Le mouvement pentecôtiste est aujourd’hui, de loin, la tradition protestante la plus nombreuse dans le monde. Sa croissance réjouit ou inquiète, ainsi que certaines manifestations qui sont assez éloignées de la sobriété à laquelle le protestantisme est habitué.

Les origines
C’est aux Etats-Unis, dans les premières années du XXe siècle, que naît le mouvement qui donnera naissance au pentecôtisme. Des groupes issus de la mouvance de Wesley (méthodisme) vivent une expérience semblable à celle de la Pentecôte. Ils reçoivent ce qu’ils considèrent comme le baptême de l’Esprit, qui se manifeste par des dons (charismes) extraordinaires comme le parler en langues, le don de prophétie, de guérison, etc. Le mouvement va se répandre très rapidement dans tout le pays, puis dans le monde entier. Autour de la Première Guerre mondiale, il commence à se développer en France. Plusieurs Unions d’Eglises peuvent se réclamer de ce mouvement, comme l’Eglise apostolique ou l’Eglise de Dieu, mais ce sont les Assemblées de Dieu qui sont les plus connues et les plus nombreuses.

Un christianisme d’expérience
L’identité fondamentale du pentecôtisme est l’expérience du Saint-Esprit, souvent appelée baptême de l’Esprit. Cette expérience bouleversante de la présence de l’Esprit en soi se manifeste, pour les pentecôtistes, par le don du parler en langues qui en est le signe nécessaire. Il s’agit soit d’un parler dans une langue compréhensible, mais inconnue de celui qui s’exprime, soit le plus souvent d’une louange ou d’une prière qui n’utilisent pas les mots d’une langue existante. A la suite de cette expérience, d’autres charismes sont mis en valeur. Le don de prophétie n’annonce généralement pas l’avenir, mais dit une parole reçue de Dieu et adressée à la communauté, voire à une personne. Le don de guérison est un des plus connus. Le pentecôtisme en a parfois fait un argument d’évangélisation, le miracle manifestant la vérité de la Parole annoncée. En fait, tous les dons que l’on trouve dans les Actes des Apôtres ou les épîtres sont considérés comme pouvant se manifester dans les Eglises d’aujourd’hui.

Voir Dieu
Le dynamisme du pentecôtisme des premières décennies vient certainement de la certitude que l’on pouvait voir Dieu à l’œuvre. Il n’était plus nécessaire de comprendre des textes ou de se poser la question de l’existence de Dieu : on pouvait presque le voir et le toucher dans les manifestations de son Esprit. On comprend la force d’impact de ces Eglises sur des populations que le caractère relativement intellectuel du message protestant (même dans sa version évangélique) avait du mal à atteindre.

Contrairement à la tradition protestante classique, nous sommes ici dans un christianisme de tradition orale – même si la place de l’Ecriture reste bien évidemment centrale. Les cultes laissent une large place à des manifestations venant de l’Esprit et à des témoignages de conversion bien sûr, mais aussi de miracles.

La place des ministères
La forme de ces Eglises ressemble beaucoup à celle des Eglises baptistes ou de la plupart des Eglises évangéliques. Un point pourtant les distingue. Il accorde aux ministères, et tout particulièrement au ministère pastoral, une autorité plus grande et cela pour plusieurs raisons. La libre expression des dons dans la communauté laisse la porte ouverte à bien des dérapages. Il est donc nécessaire qu’une autorité assez forte soit reconnue. La composition populaire de nombre de ces communautés joue aussi sans doute un rôle. Comme, dans nos pays, l’origine catholique de la plupart des pentecôtistes pendant longtemps. Chaque Eglise reste très indépendante sous l’autorité de son pasteur, mais cela n’empêche pas ces communautés d’avoir entre elles des liens puissants et une forte cohérence.

Une certaine méfiance envers l’intellect
Pendant très longtemps, ces Eglises ont manifesté une grande méfiance envers la théologie et tout ce qui présentait une dimension intellectuelle. Le rejet dont elles avaient été l’objet de la part des autres Eglises dans le passé y était certainement pour beaucoup. Mais aussi la crainte de voir la réflexion amoindrir la confiance en l’action de Dieu. La situation commence à évoluer, et il n’est plus rare de voir des pentecôtistes souhaiter recevoir une formation théologique solide. Au fil du temps, le niveau des membres des Eglises évolue, augmentant l’exigence d’un enseignement de qualité. Dans des pays où ils sont plus nombreux, des facultés fleurissent déjà et il existe de véritables théologiens pentecôtistes dont le rayonnement dépasse leurs milieux.

Pentecôtistes et/ou protestants
Pendant toute la première période de leur croissance, les pentecôtistes se sont situés comme n’étant ni catholiques ni protestants. Certains spécialistes les considèrent d’ailleurs comme une autre forme de christianisme. Leur origine comme leur convictions de base sont pourtant fermement protestantes, mais ils n’ont souvent guère conscience de cette filiation. C’est avec le temps que beaucoup de pentecôtistes ont vu le besoin de renouer avec leurs racines et de manifester leur appartenance à la famille protestante. Le débat est aujourd’hui ouvert dans les Assemblées de Dieu. Certains ont, depuis déjà longtemps, pris conscience de ce que les Eglises plus anciennes peuvent leur apporter en matière de réflexion, de sagesse institutionnelle et de présence au monde. Ils font aujourd’hui partie du monde évangélique et commencent à y tenir une place de plus en plus grande. L’enjeu est de taille et la question se pose au niveau mondial.

source : REFORME