Vendredi 9 avril 2010

Saint-Denis – Le procès de Juliano Verbard et de ses adeptes s’est ouvert ce matin à 8h30 devant le tribunal correctionnel de Saint-Denis, en présence de tous les prévenus. A la demande de certains avocats, les juges ont prononcé le huis clos partiel. Le public a donc été prié de quitter la salle d’audience, à l’exception des représentants de la presse et d’un groupe d’étudiants.

Comme lors de chaque déplacement de l’ancien gourou pédophile, surnommé “Petit Lys d’amour”, plusieurs hommes cagoulés et puissamment armés du GIPN assurent la sécurité de l’audience, en renfort des effectifs habituels.

L’audience a commencé par une présentation succincte des dix prévenus (quatre hommes et six femmes), dont quatre sont actuellement en détention: Juliano Verbard, son compagnon Fabrice Michel, le père de ce dernier, Alexin Jusmy Michel, ainsi que Marie-Lucie Ferrère, l’épouse d’Alexin Michel.

Les faits reprochés aux prévenus sont des violences aggravées, commises en novembre 2006, tout d’abord au domicile familial à Saint-Gilles-les-hauts, puis dans une maison vers le Maïdo. Circonstances aggravantes: ils ont été commis en réunion et sur un mineur de moins de 15 ans, en l’occurrence un garçon de 12 ans, dont les parents figurent parmi les prévenus.

L’affaire a commencé par la révélation par la victime à une psychologue de violences, puis de viols. Le tribunal correctionnel n’est compétent que pour juger les faits de violences, les viols, faits de nature criminelle, devant être abordés par une cour d’assises.

Juliano Verbard et Fabrice Michel comparaîtront à la fin du mois devant la cour d’assises pour y répondre de ces viols.

Brûlures à la gazinière

La victime avait été désignée par le gourou de la secte comme son “successeur”. Ce qui n’a pas empêché les adeptes de le rosser copieusement: gifles, flagellation avec une serviette imbibée d’eau brûlante, coups de poings et coups de pieds ont été infligés au garçon par plusieurs membres de la secte, et cela avec la participation active de ses parents. Les tortionnaires -Fabrice Michel et Juliano Verbard en tête- sont allés jusqu’à lui brûler la paume de la main et le talon sur une gazinière. Ils l’ont même déculotté et menacé de le faire asseoir sur le brûleur, lui approchant les fesses à 10 cm de la flamme…

Les femmes n’étaient pas en reste: certaines ont reconnu avoir giflé, frappé et bousculé l’enfant.

Selon les adeptes, il s’agissait d’une sorte de “correction fraternelle” infligée aux membres de la communauté accusé d’avoir des conduites déviantes. Une correction qui, au fil de l’audience, est apparue comme une séance de torture. Ecchymoses, hématomes, brûlure ont été constatés par un médecin auquel on avait dit que l’enfant avait été agressé par d’autres jeunes.

Motif de ces violences: le garçon aurait eu le tort de fréquenter à l’école la précédente victime du gourou (pour lequel ce dernier a été condamné pour viol) et d’avoir flirté avoir une petite voisine.

Certains prévenus ont assuré qu’ils n’étaient pas présents lors des scènes de violences, aussitôt contredits à l’audience par les autres, notamment par les parents de l’enfant. Interrogés par le président, les quatre prévenus déjà en détention (Juliano Verbard, Fabrice Michel et ses parents) se sont contentés de répondre mécaniquement: “Je n’ai rien à dire”.

Certains prévenus ont regretté leurs gestes, affirmant qu’ils avaient agi ainsi car ils étaient “menacés de mort” par le gourou.

Aujourd’hui âgé de 15 ans, la victime a confirmé à l’audience les violences qu’il a subies et la présence sur les lieux des prévenus, y compris ceux qui nient farouchement.

