Publié le mardi 19 mai 2009 à 18H18

{{Jacqueline Burguière, la présidente de l’ADFI Provence (association de défense des familles et de l’individu victimes de sectes) revient sur le rapport annuel sur les sectes présenté ce matin par la Miviludes.}}

Dans son rapport annuel présenté au Premier ministre ce matin, la Miviludes (Mission interministérielle de vigilance et de lutte contre les dérives sectaires) n’a pas établi de liste des mouvements sectaires installés en France comme avait pu le faire le groupe parlementaire étudiant ce phénomène en 1994. Elle a en revanche dressé un état des lieux global des risques et des moyens permettant de les limiter. Son président, Georges Fenech, a notamment proposé d’établir une sorte de répertoire des pratiques sectaires, en particulier concernant les “niches nouvelles” que constituent certaines méthodes de la psychothérapie.
Une initiative que salue Jacqueline Burguière, la présidente de l’ADFI Provence (association de défense des familles et de l’individu victimes de sectes).

{{- Que retenez-vous de ce rapport ?}}

Jacqueline Burguière : La Miviludes a mis l’accent à juste titre sur les psychothérapies. En matière de sectes, on n’a plus affaire à de grandes multinationales mais à tout un tas de praticiens proposant des médecines douces, du coaching, développant l’idéologie du Nouvel âge ou promettant le bien-être. C’est entré dans les moeurs et c’est d’autant plus dangereux que l’aspiration au bonheur est légitime. On est confronté à un éclatement des mouvements sectaires.

{{- Vous traitez donc plus de cas ?}}

J.B. : “Non et c’est ce qui nous inquiète. Le nombre de personnes venant vers nous a été en nette progression pendant un certain nombre d’années et est maintenant en régression. Seulement, cela ne veut pas dire qu’il y a moins de victimes mais que l’individualisme croissant les isole et que certains se renseignent plutôt sur Internet, ce qui est voué à l’échec.

{{- La région est-elle particulièrement touchée ?}}

J.B. : Les chiffres de 1995 nous plaçaient parmi celles ayant les plus fortes densités, exception faite des Alpes de Haute-Provence et des Hautes-Alpes. C’est certainement toujours le cas.

{{- La Miviludes n’a pas dressé de liste cette année, ce n’est pas un outil efficace ?}}

J.B. : Non, répertorier les sectes est impossible et n’a pas d’intérêt. Après la parution de la dernière liste, beaucoup de gens nous la demandaient, je la donnais avec réserve parce que cela ne protégeait personne. Une multitude d’associations ou entreprises peuvent dépendre d’un mouvement comme la scientologie, sans compter que les sectes changent de nom, s’adaptent. L’essentiel est qu’on les connaisse, qu’on puisse les définir, pour mettre en garde le public.

Le président de la Miviludes a évoqué un “tournant dans l’attitude des pouvoirs publics”, ajoutant : “on passe vraiment à l’action”, c’est votre sentiment ?
J.B. : La Miviludes fait du bon travail, en étant de plus en plus active, on sent qu’il y a une vraie volonté, mais sur le terrain ce n’est pas encore évident, Il faut dire que les pouvoirs publics sont assez limités puisque qu’il n’y a délit ni de secte ni de manipulation mentale donc il n’y a pas de sanction. On ne peut s’en remettre qu’à la prévention et les moyens manquent.
Cela fait 28 ans que j’étudie les sectes, 24 ans que je suis sur le terrain, j’ai rencontré 10 000 cas sur la région et je peux vous dire que c’est un phénomène qui peut toucher n’importe qui. Dans l’esprit des gens, c’est tellement stupide que ça ne peut concerner que des personnes stupides, du coup personne n’est sur ses gardes.”

ADFI Provence, permanence téléphonique les lundi et jeudi après-midis de 14h30 à 18h30 au 04 42 17 97 96, www.unadfi.com
Propos recueillis par Audrey Savournin (asavournin@laprovence-presse.fr)

La Provence