Après avoir passé au crible 120 compléments alimentaires, l’association estime que « si certains se révèlent intéressants, d’autres peuvent être susceptibles d’engendrer certains troubles.

Les compléments alimentaires, concentrés de nutriments ou d’autres substances, sont de plus en plus consommés en France. Le marché a représenté 1,9 milliard d’euros en 2018. Mais selon un hors-série de 60 Millions de consommateurs, paru ce jeudi 10 octobre, et qui passe au crible 120 de ces produits, leur usage n’est pas anodin. La présence d’additifs dans ces compléments, l’effet cocktail si l’on en consomme plusieurs ou encore leur contre-indication avec certains médicaments, doivent inciter les consommateurs à la prudence.

Que sont les compléments alimentaires ?

Selon l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail (Anses), on entend par compléments alimentaires, « les denrées alimentaires dont le but est de compléter le régime alimentaire normal et qui constituent une source concentrée de nutriments ou d’autres substances ayant un effet nutritionnel ou physiologique seuls ou combinés… ». L’autorité de santé se réfère à la Directive 2002/46/CE du Parlement européen, transposée dans la loi française par le décret n°2006-352 du 20 mars 2006.

On attribue à ces substituts des vertus censées améliorer notre santé. La prise de compléments alimentaires permettrait, selon leurs spécificités, de fortifier l’organisme, renforcer son immunité, diminuer son stress, faciliter la perte de poids, soulager certains désagréments de la ménopause ou de la grossesse. Ces substances sont commercialisées sous différentes formes : gélules, poudres, préparations liquides (sirop, ampoules…).

Les ingrédients autorisés sont réglementés au niveau national et européen. Il s’agit de vitamines, minéraux et plantes, dont les doses journalières maximales doivent être respectées. Ces produits font l’objet de contrôles de la Direction de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF), comme pour les autres denrées alimentaires.

Toutefois, contrairement aux médicaments, la commercialisation des compléments alimentaires ne nécessite pas d’autorisation individuelle de mise sur le marché. Cette dernière implique l’évaluation préalable par une instance d’expertise d’un dossier soumis par l’industriel fabricant le produit.

Que leur reproche 60 Millions de consommateurs ?

Après avoir passé au crible 120 produits, l’association estime que « si certains se révèlent intéressants, d’autres peuvent, au contraire, être susceptibles d’engendrer certains troubles ou d’aggraver des pathologies ».

60 Millions de consommateurs explique que de trop nombreux additifs sont ajoutés dans certains produits : parmi eux le colorant rouge allura, « qui favorise l’hyperactivité chez les enfants », ou encore le dioxyde de titane, une molécule controversée qui sera interdite dans les aliments, dès le mois de janvier 2020.

 Par ailleurs, l’organisme alerte sur l’effet cocktail, en cas de consommation de plusieurs de ces compléments. « Il est très compliqué de mesurer l’ensemble des synergies entre les différents ingrédients. »

Le surdosage de certaines vitamines peut également entraîner des complications. C’est le cas de la vitamine C dont un apport trop important peut nuire au foie et aux reins qui devront ensuite l’éliminer. Consommer à trop long terme d’autres types de vitamines comme la B6 ou la B12, peut également s’avérer nocif, notamment sur le système nerveux.

Les ingrédients de certains compléments alimentaires sont également susceptibles d’entraîner des effets secondaires. 60 Millions de consommateurs cite l’exemple des huiles essentielles, qui peuvent déclencher des crises d’épilepsie. Enfin certains produits présentent des contre-indications avec certains médicaments. C’est notamment le cas du pamplemousse, ou de son extrait de pépins vanté pour prévenir les rhumes hivernaux.

Cet appel à la prudence est-il nouveau ?

L’Anses a mis en place dès 2009 un dispositif de nutrivigilance dans le cadre de la loi Hôpital, Patients, Santé et Territoires dont l’objectif est de surveiller les effets indésirables liés à la consommation des compléments alimentaires ainsi que d’autres produits alimentaires tels que les aliments enrichis ou de nouveaux aliments destinés à une alimentation particulière (nourrissons, sportifs, patients souffrant d’intolérance alimentaire…).

Plusieurs études ont mis en évidence la nécessité de consommer les compléments alimentaires avec raison et parcimonie.

En février dernier, l’Académie de pharmacie a consacré un rapport aux compléments alimentaires à base de plantes. Elle rappelait que certains avaient des effets proches des médicaments sans être aussi bien encadrés et mettait en garde contre un mauvais usage potentiellement à risque (consommation de plusieurs produits, dépassement des doses recommandées). Elle alertait en outre sur les dangers de ceux contenant du suc d’aloé ou des racines de rhubarbe, utilisés pour leur effet laxatif.

L’an passé, l’Anses a souligné que les compléments alimentaires contenant de la mélatonine, censés faire mieux dormir, comportaient des risques d’effets secondaires (vertiges, irritabilité, tremblements, migraines, nausées…)

« Par définition, un complément alimentaire ne peut avoir ni revendiquer d’effets thérapeutiques », rappelle encore l’Anses sur son site internet. D’autant que plusieurs études ont conclu, pour la grande majorité des compléments en vitamines ou minéraux, à l’absence d’intérêt prouvé.

Quelles précautions prendre ?

L’Anses insiste sur le fait que la consommation de compléments alimentaires doit rester éclairée. Selon l’autorité de santé « les déficits d’apport et a fortiori les carences en nutriments sont très rares dans la population générale et ne concernent que la Vitamine D ». Toutefois certaines catégories de population comme les femmes enceintes, les enfants, les personnes âgées peuvent présenter des carences, nécessitant la prise de compléments.

D’une manière générale, une alimentation variée et équilibrée associée à une activité physique adaptée doit permettre de couvrir ses besoins, souligne l’Anses.

En cas de prise de compléments alimentaires, elle recommande d’éviter des prises « prolongées, répétées ou multiples » au cours de l’année sans demander conseil à un professionnel de santé ; de respecter « scrupuleusement » les conditions d’emploi fixées par le fabricant ; de signaler à un professionnel de santé tout effet indésirable et enfin, de privilégier « les circuits d’approvisionnement contrôlés par les pouvoirs publics ».

 source :
Ouest-France Ouest-France avec AFP Publié le