Dès le début de son procès, l’accusé qui se fait appeler “Tang” et qui a dirigé durant plus de vingt ans une communauté dans le Lot-et-Garonne puis en Ariège, a contesté tous les faits qui lui sont reprochés. Il a notamment assuré que les relations sexuelles qu’il avait pu avoir avec des membres de son groupe, exclusivement des femmes, étaient “parfaitement consenties” et que celles-ci avaient toujours eu “leur libre-arbitre et leur libre-choix”.

“Je suis chrétien, mystique, je crois à la réincarnation, aux anges et aux puissances du bien et du mal. Je réfute ce que l’on dit de moi, que je serais un gourou, un chef de secte qui aurait exercé un droit de cuissage”, a déclaré mercredi à la cour et aux jurés Robert Le Dinh. Evoquant les nombreuses relations sexuelles qu’il a eues depuis l’âge de 20 ans, l’accusé a assumé être “un libertin” et “être libre”.

“J’ai toujours prévenu ma première compagne qui est restée vingt ans à mes côtés que je serai courtisé et que moi-même, je draguerai d’autres femmes. Mais je n’ai jamais utilisé ma foi chrétienne pour influencer ou conditionner des personnes. Je n’en ai jamais eu besoin”, a-t-il assuré, démentant les accusations de parties civiles qui font état de relations sous contrainte physique ou morale”.

Concernant les abus de faiblesse et les sommes d’argent qu’il aurait perçues du groupe, Robert Le Dinh a déclaré qu’il n’avait “jamais rien soutiré à qui que ce soit”.

Né en 1959 à Villeneuve-sur-Lot (Lot-et-Garonne), ce fils d’ouvrier bouddhiste d’origine vietnamienne et d’une mère française catholique, dit avoir reçu un message divin du Christ en 1982. “Je dormais lorsque j’ai été réveillé par une lumière, il y avait le Christ dedans. Il m’a chargé d’une mission mais celui-là même qui n’a pas vu le Christ a aussi une mission”, a expliqué Robert Le Dinh en précisant qu’il était bouddhiste jusqu’à cette apparition et que dès lors son “mysticisme chrétien avait pris le pas”.

Après cette “révélation” et pour dispenser son “enseignement mystique chrétien”, Robert Le Dinh a formé en 1984 une communauté “pour la paix dans le monde” à Madaillan (Lot-et-Garonne) qui s’est par la suite déplacée, en 2005, à Bonac-Irazein, près de Castillon en Ariège.

Durant vingt ans, le groupe de Tang a également donné naissance à diverses associations caritatives ou humanitaires telles que l’ADLEIF (Association de défense des libertés d’expression dans l’institution française), citée dans le rapport parlementaire sur les sectes en 1995. Tang et son groupe ont également fait l’objet d’une mention dans le rapport 2010 de la Miviludes (Mission interministérielle de vigilance et de lutte contre les dérives sectaires).

L’affaire Tang avait démarré en avril 2007, lorsque deux de ses anciens disciples, un couple de fonctionnaires qui avait rejoint le groupe dès sa création en 1984, avait dénoncé ses agissements auprès des gendarmes de Saint-Girons (Ariège). Le 5 septembre 2007, Robert Le Dinh était placé en garde à vue et, deux jours plus tard, mis en examen pour viols et agressions sexuelles aggravés, abus de faiblesse aggravé et finalement placé en détention provisoire.

Le 18 septembre 2010, Robert Le Dinh avait été condamné à 15 ans de réclusion criminelle, la peine maximum pour des viols, par la cour d’assises de Foix. Incarcéré à l’issue du délibéré, il avait fait appel de sa condamnation.

Lors de ce procès en appel, Me Edouard Martial, l’un de ses trois avocats, a déclaré qu’il tenterait de démontrer que les “personnes qui appartenaient au groupe de Robert Le Dinh étaient libres et responsables de leur choix” et qu’il n’y avait “pas de problème de consentement”. “Nous nous méfions de l’idée dévastatrice de la secte et de l’emprise sectaire, qui est un fonds de commerce”, a-t-il déclaré.

Pour Me Daniel Picotin, conseil de Dominique et Isabelle Lorenzato, membres historiques du groupe et à l’origine des poursuites, la dimension sectaire du dossier ne fait aucun doute. “Notre objectif est que la cour comprenne les manipulations de Tang et comment il a pu abuser financièrement et sexuellement de ses victimes qui étaient dans une véritable prison mentale (…) Malgré le rapport parlementaire et les condamnations, Tang a toujours une vingtaine d’adeptes, c’est insupportable pour ceux qui ont vécu un enfer auprès de ce prédateur”, a souligné Me Picotin.

En Ariège, Le Dinh était employé dans l’entreprise Ariège Couserans Plomberie, une société créée par l’une de ses proches sur ses conseils, et percevait une rémunération pour son activité de cuisinier au sein du groupe. Avant sa condamnation à Foix, il avait été condamné à deux ans et demi d’emprisonnement pour extorsion de fonds, abus de confiance et escroquerie par la cour d’appel d’Agen en décembre 1987.
Sept anciens disciples ainsi que l’UNADFI (Union nationale des associations de défense des familles et de l’individu victimes de sectes) se sont portés parties civiles.

Le procès en appel s’achèvera le 6 avril. AP

Source :http://tempsreel.nouvelobs.com/societe/20120328.FAP2103/le-gourou-presume-robert-le-dinh-juge-en-appel-pour-viols-se-dit-innocent.html

ASSOCIATED PRESS/ 28-03-2012