Le message est clairement adressé à l’Élysée, après la polémique déclenchée par les propos tenus en février à VSD par la directrice de cabinet de Nicolas Sarkozy, Emmanuelle Mignon, selon lesquels les sectes « sont un non-problème » en France.
Démentis par l’intéressée, ces propos ont suscité un tollé, alors que le camp laïc s’inquiétait déjà des interventions régulières du chef de l’État sur la religion.

Pour la MIVILUDES, le plus grand risque serait de se laisser entraîner sur le terrain religieux, « terrain de prédilection des groupes sectaires ». « Ne nous laissons pas leurrer et nous ne trompons pas de victimes », souligne la mission contre les sectes.
Ce cinquième rapport dénonce notamment les « actions de lobbying effrénées » des mouvements sectaires à l’international, pour dénoncer la lutte contre les dérives sectaires menées en France.
Il prend l’exemple de « l’instrumentalisation régulière par la mouvance sectaire » de la conférence annuelle à Varsovie de l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE) consacrée à « l’examen de la dimension humaine ». La scientologie, les témoins de jéhovah, les raéliens ou les moonistes utilisent cette tribune « pour tenter de délégitimer la vigilance des pouvoirs publics » face aux dérives sectaires en invoquant le respect de liberté de religion.
Le rapport fait également le point sur le phénomène du satanisme qui concernerait de près ou de loin environ vingt-cinq mille personnes en France, dont 80 % de moins de 21 ans.
Autre domaine analysé par la MIVILUDES : les pratiques d’autosuggestion employées par de pseudo-psychothérapeutes. Ces praticiens mal intentionnés manipulent leurs patients au moyen de « faux souvenirs induits » dans le cadre de démarches de développement personnel, professionnel ou de psychothérapie. Ce « phénomène dangereux » né aux États-Unis consiste à introduire dans la tête du patient de faux souvenirs de maltraitance, d’abus sexuels ou encore d’enlèvement par des extra-terrestres. Cette tendance progresse en France, et concerne à 80 % des jeunes femmes.
Le risque d’embrigadement existe aussi avec l’application au coaching en entreprise de la théorie des « constellations systémiques », inventée par l’Américaine Virginia Safir à partir de l’observation des tribus en pays zoulou : le groupe – en l’occurrence l’entreprise – fonctionne comme un corps biologique où chacun a un rôle précis. Une des dérives est de considérer que chacun fait partie du groupe et que c’est au groupe de tout décider pour lui.
Dans cette optique, la MIVILUDES s’est intéressée à la vente multiniveaux, qui consiste à vendre des produits ou services, le plus souvent liés au bien-être, et à convaincre les acheteurs de devenir vendeurs à leur tour.
Ils n’ont pas de contrat de travail, sont rémunérés au pourcentage, et les plus convaincus finissent par quitter leur travail et ne plus fréquenter que les membres du réseau.
La MIVILUDES fait enfin le point sur l’effet de mode en faveur des pratiques néo-chamaniques faisant appel à la prise non contrôlée de produits hallucinogènes. Après l’ayahuasca et l’iboga, étudiés dans les précédents rapports, un chapitre est consacré cette année au datura, nouvelle plante vénéneuse en vogue utilisée par des prétendus chamans.

La Voix du Nord – Edition du vendredi 4 avril 2008