L’Uni­ver­sité d’Ot­tawa (U d’O) accueille, depuis lundi 27 janvier, une expo­si­tion de la Commis­sion des citoyen.ne.s pour les droits humains (CCDH) inti­tu­lée Psychia­trie : une indus­trie de la mort.

L’ex­po­si­tion est prévue jusqu’au vendredi 31 janvier prochain. Elle est gratuite et ouverte tous les jours, de 8 h à 22 h, au Centre univer­si­taire Jock-Turcot, devant le Carre­four fran­co­phone.

Les panneaux de l’ex­po­si­tion indiquent : «  soyez là et obte­nez les faits  ». Ils ques­tionnent aussi la source des abus en santé mentale.

L’ex­po­si­tion est accom­pa­gnée de trois sémi­naires orga­ni­sés par des membres de la CCDH : le mardi 28 janvier à 19 h, «  Que peut cacher une étiquette ?  », le mercredi 29 janvier à 19 h «  Sommes-nous tous fous ?  » et le jeudi 30 janvier à 19 h «  Elec­tro­choc ; théra­pie ou torture ?  ».

Pourquoi cette expo­si­tion ?

Sur son site inter­net, la CCDH se présente comme un orga­nisme de surveillance de la santé mentale qui infor­me­rait le public et aler­te­rait les auto­ri­tés sur des abus dans le domaine.

Robert Dobson-Smith, président de la CCDH explique que la Commis­sion a été établie par l’Église de Scien­to­lo­gie. Il précise qu’elle a ses propres acti­vi­tés sans aucune influence de l’Église. «  Nous avons notre propre person­nel. Des scien­to­logues nous aident et nous l’ap­pré­cions  », décrit-il.

Dobson-Smith présente l’ex­po­si­tion comme intem­po­relle, itiné­rante et mondiale. Il raconte que c’est en 2007 qu’un DVD a été créé sur le même thème, et que ce serait à ce moment-là que l’ex­po­si­tion est née. Selon lui, l’ex­po­si­tion couvre un large spectre histo­rique de la psychia­trie. «  Tout est docu­menté, nous avons fait des recherches, cela a pris des années  », précise-t-il.

Selon Yvette, scien­to­logue présente à l’ex­po­si­tion, son but est d’in­for­mer sur les crimes en psychia­trie. Le président déclare que «  partout dans le monde, des personnes sont trai­tées sans demande ou obten­tion d’in­for­ma­tions de la part des méde­cin.e.s, concer­nant les médi­ca­ments et les trai­te­ments qu’elles reçoivent  ».

Le président affirme que les psychiatres ne s’ap­puie­raient pas beau­coup sur la science mais parti­cu­liè­re­ment sur le Manuel diagnos­tique et statis­tique des troubles mentaux.

L’U d’O aurait été choi­sie comme lieu pour présen­ter l’ex­po­si­tion, car la Commis­sion souhaite la situer dans une partie centrale de la ville et qu’il aurait été très diffi­cile à la CCDH de trou­ver un local à louer en raison de sa taille impor­tante.

Protes­ta­tions des étudiant.e.s 

Une mobi­li­sa­tion étudiante aurait débu­tée sur l’ap­pli­ca­tion mobile Reddit. Plusieurs mani­fes­ta­tions étudiantes ont eu lieu devant l’ex­po­si­tion dont mardi le 28 janvier, à 17 h et mercredi le 29 janvier, à partir de 13 h. Des étudiant.e.s portaient des panneaux avec des mentions comme « stop à la propa­gande du fear monge­ring  ».

Une péti­tion contre l’ex­po­si­tion a aussi été lancée lundi 27 janvier par Avery Monette, sur le site inter­net Change.org, à l’adresse de Jacques Frémont, recteur de l’U d’O. Le but de la-dite péti­tion est de «  bannir les scien­to­logues du campus de l’U d’O  ». Elle a atteint les 900 signa­tures à 16 h 30, mercredi 29 janvier.

La péti­tion avance que l’ex­po­si­tion est dange­reuse car elle serait fausse dans ses affir­ma­tions. Elle demande l’in­ter­dic­tion d’ex­po­si­tions et de sémi­naires orga­ni­sés par l’Église de Scien­to­lo­gie et ses affi­lié.e.s.

Une prise de mesures pour éviter la repro­duc­tion de «  ce genre d’évé­ne­ment  », ainsi que la mise en place par l’Uni­ver­sité d’un comité composé d’étu­diant.e.s et de «  membres appro­prié.e.s de l’ad­mi­nis­tra­tion  » pour appuyer la santé mentale des étudiant.e.s, a aussi été exigée.

