C’est le 9 août 1969, il y aura 50 ans vendredi prochain, que l’actrice Sharon Tate, alors enceinte de huit mois, ainsi que quatre autres personnes ont été massacrées par des membres de la famille Manson.

Délinquant récidiviste qui avait passé la majorité de sa vie d’adulte en prison, Charles Manson voulait, par ces meurtres (qui, croyait-il, allaient être attribués à des Noirs), provoquer une terrible guerre raciale.

THIS IS THE END

« Les Noirs et les Blancs vont s’entretuer, disait-il à ses adeptes qui étaient la plupart du temps gelés comme une balle. Nous, pendant ce temps, nous allons nous réfugier dans un trou au beau milieu du désert.

« Et lorsque les Noirs (qui sont les plus forts) gagneront cette guerre, lorsqu’ils auront exterminé tous les Blancs, ils se retrouveront Gros Jean comme devant, car ils n’auront pas l’intelligence suffisante pour construire une civilisation à partir de rien.

« Alors, nous sortirons de notre refuge et nous deviendrons maîtres du monde ! »

Manson (un musicien raté qui fréquentait l’un des membres fondateurs des Beach Boys) appelait son plan « Helter Sketler », d’après un tube des Beatles qui, disait-il, communiquaient avec lui par le biais de messages codés cachés dans leurs chansons.

Cette boucherie – avec le meurtre, quatre mois plus tard, d’un jeune Noir par des membres des Hells Angels lors d’un concert des Rolling Stones – allait sonner la fin du rêve « Flower Power » des années 60. Du jour au lendemain, le rose allait se transformer en noir.

« This is the end, beautiful friend / Of our elaborate plans, the end / And all the children are insane », chantait prophétiquement Jim Morrison en 1967, sur le premier album des Doors.

« I see a red door and I want to paint it black », chantaient quant à eux les Stones un an plus tôt.

Comme si ces artistes voyaient déjà tout ce que la culture hippie, supposément pacifique et antiviolente, pouvait avoir de démoniaque, de tragique.

UN TICKET POUR L’ENFER

On croyait que la drogue, la sanctification des marginaux et le rejet de toute autorité allaient tout droit mener au paradis.

C’est le contraire qui se produisit. Ce gros trip hédoniste et pseudo-révolutionnaire a mené directement en enfer. Quand tout revole, plus rien ne tient.

C’est la face sombre des utopies. Le communisme a mené aux goulags.

Le nazisme, aux fours crématoires. Le maoïsme, à la famine. Les promesses de la vie éternelle, aux guerres de religion. Nommez-moi un gourou et je vous montrerai des barils de Kool-Aid remplis de cyanure de potassium. L’histoire de l’humanité est remplie de despotes déguisés en sauveurs.

Quoiqu’en disent les militants en culottes courtes qui se croient cool parce qu’ils portent un t-shirt à l’effigie de Che Guevara, ce ne sont pas les révolutionnaires qui font avancer le monde, mais les réformistes.

Rien de plus inquiétant que les idéologies annonçant la venue d’un « nouvel homme » débarrassé des « anciennes valeurs ». À force de vouloir faire table rase de tout, on se retrouve devant rien.

ÉVITER LE PIRE

Personnellement, je ne veux pas d’un monde parfait. Juste d’un monde meilleur. C’est la seule façon d’éviter le pire.

source :

Journal de Montréal

RICHARD MARTINEAU

Dimanche, 4 août 2019

https://www.journaldemontreal.com/2019/08/04/la-face-sombre-des-annees-60