Il doit élire de nouveaux supérieurs et approuver des statuts révisés pour sortir la Légion du Christ de la crise de confiance qui la mine depuis la révélation de scandales liés aux agissements de son fondateur.

Des anciens de la congrégation estiment que les changements intervenus depuis la nomination d’un délégué pontifical, il y a trois ans, sont très insuffisants.

Les Légionnaires du Christ sont-ils « sur le chemin d’un renouveau authentique et profond », comme les y a appelés le pape François en juin dernier ? C’est la question qui se pose, à l’ouverture, aujourd’hui à Rome, du chapitre général extraordinaire de cette congrégation religieuse fondée par le P. Marcial Maciel ­Degollado (1920-2008). À l’ordre du jour : élection de nouveaux supérieurs et approbation de nouvelles constitutions réécrites. Le chapitre, qui devrait durer jusqu’à fin février, est présidé par le cardinal Velasio de Paolis, représentant personnel du pape auprès de la Légion du Christ.

L’avenir de cette congrégation créée au Mexique en 1941, aujourd’hui présente dans 22 pays, préoccupe le Vatican, qui, depuis Pie XII, a favorisé son expansion. À la suite des révélations de crimes de pédophilie et de la double vie dont s’était rendu coupable le P. Maciel, ainsi que des dérives financières, Rome cherche, depuis Benoît XVI, à encadrer une remise sur pied de la Légion.

Après une enquête canonique, en 2006, sur son fondateur et l’envoi de visiteurs apostoliques (enquêteurs internes au Saint-Siège) dans ses diverses institutions en 2009, ainsi qu’à son mouvement laïc lié, Regnum Christi, Benoît XVI nomme, en 2010, l’ancien président de la préfecture pour les affaires économiques du Saint-Siège, Mgr de Paolis, délégué pontifical auprès de la congrégation. À ce titre, il dispose des pleins pouvoirs pour la renouveler.

Le délégué pontifical s’est inséré dans l’administration de la congrégation

En trois ans, le cardinal italien estime que la Légion a suivi un « chemin de pénitence et de purification en vue d’un renouvellement », selon les termes de son homélie, le mois dernier, à Rome, à l’occasion de l’ordination sacerdotale de 31 Légionnaires du Christ. « Vous avez su écouter les nombreuses accusations qui vous ont été adressées de maintes parts, leur a-t-il dit. Vous avez souffert et vous vous êtes aussi rendu compte de la souffrance que la Légion a causée à d’autres par le comportement de ses membres, à commencer par le fondateur. »

« Qu’ainsi puisse naître une nouvelle Légion réconciliée avec elle-même et avec les autres, capable de pardonner et de demander pardon », a conclu en guise de souhait le cardinal de Paolis, reconnaissant toutefois qu’après ces années troublées plusieurs – mais pas la majorité – avaient préféré quitter la congrégation.

De fait, environ 70 des 890 prêtres, plus du tiers des 900 femmes laïques consacrées et 232 séminaristes ont coupé les liens avec la Légion, tandis que les nouvelles recrues ont diminué de moitié. Avec ceux qui sont restés, le délégué pontifical s’est inséré dans l’administration de la congrégation. Sans en congédier les supérieurs, misant plutôt sur des changements de l’intérieur et sur les élections à venir par le présent chapitre général. Jusqu’à la rencontre de ce mercredi, la congrégation est dirigée par un prêtre allemand de 39 ans, Sylvester Heereman. Vicaire général de la Légion du Christ depuis 2012, il cumule cette fonction par intérim depuis plus d’un an avec celle de directeur général, le successeur du P. Maciel, élu en 2005, le prêtre mexicain Alvaro Corcuera, ayant pris une année sabbatique pour raisons de santé.

Un changement se fait sentir chez les sœurs consacrées de Regnum Christi

« Il n’existe aucune condition permettant d’empêcher que les nouveaux supérieurs de la congrégation soient recrutés parmi les anciens membres de la garde rapprochée du P. Maciel », mettent en garde, dans un communiqué rendu public en France à l’approche du chapitre général, trois représentants de ceux qui s’affirment victimes de dérives sectaires de communautés nouvelles catholiques.

L’un des signataires, un ancien Légionnaire du Christ, Xavier Léger (1), et trois autres anciens, ainsi que trois anciens membres du mouvement Regnum Christi, ont aussi adressé une série de questions au chapitre de la Légion, l’interpellant sur sept pages. « Quelle est la position de la Légion aujourd’hui sur son fondateur ? », « Que fait la Légion pour écouter la voix de ceux qui la contredisent ou affirment même avoir été trompés, abusés ou escroqués par elle ? », demandent-ils notamment, dénonçant « le parti pris » des enquêteurs du Saint-Siège et du délégué pontifical.

Le chapitre général « devra se prononcer sur les événements que la congrégation a vécus », a assuré le cardinal de Paolis dans son homélie du mois dernier. Signe que la crise de confiance minant la Légion du Christ n’est pas achevée, l’un de ses six conseillers généraux, le P. Deomar De Guedes Vaz, prêtre brésilien de 51 ans, a demandé en novembre dernier à vivre une année hors de la communauté.

Toutefois, un changement se fait sentir chez les sœurs consacrées de Regnum Christi. Le mois dernier, elles ont élu une nouvelle directrice générale, Gloria Rodriguez, psychologue madrilène de 38 ans, par un processus participatif inédit. Cinq conseillers et un administrateur général ont aussi été élus pour diriger durant six ans cette branche laïque liée aux Légionnaires du Christ.

SÉBASTIEN MAILLARD, à Rome

(1)co – Auteur de « Moi, ancien légionnaire du Christ » , Flammarion, 350 p., 21 €.

source : http://www.la-croix.com/Religion/Actualite/Les-Legionnaires-du-Christ-dans-l-attente-d-un-nouveau-depart-2014-01-07-1085943