscale » – citant l’arrêt du 19 octobre 1989 de la cour d’appel de Bourges – et les témoignages « recueillis sur la journée type d’un adepte » qui décrit des procédés destinés à « affaiblir l’individu en lui imposant une discipline très rigoureuse, ou de réduire son esprit critique en l’astreignant à des actes ou des prières répétitifs afin d’obtenir sa complète obéissance ».

>> 2005. L’AICK n’apparaît dans aucune liste officielle de sectes en France. Une circulaire du 27 mai 2005 relative à la lutte contre les dérives sectaires signée par Jean-Pierre Raffarin estime que « l’évolution du phénomène sectaire […] rend la liste de mouvements annexée au rapport parlementaire de 1995 de moins en moins pertinente ». Elle préconise « plutôt que de mettre certains groupements à l’index, d’exercer une vigilance particulière sur toute organisation qui paraît exercer une emprise dangereuse pour la liberté individuelle de ses membres ».

Source : La Nouvelle République.fr par Bertrand Slézak