Délégation régionale du CCMM, l’association Info-sectes Aquitaine a lancé le 19 septembre 2013, à Bordeaux, une campagne de prévention pour sensibiliser les professionnels, les jeunes, les personnes âgées, aux risques de dérives sectaires de plus en plus présents dans le domaine de la santé. Il s’agit de la première campagne de ce genre en France.
« Depuis des années nous assistons impuissants à la multiplication des faux thérapeutes et des charlatans de tout poil, c’est un fléau énorme dont les victimes ne cessent de croître », a indiqué jeudi à la presse Daniel Picotin, président d’Info-sectes Aquitaine, à l’occasion du lancement de la campagne de sensibilisation. Des représentants de l’Ordre des Médecins, de l’Ordre des Kinésithérapeutes, de l’Agence Régionale de Santé (ARS) et du rectorat étaient présents à Bordeaux pour l’occasion, affirmant leur souhait commun de se poser en relais de l’opération.
Selon le rapport 2010 de la Miviludes :
– 4 Français sur 10 ont recours aux médecines dites alternatives ou complémentaires, dont 60% parmi les malades du cancer ;
– près de 400 « pratiques non conventionnelles à visées thérapeutiques » sont proposées en France ;
– 1.800 structures d’enseignements ou de formation sont « à risque » ;
– 400 « psychothérapeutes » autoproclamés n’ont suivi aucune formation et ne sont inscrits sur aucun registre ;
– 3.000 médecins seraient en lien avec la mouvance sectaire.
« Respirianisme », « libération des cuirasses », « fasciathérapie », traitements contre le cancer à base de jus de citron ou de jus de légumes, « instinctothérapie »… Dans son rapport 2010, la Miviludes (mission interministérielle de vigilance et de lutte contre les dérives sectaires) a répertorié près d’une trentaine de méthodes à risque parmi les plus répandues, tout en reconnaissant que de nouvelles pratiques font chaque jour leur apparition, notamment sur internet.
Une situation alarmante
Parmi les signalements auprès de la Miviludes, près d’un quart concernent la nébuleuse de la santé. Un chiffre en constante augmentation, selon Martine Amelineau, secrétaire générale d’Info-sectes Aquitaine.
« Depuis un an, notre association est submergée par des affaires liées à la santé. Cela tient à l’essor d’Internet, mais également la multiplication des salons du bien-être en France. On y promeut tout et n’importe quoi, sans vérification, et beaucoup de gens s’y font recruter. Ce sont de véritables pièges pour des personnes vulnérables ou en quête de performance. »
« Notre association est confrontée chaque jour aux conséquences de ces dérives », poursuit Martine Amelineau. « Dans le meilleur des cas, si l’on peut dire, il s’agit de divorces ou d’abandon d’enfants. Dans les pire, il s’agit de suicides, ou de situations d’abandon de traitements médicaux. Pour l’opinion publique, cela reste des situations marginales et c’est une erreur grossière. Ce n’est pas parce que personne ne parle de ce scandale – un véritable scandale d’état – que le fléau n’existe pas ! La situation est réellement alarmante. »
Or, de l’avis de Daniel Picotin, « les moyens de lutte légaux » sont encore limités. « Il est donc indispensable de mettre en place des outils de prévention [auprès des populations fragiles] ».
Prendre les devants
Dans son rapport rendu en avril 2013, une commission d’enquête du Sénat sur le sujet préconisait l’établissement d’une liste de notices descriptives des pratiques à risques pour lancer une campagne nationale d’information. « Devant l’urgence de la situation », explique Martine Amelineau, « nous prenons les devants au niveau régional ».
« L’objectif de cette campagne est d’activer des réseaux, et de placer des gardes fous dans des points stratégiques et sérieux. Aujourd’hui, les rapports de la Miviludes ne sont connus que par quelques antennes régionales. Ils n’atteignent pas les correspondants qu’il faut, comme les médecins de quartier. Voilà pourquoi, dans un premier temps, notre action vise à sensibiliser les professionnels de santé à ce problème. Nous avons conçu une brochure qui serait distribuée dans les salles d’attente des médecins, des kinésithérapeutes, des notaires, dans les maisons de retraite, dans les cliniques et les hôpitaux. L’objectif est que les patients posent les bonnes questions à leurs médecins traitants et ainsi évitent de se mettre en danger. » Les affiches et les brochures de la campagne seront, dans un second temps, distribuées dans les lycées.
Le mot d’ordre de la campagne est simple : « Ouvrez l’oeil ! Attention aux traitements miracle non validés scientifiquement, ils peuvent être dangereux ». Avant de commencer un traitement, « il faut impérativement demander conseil à son médecin », conclut Martine Amelineau. « Nous sommes dans un pays où le personnel médical est formé. Il faut se méfier de instituts de formation autoproclamés, des diplômes fumeux qui ne représentent rien. »
source : »allo docteur » par Florian Gouthière, avec AFP rédigé le 23 septembre 2013, mis à jour le 23 septembre 2013