De temps en temps, les chasseurs l’apercevaient nu en train d’embrasser les arbres dans la forêt de cette petite commune flamande à quelques encablures de Bruges. Stijn Saelens, 34 ans, agent immobilier, a disparu depuis plus d’une semaine de son domaine, le château Carpentier. Une demeure romantique désormais jalousement gardée par la police fédérale.
Un homme d’affaires au style non conventionnel, couvert de dettes et qui prêchait un strict retour à la nature. Au point qu’il avait prévu d’embarquer toute sa famille vers l’Australie pour y fonder une colonie loin de toute civilisation. Il devait y faire un voyage de repérage avec son épouse. Le départ était programmé vendredi dernier.

Des sommes colossales investies en Bourse

Aujourd’hui, les enquêteurs de la police fédérale et l’Office des personnes disparues ne savent pas si sa disparition est liée à un meurtre, à un enlèvement ou à une mise en scène. Seule certitude pour les policiers, ils ont bien retrouvé le passeport du disparu dans son château. « On ne sait pas bien ce qu’il faisait. On le savait riche car il avait acheté le domaine en 2004 pour 2 M€ et il en a dépensé 700000 € de plus pour y faire des travaux », souligne Hendrik Verkest, le bourgmestre de cette commune cossue.

Officiellement, Stijn Saelens est un agent immobilier prospère qui gère quatre entreprises. Sa spécialité, les lotissements industriels, selon ce qu’il avait confié à de rares commerçants de la commune. Seulement voilà, ces quatre entreprises affichent toutes des déficits depuis plusieurs mois. Les pertes financières s’élèvent à plus de 1 M€ selon les premières expertises.

Mais depuis quelques mois, Stijn Saelens, issu d’une très riche famille des Flandres, qui travaillait « en dilettante » selon une connaissance, était obsédé par la Bourse. Il y aurait investi de sommes colossales et accumulé les pertes, notamment sur des investissements agricoles.

A Wingene, on le décrit comme « affable », mais aussi « perturbé ». Ce père de quatre enfants s’est marié très jeune à une doctoresse, Elisabeth Gyselbrecht, elle-même fille d’un médecin de la région. Une famille bourgeoise sans histoire et surtout connue pour son élevage de pigeons de concours, la passion depuis 1977 d’André Gyselbrecht, beau-père de Saelens. Un élevage qui accumule les récompenses en Europe : il a été couronné par l’Aile d’or en 1995, le Graal de tout éleveur de pigeons. Ces oiseaux, qu’il avait baptisés du nom de champions : Nadal, Contador ou encore Schumacher. Mais Stijn Saelens était tenu à distance par sa belle-famille en raison de ses projets.
Au mois de décembre, l’agent immobilier avait fait un voyage en Inde pour découvrir des écovillages. A l’image de ceux que le mouvement écologiste Ringing Cedars, dont il était un adepte convaincu, a mis en place dans la taïga sibérienne. Un mouvement qui plaide pour une symbiose complète de l’homme et de la nature.

source : http://www.leparisien.fr/espace-premium/actu/l-etrangepersonnalite-du-chatelain-disparu-07-02-2012-1849279.php
Jean-Marc Ducos | LE PARISIEN 07.02.2012, 07h00