Le président du Conseil pontifical pour les laïcs a remis le 5 juin un long document aux responsables des Béatitudes pour les exhorter à la vigilance

A Rome, on est tout à fait conscient des difficultés internes auxquelles se trouvent confrontées aujourd’hui les Béatitudes, qui y sont d’ailleurs sous observation. Association internationale de fidèles de droit pontifical depuis 2002, la communauté relève du Conseil pontifical pour les laïcs et non plus directement de son diocèse d’origine. Ce qui explique qu’en cas de difficulté, les évêques français renvoient la balle à Rome.

Ce statut, explique-t-on, lui a été donné de manière à reconnaître sa dimension internationale et tenir compte de sa présence dans beaucoup de pays du monde. Mais il ne lui a été donné qu’à titre expérimental. Les responsables de la communauté ont, en vain, demandé une approbation définitive de leurs statuts : à la fin de 2007, Rome a décidé de prolonger cette expérimentation encore deux ans.

À la suite d’un certain nombre de plaintes remontées jusqu’à Rome, le Conseil pontifical avait déjà écrit une lettre aux responsables concernant quatre points délicats. Étaient notamment évoqués la nature des engagements – des laïcs, des consacrés, des religieux, des prêtres et des familles vivent ensemble –, le problème de l’insertion des familles avec leurs enfants dans ces communautés, et aussi les pratiques psycho-spirituelles des Béatitudes, semblant donner lieu à des dérives.

Problème des relations entre différents états de vie

Sans doute cette première lettre n’a-t-elle pas été suffisamment entendue et une nouvelle réunion a été convoquée le 5 juin dernier, à laquelle participaient le modérateur de la communauté, le conseil international, le responsable provincial, l’archevêque d’Albi, Mgr Pierre-Marie Carré, ainsi que le cardinal Stanislaw Rylko lui-même, président du Conseil pontifical pour les laïcs, signe du sérieux avec lequel le problème est considéré ici.

Ce dernier a lu un long document, « très clair », affirme-t-on, comportant toute une série d’exhortations et de recommandations à suivre pour le mouvement. Revenait notamment le problème des relations entre membres de la communauté vivant différents états.

Côté français, la Conférence épiscopale n’est pas restée inactive. Un travail de réflexion a été engagé avec le groupe d’accompagnement du Renouveau charismatique au sein du Conseil pour les mouvements et communautés de fidèles. Des « repères » – qui ne visent pas exclusivement les Béatitudes – ont été établis en avril 2005 sous la responsabilité de la Commission épiscopale pour la vie consacrée, du groupe d’accompagnement pour le Renouveau, et des Conférences des supérieurs majeurs.

En France comme à Rome, on estime que les Béatitudes font un bon travail

Cette note de trois pages, intitulée « Rapports du psychologique et du spirituel dans les communautés », dénonce l’utilisation de « thérapie psychologique censée aboutir à une guérison » mais qui provoque souvent « des ruptures avec les familles ». Nulle trace pourtant dans ces divers documents des affaires de suicide évoquées dans certains journaux français la semaine dernière. À Rome, on affirme ignorer tout de cela et on s’étonne seulement, s’il y a des cas vraiment sérieux, que cela n’ait pas été traité au plan judiciaire.

Les Béatitudes ayant un statut pontifical, il revient au Conseil pontifical pour les laïcs de prendre, le cas échéant, des sanctions canoniques. Mais on n’en est pas là : « Nous essayons d’aider la communauté, et de préserver ce qu’il y a de mieux chez elle. »

Car, en France comme à Rome, on estime que les Béatitudes font un bon travail, notamment auprès de populations très marginalisées ou très pauvres. De ce point de vue, la prochaine assemblée générale du mouvement, qui se tiendra à Lourdes en novembre, sera cruciale. Rome a annoncé l’envoi d’un observateur. Et pour la suite, il est envisagé qu’un évêque français émérite (c’est-à-dire à la retraite) soit chargé d’accompagner de plus près le mouvement, pour l’aider à mieux appliquer les directives romaines.

Isabelle DE GAULMYN (avec Anne-Bénédicte HOFFNER), à Rome

http://www2.la-croix.com/article/index.jsp?docId=2341567&rubId=4078

LA CROIX 24/06/2008