Cela saute aux yeux au terme de la première journée du procès d’assises à Chalon de Jean-Dominique Lefèvre, 66 ans, pour agressions sexuelles sur mineures et pour viols sur mineure et majeure : ce n’est pas sa congrégation religieuse (Saint-Jean, dont la maison mère est à Rimont, Fley, 71) qui l’a stoppé dans sa présumée dérive pédophile, ce sont ses victimes supposées. Et pourtant, la hiérarchie des « petits gris », rapport à la couleur de leur robe, savait.

Malgré des études brillantes -il a fait l’École Centrale de Lyon- et un début de carrière d’ingénieur, Jean-Dominique Lefèvre s’est tourné vers la communauté Saint-Jean fin 1979. Il sera vite frustré : ses supérieurs lui refusent la prêtrise, le cantonnant à un titre de diacre perpétuel. Des soupçons, déjà ?

Avant de dresser son portrait, le président Brugère de la cour d’assises de Saône-et-Loire a tenu à connaître les positions de l’accusé sur la série de délits et crimes sexuels qui lui sont reprochés. Ils débutent à La Chaise-Dieu (Haute-Loire) par une « caresse intime » sur une fillette de 8 ans en vacances avec ses parents en retraite spirituelle au prieuré. Ils se poursuivent la même année, toujours à la Chaise-Dieu sur une fillette de 7 ans en catéchisme qu’il a appâtée avec un goûter. Et toujours une caresse sur le sexe de la fillette. Quand l’affaire est éventée deux ou trois ans après les faits, l’évêché du Puy assure que Frère Jean-Dominique n’aura plus de contact avec les enfants. Promesse non tenue.

{{De la Roumanie au Canada
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D’ailleurs, il a été envoyé en Roumanie, à Bucarest. Une fillette des rues, de 11 ans, sera la première à porter plainte contre le moine. Pour viols répétés cette fois. Le moine réfute, ne concède que des attouchements. Et admet aussi avoir caressé les fesses de cinq fillettes malades qu’il visitait « en mission d’aide charitable » dans un hôpital. Dans la désorganisation de l’après-Ceaucescu, celles-ci se sont tues. Son supérieur apprend ces penchants, lui intime de fréquenter un psychiatre.

Lorsqu’il revient en France au sanctuaire de Notre-Dame-du-Laus (sud des Alpes), deux fillettes non identifiées sont aussi touchées. Le voici à Châteaufort en 1998 (Alpes-de-Haute-Provence) : au cours d’une réception de mariage, il glisse la main dans la culotte d’une fillette, la caresse et l’embrasse. Les parents renoncent à la plainte contre l’assurance d’un traitement psychiatrique. La même année, en visite dans une famille, Jean-Dominique prend une autre fillette sur ses genoux et lui inflige le même geste. Le prieur l’envoie au Canada pour une thérapie express. Quand il revient à Rimont, une femme fragile de 33 ans qu’il est censé accompagner se dit victime de deux viols. Que le frère nie. Elle ne témoignera plus, elle s’est suicidée.

Jeudi, Frère Jean-Dominique a beaucoup demandé pardon pour les actes d’agression sexuelle tous reconnus comme il l’avait fait par lettre toutes ces années auprès de quelques victimes espérant extorquer leur silence. Et tandis que deux d’entre elles témoignaient jeudi, il priait assis, mine contrite et chapelet en main.

source :
http://www.lejsl.com/edition-de-chalon/2015/05/22/les-demi-aveux-du-moine