Après l’examen des faits qui s’est poursuivi jusqu’à 10h15, le tribunal a commencé à s’intéresser à la personnalité des prévenus. Outre les quatre personnes en détention, il s’agit de Serge et M.-Rose B., les parents de la victime (*), de Marie-Noëlle Latchoumane, de Sandrine Hoarau, de Corinne Michel et de Claire-Marie Madeleine Li-Tin-Heve Li-Tsu-Ho.

(*) Nous ne révélons pas l’identité des parents pour protéger l’anonymat de la victime

[http://www.lequotidien.re/actualites/en-direct/99866-justice-proces-verbard-cela-apparente-des-actes-de-barbarie.html->http://www.lequotidien.re/actualites/en-direct/99866-justice-proces-verbard-cela-apparente-des-actes-de-barbarie.html ]

LE QUOTIDIEN DE LA REUNION ET DE L’OCEAN INDIEN : 09/04/10 –

{{“Cela s’apparente à des actes de barbarie”}}

Saint-Denis – Le procès de Juliano Verbard, alias “Petit Lys d’amour”, et de neuf de ses adeptes pour des violences commises en réunion sur un enfant de 12 ans s’est poursuivi ce matin après une suspension d’audience.

L’avocat de la partie civile, Me Patrice Sandrin, a salué “le courage de la victime d’avoir dénoncé les faits, malgré la terreur qui régnaient parmi ces personnes à l’époque”, avant de dénoncer “la lâcheté de ces personnes jugées aujourd’hui. Je n’en ai entendu que trois qui ont présenté des excuses, alors que d’autres nient encore aujourd’hui la réalité des faits. C’est un deuxième affront fait à la victime. Les prévenus n’assument pas leurs actes”.

Puis l’avocat reprend le douloureux récit des faits. Il raconte “les cris, la peur, l’humiliation, la terreur…”

Me Cendrin s’est adressé aux juges: “Votre décision est crainte par le garçon, car ses parents sont parmi les prévenus (…) Pour ne pas rajouter des problèmes financiers à cette famille, je ne demande à l’encontre des parents qu’un euro symbolique de dommages et intérêts”.

“Aujourd’hui, ce n’est pas le procès d’une secte, a soutenu Danièle Braud, la représentante du parquet en préambule de son réquisitoire. La question est d’essayer de comprendre comment on peut traiter ainsi un enfant de 12 ans. (…) Je ne peux pas m’empêcher à l’époque des camps de concentration. Là aussi, personne n’avait rien vu, rien entendu de ce qui se passait alors”.

“Cela s’apparente à des actes de barbarie, a-t-elle conclu après avoir relu les déclarations de la victime. Ce sont des actes sadiques. Ils avaient très envie de faire mal (…) On est même plus à l’époque du Moyen Âge, on est à la préhistoire. On a du mal à imaginer une telle violence de groupe, effrayante”.

Rappelons que les faits évoqués lors de ce procès sont deux épisodes de violences commises fin novembre 2006, durant la cavale du gourou. Le premier s’était déroulé au domicile familial de l’enfant, à Saint-Gilles-les-hauts, le second dans une autre maison, une “planque” du gourou située près du Maïdo et où l’enfant avait été emmené de force.

Danièle Braud a requis des peines allant de 3 mois à 12 mois de prison ferme à l’encontre des prévenus.

Place aux avocats de la défense

Après les réquisitions, ce sont les avocats de la défense qui ont commencé leurs plaidoiries peu avant 12h30.

Me Bentolila a demandé la relaxe de sa cliente, Sandrine Hoarau, ou, à défaut, une peine inférieure à celle des époux B.: “Ce sont les parents qui sont les plus responsables car ils ont livré leur enfant en pâture”.

Pour Me Mardenalom, l’avocat des parents, les choses ne sont pas aussi simples: “On doit insérer les faits dans un contexte sectaire. Mes clients ont complètement délégué leur rôle parental. Ils n’ont participé qu’aux premiers faits de Saint-Gilles les hauts, beaucoup moins graves que ce qui s’est passé plus tard au Maïdo. Aujourd’hui, le lien entre la victime et ses parents a été restauré”.

L’audience a été suspendue et devait reprendre à 14 heures.