SUD OUEST / 1 septembre 2010 09h17 | Par daniel bozec
(2 septembre / version imprimée)

Le procès d’un gourou lot-et-garonnais
Dans dix jours, Robert Le Dinh sera jugé pour viols au sein de la communauté religieuse qu’il avait fondée à Madaillan (47)

Fin gourou ou bigot libertin ? Le Lot-et-Garonnais Robert Le Dinh comparaîtra devant les assises de l’Ariège, à Foix, du 10 au 18 septembre. Il y sera jugé pour viols, agressions sexuelles et abus de faiblesse au sein de sa « communauté » religieuse. Autant d’accusations dont cinq femmes se disent victimes. À l’époque, deux d’entre elles étaient mineures et auraient subi des attouchements. Longtemps domicilié à Madaillan, Robert Le Dinh a déménagé en 2005 dans un chalet au pied des montagnes du Castillonnais, près de Saint-Girons. Le groupe lui a emboîté le pas.

L’intéressé, 51 ans aujourd’hui, ne s’en est jamais caché, il l’a confirmé aux gendarmes durant l’instruction judiciaire, Dieu lui serait apparu au début des années 1980. Et de prêcher la charité chrétienne, dispensant ses enseignements à qui voulait et offrant la soupe aux déshérités sur la place du Pin, à Agen. Il y a cinq ans, Robert Le Dinh, dit Tang, comptait une vingtaine de fidèles, une partie de leurs revenus étant reversée au pot commun de la communauté. À l’arrivée en Ariège, on avait volontiers retroussé les manches pour restaurer la maison de Bonac-Irazein.

« Vulnérables »

En septembre 2007, ce sont les gendarmes qui frappent à la porte. Un membre historique s’en est allé vider son sac, accusant le présumé gourou d’abuser des femmes du groupe depuis des années, entre autres extorsions de fonds. Lui reconnaît avoir entretenu des relations sexuelles avec les unes et les autres, conteste les avoir imposées et nie les attouchements qu’ont fini par dénoncer deux jeunes femmes. Elles en auraient été victimes dès l’âge de 10 et 11 ans ; leurs mères faisaient partie du cercle de fidèles. Robert Le Dinh a beau récuser le mot « secte », exerçait-il une emprise morale telle que ses maîtresses n’osaient se refuser à lui ?

En pleine nuit, il arrivait qu’il charge l’une d’elles de recueillir par écrit ses « songes prémonitoires » avant de l’honorer. La même se serait sentie un temps « flattée » d’être ainsi choisie. Toutes les plaignantes entendues par les enquêteurs présentent des personnalités aussi « vulnérables » qu’« influençables », dont Robert Le Dinh aurait sciemment tiré parti, selon les rapports des psychiatres versés au dossier de l’instruction.

« Machination »

Une mainmise que conteste le comité de soutien de Robert Le Dinh, formé à Madaillan et dûment enregistré au titre d’association à la préfecture du Lot-et-Garonne. Au printemps 2009, des affiches placardées aux abords du palais de justice d’Agen le clamaient haut et fort, « Le Dinh Robert innocent ». Le blog du comité le dit « victime d’une machination qui l’accuse d’être un violeur multiple ». « Toutes les accusatrices étaient tenaces et jalouses au combat pour tenter de s’approprier M. Le Dinh », peut-on y lire.

Ainsi la communauté serait-elle, au mieux, un cercle religieux entretenu pendant vingt-cinq ans sur fond de libertinage. « Robert Le Dinh est l’inspirateur d’une pensée qu’on est libre ou pas de partager, sans aucune contrainte », défend Édouard Martial, avocat de l’accusé avec le Toulousain Pierre Le Bonjour. Aux accusations de viols s’ajoutent toutefois celles d’agressions sexuelles sur mineures : « Qu’il y ait des attouchements, encore faut-il qu’ils soient prouvés. Il les conteste », ajoute Me Martial. « Ce sera une audience d’impression », promet-il, « avec des pro et des anti. Ce sera noir et blanc. » Écroué dès son interpellation, Robert Le Dinh a été libéré voilà un an. Placé sous contrôle judiciaire, il vit au chalet de Bonac-Irazein.

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