C’EST l’épilogue d’un scandale qui aura duré près de dix ans et entaché la réputation d’un ordre – la Légion du Christ – qui fut cher au pape Jean Paul II et reste très introduit au Vatican.

Avec l’" approbation " de Benoît XVI, la congrégation pour la doctrine de la foi a relevé de tout " ministère public ", vendredi 19 mai, le prêtre mexicain Marcial Maciel, 85 ans, fondateur, en 1941, des Légionnaires du Christ. Il est accusé d’abus sexuels commis, dans les années 1940 à 1960, sur de jeunes séminaristes. Il a été invité à " se retirer et mener une vie discrète de prière et de pénitence ".

C’est le symbole d’un catholicisme puissant et conquérant, en Espagne et sur le continent américain (Nord et Sud), qui est ainsi frappé. Marcial Maciel avait réussi à faire d’un petit groupe de catholiques mexicains, élevés au souvenir de la " guerre des cristeros " (chrétiens) contre les révolutionnaires au pouvoir, une congrégation reconnue par le Vatican dès 1965, riche aujourd’hui de 500 prêtres, 2 500 séminaristes, 45 000 laïcs (Regnum Christi, bras séculier de la Légion), de nombreux établissements scolaires et une quinzaine d’universités (deux à Rome, trois au Mexique).

Venues d’adeptes en rupture avec la Légion, les premières plaintes contre le Père Maciel remontaient aux années 1950, mais n’avaient alors rien à voir avec la pédophilie. Un " procès canonique ", mené par le Vatican, l’avait innocenté. En 1997, les accusateurs sont revenus à la charge, cette fois au motif d’abus sexuels. Le Vatican a refusé tout nouveau procès, mais autorisé, en 2001, une " investigation des accusations ", pour reprendre les termes de l’historique de l’affaire publiée vendredi.

C’est ce dossier de la Congrégation de la doctrine de la foi, alors dirigée par le cardinal Ratzinger, futur Benoît XVI, qui vient d’aboutir à une sanction aussi grave. SOUTENU PAR JEAN PAUL II Vénéré par les Légionnaires comme un saint vivant, le Père Maciel n’a jamais cessé de proclamer son innocence. " Devant Dieu, affirmait-il en avril 2002, je déclare catégoriquement que ces accusations sont fausses. Je n’ai jamais eu le genre de comportement abominable dont on m’accuse.

" En janvier 2005, il avait toutefois renoncé à la direction de l’ordre au profit d’Alvaro Corcuera, un autre prêtre mexicain. Ce soupçon de pédophilie avait reçu d’autant plus d’écho que les Légionnaires sont souvent mis en cause pour leur volonté d’endoctrinement des jeunes garçons et la sévérité quasi militaire de leur discipline.

Mais Jean Paul II, qui appréciait leur efficacité dans son programme de " nouvelle évangélisation " du monde, n’avait jamais ménagé son soutien à la Légion et à son fondateur, louant encore peu de temps avant sa mort, " la paternelle affection et l’expérience " du Père Maciel. Dans un tel contexte, le choix de la clarté qui vient d’être fait par Benoît XVI n’en est que plus significatif.