Le gouvernement avait jusqu’au 30 septembre pour demander un renvoi de ce dossier devant la grande chambre de la Cour européenne des droits de l’homme (CEDH). Il y a renoncé, ouvrant la voie à des négociations, dont l’issue devra être présentée à la CEDH dans les trois mois.
En juin (lire l’article paru dans Le Monde du 2 juillet 2011), après des années de procédures, la CEDH avait reconnu que le gouvernement français avait violé l’article 9 de la Convention européenne sur la liberté religieuse, dans ce dossier de redressement fiscal, dont le montant s’élève aujourd’hui, avec les pénalités, à 57,5 millions d’euros. Après l’inscription des TJ sur la liste des sectes établi en 1995 par un rapport parlementaire, jugé depuis caduque, l’association avait en effet fait l’objet de contrôles fiscaux, entraînant une taxation des « dons manuels » – les offrandes des fidèles -. Le contentieux devant la CEDH portait sur la question de savoir si ces offrandes devaient ou non bénéficier de l’exonération fiscale qui prévaut pour les dons et legs faits aux associations cultuelles. La cour a reconnu dans son arrêt que l’article du code général des impôts, invoqué pour la taxation, n’était ni assez « précis » ni assez « prévisible ».
Les négociations qui vont s’ouvrir devraient porter sur plusieurs points : la mainlevée des hypothèques judiciaires portant sur tous les biens immobiliers de l’association, le remboursement des sommes saisies sur ses comptes bancaires (4,5 millions d’euros) et l’annulation définitive du redressement fiscal. Les Témoins de Jéhovah pourraient aussi demander des dommages pour préjudice moral. L’association, qui estime être « harcelée » depuis 1995 par les organismes de lutte anti-sectes mis en place par les gouvernements successifs, (aujourd’hui la Mission de vigilance et de lutte contre les dérives sectaires, Miviludes) et par plusieurs députés engagés sur ces questions, espère en outre que cet épisode judiciaire mettra un terme aux mises en cause publiques dont elle est régulièrement l’objet. La Miviludes considère toujours problématique le refus de transfusion sanguine des Témoins de Jéhovah.
Georges Fenech, président de la Miviludes, qui souhaitait que le gouvernement renvoie l’affaire devant la grande chambre de la CEDH, nous a indiqué « prendre acte des satisfactions judiciaires » obtenues par les TJ ces dernières années. « Il faut désormais tirer les conséquences de l’arrêt de la CEDH et avoir des procédures fiscales irréprochables à l’égard de ces organisations ».
Aujourd’hui, reste à régler la question des aumôniers de prison, que réclament les Témoins de Jéhovah pour répondre aux besoins de la centaine de ses fidèles actuellement incarcérés. Après plusieurs refus du ministère de la justice (lire l’article paru dans Le Monde du 1er juin 2011) de leur ouvrir cette possibilité, la décision est désormais entre les mains du Conseil d’Etat.
Source : Le Monde (Blog) par Stéphanie Le Bars