Zachary Robi­chaud, étudiant en troi­sième année en sciences poli­tiques et commu­ni­ca­tions, raconte que l’ex­po­si­tion présente la psychia­trie comme la racine du mal dans le monde. « [La peur inci­tée] sur le domaine pour­rait faci­le­ment pous­ser les étudiant.e.s à igno­rer leur santé mentale et pous­ser des étudiant.e.s dans des situa­tions dange­reuses  », explique-t-il. Il espère que la péti­tion puisse mener à l’éli­mi­na­tion de l’ex­po­si­tion et rappelle que tout demeure entre les mains de l’Uni­ver­sité.

Caro­lina Muñoz, raconte que l’ex­po­si­tion l’a choquée par ses images graphiques. Elle affirme qu’un lieu comme le Centre univer­si­taire ne convient pas car « il s’agit d’un espace public destiné aux acti­vi­tés et aux clubs d’étu­diant.e.s, et ce groupe ne fait partie d’au­cune liste de clubs approu­vés par le Campus Vibez uOttawa (CVUO) [et] n’est asso­cié aux étudiant.e.s d’au­cune manière ». Elle soupçonne l’Église de Scien­to­lo­gie d’avoir versé à l’Uni­ver­sité une somme d’argent impor­tante pour occu­per le lieu.

Kate­ryna Bezsa­lova, étudiante en deuxième année en beaux-arts raconte avoir eu une conver­sa­tion avec le recteur de l’U d’O, Jacques Frémont, mardi 28 janvier. Frémont lui expliquait que l’ex­po­si­tion avait été propo­sée à l’Uni­ver­sité comme une « présen­ta­tion de sensi­bi­li­sa­tion à la santé mentale » et non sous son réel titre. Selon lui, il serait inap­pro­prié de rompre le contrat passé avec la Commis­sion.

Dobson-Smith n’est pas alarmé par la contes­ta­tion étudiante. Il raconte s’être entre­tenu avec certain.e.s d’entre eux et trouve leurs points de vue inté­res­sants. Il explique que l’ex­po­si­tion a été orga­ni­sée pour atti­rer l’at­ten­tion. « Nous profi­tons de la contro­verse  », affirme-t-il.

La parole de l’Uni­ver­sité 

Isabelle Mailloux-Pulkin­ghorn, gestion­naire des rela­tions avec les médias de l’U d’O, indique que l’Uni­ver­sité « connaît l’exis­tence de cette expo­si­tion et n’ap­puie aucu­ne­ment les posi­tions véhi­cu­lées par la CCDH  ». Elle ajoute que l’Uni­ver­sité est atta­chée à la « recherche basée sur les faits, telle que menée par son programme de psychia­trie de la Faculté de méde­cine  ».

Elle fait connaître que l’Uni­ver­sité encou­rage les débats respec­tueux au nom de sa poli­tique sur la liberté d’ex­pres­sion qui stipule que : «  l’Uni­ver­sité recon­naît que sa valeur la plus fonda­men­tale est celle de la liberté acadé­mique. Elle prise et protège la liberté d’enquête et la liberté d’ex­pres­sion sous toutes ses formes ; elle refuse donc de s’in­ter­po­ser entre la commu­nauté et les vues jugées contro­ver­sées ou répré­hen­sibles, et ne permet aucune répres­sion de la libre expres­sion de la gamme complète de la pensée humaine, à l’in­té­rieur des limites impo­sées à l’Uni­ver­sité par la loi du Canada et de l’On­ta­rio  ».

Mailloux-Pulkin­ghorn précise que l’Uni­ver­sité reste enga­gée à soute­nir le mieux-être des étudiant.e.s, des profes­seur.e.s et des employé.e.s, à travers des services de santé mentale qui reposent sur des faits scien­ti­fiques.

Selon des membres de la CCDH, l’Uni­ver­sité aurait bloqué le site inter­net de la Commis­sion dans la zone de l’ex­po­si­tion, sans en infor­mer celle-ci.

Le Syndi­cat étudiant de l’U d’O (SÉUO) a publié un commu­niqué sur sa page Face­book, le mercredi 29 janvier condam­nant l’ex­po­si­tion de la CCDH. Celui-ci mani­feste son soutien aux mani­fes­ta­tions étudiantes. Le commu­niqué présente égale­ment une liste de ressources en matière de santé mentale que vous pouvez consul­ter.

source : Par Yasmine Hursault – Cheffe du pupitre Actua­li­tés 

http://www.larotonde.ca/etudiants-disent-non-a-scientologie-campus/